1905, 2005 : cent ans après le vote des lois laïques,
Défendre les droits démocratiques dans la lutte pour l'émancipation

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Mis en ligne le 15 décembre 2005



Les lois laïques ont cent ans. Adoptées le 9 décembre 1905, elles parachevaient, avec bien des limites, le processus de laïcisation de l'Etat qu'avait engagée la Révolution française et l'esprit des Lumières et aboutissaient à la séparation des Eglises et de l'Etat.
Le débat sur la laïcité est revenu sur le devant de la scène politique depuis qu'en 1989, à partir du collège de Creil, des intégristes islamistes ont tenté d'imposer le port du voile à l'intérieur des établissements scolaires. Bien que le port du voile soit avant tout le problème de l'oppression des femmes, la loi de 2003 sur l'interdiction des signes ostensibles d'appartenance religieuse à l'école a une nouvelle fois ravivé le débat laïque et donné l'occasion à Chirac d'une croisade pour la laïcité à la française, " l'étendard de la République " qui aurait permis l'intégration sociale de générations d'enfants d'immigrés aux cultures et religions multiples.
L'explosion de révolte de la jeunesse dans les banlieues est en train de renverser brutalement ce mythe d'une laïcité qui intègrerait, en révélant la profondeur des inégalités, des discriminations, du racisme et de l'exclusion dont sont victimes les jeunes des milieux les plus populaires et particulièrement ceux issus de l'immigration. La violence sociale contre la jeunesse ouvrière défavorisée que représentent le chômage massif, la précarité, l'exclusion, avec la criminalisation et la répression comme corollaire, renforcent les réactions de repli, les communautarismes et ceux qui s'en nourrissent, les intégrismes religieux sous toutes leurs formes.
Le débat est relancé. Il y a ceux qui voudraient réviser les lois de 1905, qui ne seraient plus aujourd'hui adaptées à notre époque où en particulier l'islam, pratiquement inexistant au début du siècle dernier, est devenu la deuxième religion en France. Ils voudraient financer ses mosquées et lieux de culte, comme le souhaite aujourd'hui Sarkozy qui plaide pour réviser la loi, en prétendant lutter contre le communautarisme. C'est aussi au nom de la lutte contre les communautarismes que les laïques de la République défendent les lois de 1905, oubliant parfois que la République s'est fort bien accommodée des intrusions croissantes de l'Eglise, principalement catholique, dans le domaine public, en particulier de l'enseignement.
Un siècle de développement capitaliste ont profondément changé les conditions qui avaient marqué le vote de 1905 et la crise actuelle du capitalisme avec la régression sociale qu'elle engendre en révèle les limites. La séparation des Eglises et de l'Etat représente une avancée démocratique importante qui a fait partie intégrante des luttes du mouvement ouvrier et qui reste un acquis que nous défendons contre l'offensive de ceux qui voudraient imposer à tous leur préjugés, leur obscurantisme, leur mépris des femmes. Ce combat démocratique se heurte aux limites de la république capitaliste, colonialiste et impérialiste. Son dépassement passe par la lutte pour l'émancipation sociale.

L'Eglise, instrument des vieilles classes réactionnaires
La laïcité se définit comme garante de la liberté de pensée, de conscience, à l'opposé de bien des Etats dans le monde qui associent encore au pouvoir une religion officielle et condamnent l'ensemble de la population à obéir à ses règles et à ses préjugés. Les Eglises, quelles qu'elles soient, ont de tous temps été les alliées fidèles des pouvoirs, de l'ordre social établi, dans le sens où leurs idées prônent la soumission des hommes. Cela ne veut pas dire qu'elles n'étaient pas parfois rivales des Etats, en concurrence pour le pouvoir, mais toujours alliées contre les masses exploitées. Ces rivalités ont jalonné l'histoire. En particulier celle de l'Eglise catholique, puissance politique autant que spirituelle. Les Etats aux souverains pourtant très catholiques menaient une lutte plus ou moins ouverte contre les pouvoirs pontificaux et leur prétention à se placer au-dessus des monarques, et persécutaient les riches congrégations religieuses soumises au pape. Les monarchies catholiques portugaise, espagnole et française ont expulsés les Jésuites au milieu du XVIIIème siècle, bien avant que les républicains radicaux ne s'en mêlent.
Si les rivalités existaient depuis longtemps, la révolution française, en renversant l'ancien régime pour le nouvel ordre social bourgeois, se trouva confrontée à une Eglise qui était un des piliers du pouvoir monarchique et qui contribua à regrouper et organiser les forces contre-révolutionnaires. La bourgeoisie combattit surtout l'Eglise en tant que première propriétaire foncière du pays, à qui elle confisqua ses immenses richesses. Sous la pression de la lutte des masses exploitées, elle accomplit l'immense tâche de " laïcisation " de l'Etat et de la société. Elle déracina toutes les congrégations religieuses du domaine public, laïcisa l'état civil et le mariage, accorda le divorce, et rendit l'instruction publique.
La bourgeoisie ne combattit pas la religion mais accepta et intégra les prêtres et les évêques qui reconnaissaient le nouveau pouvoir. Le décret du 12 juillet 1790 sur la Constitution civile du clergé en faisait des fonctionnaires, payés par l'Etat et élus par les citoyens. La Révolution soumit l'Eglise au politique, la différence étant que l'Etat ne faisait plus légitimer par elle son pouvoir. La seule religion de la bourgeoisie était la propriété. L'égalité des citoyens, les droits de l'homme, -universels dans les déclarations- et… la laïcité, s'arrêtaient aux portes de la propriété.
La bourgeoisie, classe dominante, recomposa vite avec l'Eglise pour consolider et légitimer son pouvoir. Napoléon rendit à l'Eglise ses prérogatives. Le Concordat de 1801 scellait un accord avec le Vatican, rendant à l'Eglise catholique le monopole sur l'enseignement et sur l'Université impériale. Il fut élargi aux protestants et aux juifs. L'enseignement primaire fut placé sous la dépendance des Frères des Ecoles chrétiennes qui assureront la formation de tous les instituteurs jusqu'à la fin du siècle. La religion catholique ne fut pas rétablie comme religion d'Etat mais comme " religion de la majorité des français ".
Confrontée aux luttes du mouvement ouvrier, la bourgeoisie continua de renforcer les pouvoirs de l'Eglise. Sitôt noyé dans le sang le prolétariat révolutionnaire de juin 1848, la loi Falloux, promulguée le 15 mars 1850, élargit les droits de l'école " libre " et son pouvoir sur l'ensemble du système scolaire décrétant la priorité de l'éducation religieuse sur les autres matières et la prépondérance morale du curé sur l'enseignement dispensé par l'instituteur. Elle permit le retour en force du " parti clérical ", de cette Eglise réactionnaire, liée aux fractions monarchistes les plus conservatrices, qui condamnait, au nom du " Syllabus ", catalogue de tout ce que le pape qualifiait d'" erreurs modernes ", toute idée de progrès, de libertés individuelles, de droits et bien sûr d'émancipation sociale.
Elle dressa face à elle l'ensemble des partisans du progrès, des valeurs de la Révolution française et de la République. Dès lors, et jusqu'au vote de la loi de 1905, les républicains radicaux mirent l'anticléricalisme à la pointe de leur combat. A la même époque, le protestant Bismarck mettait en œuvre le kulturkampf (le combat pour la culture) contre l'influence politique du parti catholique allemand qui menaçait la toute nouvelle unité allemande.
Mais c'est la Commune, la première ébauche d'Etat ouvrier, à qui revient d'avoir proclamé pour la première fois la Séparation complète des Eglises et de l'Etat et d'en avoir voté les mesures même si elle manqua du temps nécessaire pour les mettre en œuvre : elle réquisitionna les biens de l'Eglise pour ses besoins sans compensation, laïcisa totalement la société et instaura l'instruction publique et gratuite, bannissant l'instruction religieuse des programmes. Elle bannit l'Eglise du domaine public, en tant que religion, pouvoir d'oppression et de domination. Le combat pour l'instruction laïque, " instruire pour révolter " demeura celui du mouvement ouvrier socialiste.

Les lois laïques nécessaires à la bourgeoisie industrielle
La modernisation de la société, sur la base de l'évolution scientifique et technique, l'évolution des rapports de classes, les progrès du prolétariat poussaient au recul des idées religieuses, et de fait à la laïcisation de l'Etat.
La révolution industrielle, les progrès techniques dans la production, nécessitaient une main d'œuvre qui sache lire, écrire et compter, qui possède un minimum d'instruction. C'est pour répondre à cette évolution et ce besoin que la bourgeoisie chercha à soustraire les enfants des classes populaires de l'influence de l'enseignement des congrégations religieuses et que furent votées les lois scolaires, dites Ferry de 1881, 1882 et 1886. Elles constituent encore les bases de l'école républicaine, laïque, gratuite et obligatoire, " école sans Dieu " mais non sans morale, inculquant aux enfants d'ouvriers le respect de la loi, de la propriété et les valeurs " civilisatrices " du colonialisme.
En 1881, une loi supprime le caractère religieux des cimetières, tandis que le divorce civil est rétabli en 1884 et que les prières publiques à l'ouverture des sessions parlementaires sont supprimées. Le personnel des hôpitaux est laïcisé.
Ces mesures réalisées, les Républicains n'étaient plus pressés pour aller jusqu'à la séparation. C'est l'affaire Dreyfus qui, en ravivant la guerre entre cléricaux et anticléricaux, entre nostalgiques de la Monarchie et républicains, relança la question de la séparation. Les socialistes, autour de Jaurès, luttant pour la démocratie s'engagèrent pleinement dans ce combat du côté des républicains dreyfusards contre la réaction. En 1902, Rosa Luxembourg conseillait aux socialistes de s'engager jusqu'au bout dans la lutte contre l'Eglise pour liquider la question du cléricalisme : " Les socialistes sont précisément obligés de combattre l'Eglise, puissance antirépublicaine et réactionnaire, non pour participer à l'anticléricalisme bourgeois, mais pour s'en débarrasser. L'incessante guérilla menée depuis des dizaines d'années contre la prêtraille est, pour les républicains bourgeois français, un des moyens les plus efficaces de détourner l'attention des classes laborieuses des questions sociales et d'énerver la lutte des classes. L'anticléricalisme est en outre resté la seule raison d'être du parti radical ; l'évolution de ces dernières trente années, l'essor pris par le socialisme a rendu vain tout son ancien programme. ".
L'arrivée au pouvoir des radicaux en 1902, avec les premières mesures d'Emile Combes interdisant aux congrégations religieuses d'enseigner, accéléra le mouvement vers la séparation. La pression exercée sur la société par les luttes du mouvement ouvrier vers la démocratie et l'appui décisif des socialistes au Parlement permirent enfin le vote de la loi de 1905, instaurant la séparation des Eglises et de l'Etat. " Les socialistes…, en revendiquant en même temps la laïcisation générale de l'instruction et de l'assistance publique ne font que contraindre la bourgeoisie à aller jusqu'au bout de ses principes et à moderniser bourgeoisement l'Etat " expliquait Rosa Luxembourg.
A la tribune du Parlement, Jaurès formula l'avancée démocratique que constituait la loi de séparation pour le mouvement ouvrier : " La République a duré assez longtemps pour permettre à la bourgeoisie républicaine et au prolétariat de s'apercevoir que, malgré l'antagonisme profond de classe qui résulte de l'opposition entre la propriété individuelle capitaliste et la conception collectiviste et communiste de la propriété, ils avaient de grands intérêts communs dans le libre développement de la production, laquelle ne peut être active et féconde que dans un pays de libre énergie et de libre pensée… Voilà pourquoi au-dessus de leurs batailles sociales, au-dessus des conceptions antagonistes de la propriété capitaliste et de la propriété socialiste qui se disputent les esprits et les intérêts, s'est constitué au profit du parti républicain tout entier, de la démocratie républicaine tout entière, un patrimoine commun des libertés laïques et d'enseignement rationnel… "


La loi de 1905, une loi de compromis, qui n'a cessé d'être battue en brèche et remise en cause
La loi fut votée le 9 décembre 1905 : " La République assure la liberté de conscience. Elle garantie le libre exercice des cultes… (elle) ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte… "
La loi de 1905 était un compromis, " une loi d'équilibre permettant la pacification ", selon Briand. La séparation était loin d'être complète. L'Etat nationalisa les biens de l'Eglise mais les cultes en gardaient la jouissance, obligeant l'ensemble de la collectivité, croyants comme non croyants à les financer. Les édifices du culte devaient être confiés à des " associations cultuelles " gérées par les fidèles. C'est cette sorte de démocratisation du culte, échappant à son contrôle, qui provoqua l'opposition violente du Vatican. Elle ouvrit une période de crise qui ne dura que le temps qu'il fallut à l'Etat pour reculer et concéder les aménagements nécessaires pour atténuer la portée de la loi. Le gouvernement arrêta les inventaires des biens ecclésiastiques nationalisés face aux violentes émeutes fomentés par les cléricaux. En 1919, une nouvelle loi permettait à l'Etat de financer des écoles privées de l'enseignement technique. A la fin de la guerre, le gouvernement du très anticlérical Clémenceau maintint le Concordat de 1801 en Alsace-Moselle redevenues françaises et ferma les yeux sur la réinstallation illégale des congrégations dans le pays.
Le cartel des gauches, dès son arrivée au pouvoir en 1924 mit tout en œuvre pour parvenir à cette laïcité " apaisée " dont se félicitent encore aujourd'hui autant les laïques que les Eglises. Un accord fut conclu avec le Vatican sur la base de la création d' " associations diocésaines " soumises à la hiérarchie ecclésiastique, pour gérer les lieux de culte, en remplacement des premières associations cultuelles prévues par la loi de 1905 qui échappaient à son contrôle.
L'Etat de la bourgeoisie renouait son vieux compromis avec l'Eglise face aux progrès du socialisme et du mouvement ouvrier, renforcés par la révolution russe et la vague révolutionnaire en Europe à la fin de la guerre.
L'histoire de la loi de 1905 est la longue succession des mesures de sa remise en cause.
En 1940, le régime de Vichy redonnait à l'Eglise le droit d'enseigner et deux ans plus tard légalisait toutes les congrégations. Pétain rétablit dans les programmes scolaires les " devoirs envers Dieu et envers la civilisation chrétienne " et fit copieusement subventionner les écoles confessionnelles par l'Etat.
Après la Libération, ces lois restèrent en vigueur et les attaques contre la laïcité se poursuivirent sous tous les gouvernements de la IVème et de la Vème République, qu'ils soient de droite ou de gauche.
L'aide financière à l'enseignement privé fut généralisée par la IVème République sous la pression incessante des organisations catholiques appuyées par les partis réactionnaires de droite et d'extrême droite, et institutionnalisée en 1959 par la loi Debré. Les " contrats d'association " permirent un détournement des fonds publics au profit de l'école soi-disant " libre " à caractère majoritairement confessionnel à l'époque comme encore aujourd'hui.
Après 1981, la gauche au pouvoir, malgré ses promesses de nationalisation de l'enseignement privé, ne revint sur aucune de ces lois et recula en 1984 sur le " grand service public unifié et laïque " inscrit dans le Programme commun, devant le million de manifestants descendus dans la rue pour l'école privée. Elle ne revint pas plus sur le Concordat d'Alsace-Moselle, l'Etat continuant encore aujourd'hui à y salarier les prêtres.
De concessions en renoncements, tous les gouvernements à droite comme à gauche ont mené des politiques qui ont fini par vider de son contenu la laïcité qu'ils sont pourtant fiers de continuer à qualifier de " laïcité à la française " et de laquelle chacun voudrait apparaître comme le meilleur défenseur.

L'islam politique relance la question laïque. Besoins et réponses de la bourgeoisie

L'émergence de l'islam politique et son offensive pour s'imposer dans le domaine public a relancé le débat sur la laïcité, à travers la question du voile.
L'islamisme politique s'est développé et renforcé en France comme en Europe sur la base d'une nouvelle immigration, combinée au recul du mouvement ouvrier et de l'offensive réactionnaire de la bourgeoisie, qui lui ont laissé le terrain libre dans les banlieues abandonnées, en proie au chômage, à la misère et à l'exclusion de populations sans espoir. C'est sur ce terreau que renaissent et se renforcent les préjugés religieux, de quelque chapelle qu'ils se revendiquent, que ce soit l'islamisme politique ou les Eglises liées au Vatican, juives ou protestantes… Mais dans les banlieues-ghettos où la majorité de la population est issue de l'immigration, l'islam domine, au point d'être devenu en France la deuxième religion. C'est là que l'islam politique exploite le désespoir des masses, la misère, l'absence de perspectives progressistes de transformation sociale, qu'il utilise et renforce le repli communautaire qui divise les classes pauvres.
L'islam politique prétend encadrer et embrigader la jeunesse issue de l'immigration exclue et sans avenir, et gagner une reconnaissance du pouvoir en négociant le contrôle des banlieues auprès de l'Etat, lui-même intéressé à trouver des alliés dans le maintien de l'ordre social.
C'est dans cet objectif que Sarkozy, Ministre de l'Intérieur-Ministre des Cultes de Raffarin, a institutionnalisé un cadre de dialogue avec les religieux islamiques en achevant la mise en place du Conseil National du Culte Musulman, politique entamée depuis des années par ses prédécesseurs de gauche.
C'est aussi dans cet objectif qu'il affiche sa volonté de réviser la loi de 1905, d' " assouplir " la laïcité pour soi-disant rattraper l'injustice dont est victime l'islam, défavorisé par son existence récente par rapport aux autres cultes. C'est la première remise en cause formelle de la loi de 1905, pourtant sans cesse bafouée, contournée, dévoyée depuis son adoption, y compris vis-à-vis de l'Islam puisqu'une grande partie de la mosquée de Paris par exemple fut financée en 1926 par des fonds publics.
Sarkozy préfère voir l'Etat financer les mosquées et les mettre sous son contrôle plutôt que de les voir construire avec l'argent des Etats comme l'Arabie Saoudite, l'Afghanistan ou le Pakistan. Cette politique ne peut que conduire au renforcement des communautarismes qu'il prétend combattre et à accentuer le rapport des forces en faveur des forces religieuses réactionnaires qui veulent imposer leur obscurantisme, leurs préjugés et leur mépris des femmes à toute la société.


La laïcité, une avancée démocratique dans le combat pour l'émancipation
Si certains ont pu regretter la faiblesse des commémorations du centenaire de la loi de 1905, -on comprend les raisons de l'Etat d'être resté discret sur la question !-, il s'agit surtout de la faire vivre, de se battre avec ceux qui la défendent. C'est une question politique, un combat démocratique que nous menons avec tous ceux qui luttent contre les oppressions, qu'elles soient religieuses, contre les femmes ou toutes autres formes de discrimination. Si nous nous sommes opposés au vote de la loi Chirac contre le port ostensible des signes religieux à l'école, c'est parce qu'elle est apparue avant tout comme une loi qui stigmatisait la population musulmane et pouvait donner des justifications aux intégristes. Nos solidarités sont du côté des filles et des femmes qui en France et ailleurs dans le monde luttent contre le voile, pour leur liberté, et nous luttons avec elles.
Lutter contre l'oppression, quelle qu'elle soit, nécessite de dépasser les limites de la laïcité républicaine qui renvoie la religion dans le domaine privée. " La religion, disait Lénine, doit être une affaire privée en face de l'Etat (qui doit être séparée de l'Eglise), mais cela ne signifie pas que le mouvement ouvrier et ses partis soient indifférents. " La lutte contre l'oppression, contre la morale, les préjugés et les idées qui les justifient est bien plus large. Elle dépasse l'anticléricalisme bourgeois mais aussi sa morale qui justifie la propriété et l'exploitation. Elle intègre la lutte contre les préjugés religieux qui ne trouve de solutions qu'à travers la lutte de classe, la lutte collective qui affranchit des craintes, des peurs qui obscurcissent la conscience.
La laïcité ne peut pas résoudre les problèmes de l'intégration dès lors que les inégalités sociales basées sur l'exploitation excluent, divisent. C'est à la lutte pour l'émancipation sociale qu'il nous faut œuvrer.

Catherine Aulnay