Débat militant | ||||||||||
Lettre publiée par des militants de la LCR |
n°4
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6
janvier 2002
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Sommaire : | ||||||||||
Editorial : Nos vux |
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Tournant dans la mondialisation impérialiste ou l'actualité concrète des tâches révolutionnaires | ||||||||||
Notre campagne, ses objectifs et ses axes politiques | ||||||||||
Retour sur le mouvement des gendarmes | ||||||||||
Guerre
en Afghanistan : Notes de lectures à propos de Lutte de classe, revue de Lutte ouvrière |
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Tous nos vux pour une réelle coopération des peuples et des travailleurs
Depuis
le 1er janvier, l'euro est la monnaie commune pour 300 millions d'Européens.
Malgré ses limites, elle témoigne d'une réalité
qui rejette loin en arrière les frontières réactionnaires
et la division des peuples selon une appartenance nationale.
Elle est le symbole de l'évolution vers la nécessaire coopération
entre les peuples comme facteur de progrès, à l'opposé
de tout repliement nationaliste. Cette évolution existe déjà
dans les consciences et personne parmi la population ne regrette vraiment la
disparition de la monnaie nationale.
Mais ce n'est pas cette aspiration à la coopération entre les
peuples qui a suscité la création de l'euro. Les bourgeoisies
européennes l'ont adopté pour en faire un outil au service d'une
concurrence exacerbée dans le cadre de la mondialisation.
Rivales entre elles, elles ne peuvent espérer gagner des parts de marché
qu'en concluant des accords à l'échelle du continent européen
pour tenter de faire un tant soit peu le poids face à la plus puissante
économie, celle du continent nord-américain. Elles n'ont pas eu
le choix que de se doter d'une monnaie unique pour faciliter les échanges
commerciaux entre les douze pays européens qui avaient réussi
à imposer à leurs classes ouvrières les sacrifices indispensables
pour satisfaire aux critères élaborés par la BCE (banque
centrale européenne).
Cette politique de " réduction des déficits publics "
dont les gouvernements de gauche comme de droite se sont fait les serviteurs
zélés a entraîné la dégradation des services
publics utiles à la collectivité, le gel des salaires, le blocage
des embauches, pour dégager toujours plus de liquidités financières
disponibles pour les trusts et les groupes financiers.
Dès le 1er janvier 99 l'euro a été mis en place pour les
marchés financiers pour faciliter les restructurations d'entreprises,
les fusions, les investissements financiers. Comme l'ont déclaré
les nouveaux PDG du premier groupe mondial de l'acier, Arcelor, fusion du groupe
français Usinor, de l'espagnol Aceralia et du luxembourgeois, Arbed,
ce qu'ils partagent c'est une même politique pour faire baisser le coût
du travail et unis, ils pourront exercer une pression encore plus forte contre
les salaires.
Plus qu'une monnaie unique, l'euro est une monnaie commune : les pièces
ont deux faces, l'une nationale, l'autre européenne. Pour construire
une Europe économique et financière, les grands groupes capitalistes
ont besoin de garder la protection de leur Etat national ; une véritable
unification politique n'est pas à l'ordre du jour tellement ils craignent
de perdre leurs privilèges et leurs prérogatives nationales.
Chirac, dans son allocution du 31 décembre, a salué le "
moment historique " de l'arrivée de l'euro pour mieux vanter "
une France plus forte " qui doit faire " de grandes réformes
de modernisation de la société, de l'économie, de l'Etat
", comme la réforme des retraites dont tout le monde sait qu'il
s'agit, sous prétexte de les défendre, de les attaquer.
Il y a une belle unanimité entre politiciens de droite et de gauche pour
prétendre que l'Union économique et monétaire est un pas
en avant vers la paix et la démocratie et tenter de nous persuader que
nous avons les mêmes intérêts que nos patrons. Pour Jospin,
nous devons faire preuve de " patriotisme économique ". Et
selon les déclarations de Jacques Delors, ancien ministre socialiste,
au Journal du dimanche, l'Europe est " le laboratoire exemplaire d'une
mondialisation maîtrisée ".
L'adoption de l'euro contribue à poser la question de l'appartenance
des salariés et des peuples à une même communauté,
celle du monde du travail. Et les salariés des banques et de la Poste
qui se sont mis en grève, dès la nouvelle année, sont là
pour le rappeler.
Les luttes sont la seule voie pour aller vers une Europe réellement démocratique,
débarrassée du parasitisme de l'exploitation capitaliste.
Les ravages de la mondialisation sont ceux-là mêmes contre lesquels
sont entrés en lutte aujourd'hui les travailleurs et les pauvres d'Argentine
dont le pays a été pillé par une bourgeoisie rapace et
soumise à la finance mondiale. La faillite de l'Etat argentin c'est la
faillite de la bourgeoisie financière. Et la révolte de la population
c'est l'espoir en une transformation sociale pour le monde.
Ce sont les meilleurs vux que nous pouvons formuler pour l'année
à venir.
"
Il ne saurait y avoir de dogmatisme là où le critère suprême
et unique de la doctrine est dans sa conformité au processus réel
du développement économique et social, il ne saurait y avoir de
sectarisme quand il s'agit de contribuer à l'organisation du prolétariat,
et que par suite, le rôle des " intellectuels " consiste à
rendre inutile l'existence de dirigeants particuliers appartenant à l'intelligentsia
".
Lénine, 1894
Tournant dans la mondialisation impérialiste ou l'actualité concrète des tâches révolutionnaires
" Succédant au cycle entamé le 9 novembre 1989, lors de la
chute du mur de Berlin, une nouvelle période historique vient indiscutablement
de démarrer " écrivait Ignacio Ramonet dans le Monde diplomatique
du mois de décembre de l'année dernière.
Il y a là quelque chose de vrai, expression du sentiment qu'une rupture
a eu lieu. Il y a, cependant, une volonté d'en rester au sensationnel,
au symbolique de l'événement, qui ne permet pas d'en prendre la
mesure.
Le 11 septembre, comme le 9 novembre, seront des jalons dans l'histoire comme
symboles de transformations en cours mais ils ne sont l'un et l'autre ni cause
ni effet essentiel.
Le 9 novembre marque une étape dans le long processus de dégénérescence
de la révolution d'Octobre 17 qui a abouti à la restauration de
la propriété privée dans l'ex-URSS. Si, par ailleurs, le
11 septembre est un des événements qui indique effectivement l'entrée
dans une nouvelle période, reste à discuter le contenu réel
de cette " nouvelle période ", du point de vue de la lutte
contre le libéralisme impérialiste. Mais pas plus que le 9 novembre
n'ouvrait une ère de démocratie, le 11 septembre n'ouvre une ère
de lutte entre la démocratie et le terrorisme !
En rester ainsi au niveau de l'événement, du sensationnel, devient
la meilleure façon de minimiser les évolutions profondes pour
discuter au premier degré des discours officiels. Pour les militants
du mouvement ouvrier, il s'agit au contraire de restituer l'événement
dans les évolutions profondes en cours non pour chercher à minimiser
quoi que ce soit mais, bien au contraire, pour essayer de dégager l'importance
de ces évolutions qui se font, elles, le plus souvent à bas bruit.
Mettre l'accent sur l'événement en lui-même masque les vraies
causes du drame du World Trade Center et obscurcit tout. L'absence de causes
intelligibles s'inscrivant dans une logique sociale et politique ne laisse pas
d'autre choix aux esprits désorientés que de s'abandonner sinon
à la bonne raison de ceux qui dirigent le monde, du moins à leur
capacité de s'amender puisque eux seuls auraient les moyens d'apporter
des solutions à la barbarie qui ensanglante le monde. Il faudrait certes
faire pression, se mobiliser, mais tout ne peut venir que d'en haut, des gouvernements,
des institutions internationales, les bonnes, et non des masses et de leur organisation
pour contester le système social et politique.
La folie des attentats, le drame du peuple afghan comme la tragédie du
peuple palestinien et du peuple israélien, ont des explications bien
rationnelles. Ils sont le résultat de la conjugaison comme des contradictions
des mille et uns moyens qu'utilisent les maîtres du monde pour maintenir
leur domination, élargir leur puissance, assouvir leur soif de profits.
C'est cela qu'il s'agit de démêler, cet article se limite à
essayer de donner des points de repère.
La faillite de l'Etat argentin ruiné tout autant par sa propre bourgeoisie
que par les usuriers du FMI met en lumière le fond de l'affaire, le pillage
des richesses produites par les travailleurs et les peuples. C'est pourquoi
la presse est presque comme muette malgré l'ampleur d'un drame qui compte
déjà plus de victimes innocentes que les attentats de New York.
Elle est muette aussi parce que les masses sont en route pour tenter d'apporter
les vraies réponses à la faillite de la bourgeoisie.
Et c'est bien la crise révolutionnaire qui s'est ouverte en Argentine
qui indique le contenu de cette " nouvelle période historique ".
Il nous faut tenter d'en prendre la mesure pour définir ses implications
du point de vue des tâches immédiates des révolutionnaires.
Les ruptures brutales qui s'opèrent actuellement sont le résultat
de longues maturations qui ont façonné les déséquilibres,
les points de faiblesse qui cèdent au moment de la distorsion entre le
passé et l'avenir.
Ces longues maturations sont avant tout économiques.
L'actualité
du déterminisme économique
" Une révolution économique et géopolitique "
s'interroge l'Express. La formule est sans conteste exagérée.
Il ne s'agit pas d'une révolution mais plus simplement d'un tournant
dans l'offensive des classes capitalistes inaugurée il y a vingt ans.
Ce tournant s'inscrit dans la continuité de la lutte pour maintenir le
taux de profit.
Il est de bon ton aujourd'hui de se plaindre que l'économie domine tout,
qu'il faudrait que la politique reprenne ses droits. Il y a là une illusion
d'optique réformiste héritée des décennies de l'après-guerre
lorsque l'Etat occupa une place croissante, phénomène qui amplifiait
l'évolution entamée avec la Première guerre mondiale.
A l'issue de la Deuxième guerre mondiale, l'URSS, les peuples coloniaux,
comme les luttes des travailleurs des pays riches qui s'exprimaient de façon
dévoyée dans la bureaucratie stalinienne, les mouvements nationalistes
bourgeois ou les partis communistes, ont contraint la bourgeoisie à faire
des concessions en s'appuyant sur son Etat. De ce point de vue, les politiques
de droite et de gauche, indépendamment des préjugés des
uns ou des autres, des illusions que chacun veut entretenir sur lui-même
en fonction du public auquel il s'adresse, étaient déjà
identiques, au service des mêmes intérêts impérialistes.
Les illusions étaient multiples, mais la politique déjà
unique ! Le bonapartisme gaulliste que Chevénement voudrait aujourd'hui
singer en était la démonstration concrète.
Cette intervention étatique croissante a nourri les illusions réformistes
de l'après-guerre. Elle était la justification et la légitimation
d'une politique visant à amender le capitalisme par la régulation
étatique. Elle explique aussi la place que ce réformisme a pu
conquérir. Sa politique était celle-là même que souhaitait
la bourgeoisie !
Puis sous les effets de la crise des années 70, et surtout le recul des
mobilisations des travailleurs et des peuples désarmés par le
réformisme social-démocrate ou stalinien et par le nationalisme
bourgeois, cette intervention a évolué, changé pour se
mettre plus ouvertement, plus cyniquement au service des intérêts
privés de la classe dominante.
C'est ce que certains ont appelé " la révolution conservatrice
" de Reagan et Thatcher et
Mitterrand.
Pour rétablir le taux de profit les bourgeoisies impérialistes
et leurs Etats s'engageaient dans une vaste offensive contre les travailleurs
et les peuples.
Idéaliser ce passé où fleurissaient les illusions réformistes
pour le plus grand profit de la bourgeoisie est une duperie dangereuse. Au moment
où les illusions meurent, il faut les enterrer joyeusement !
La tâche des militants du mouvement ouvrier est de tirer les leçons
de ce passé vis à vis des générations qui l'ont
vécu, qui ont été trahies comme des jeunes générations
que le social-libéralisme rêve à nouveau d'endormir.
Oui, le monde est une marchandise, c'est-à-dire que tous les rapports
sociaux sont déterminés par les rapports marchands, s'y intègrent
et s'y soumettent sauf d'affirmer clairement leur rupture avec la société
et la classe bourgeoise pour s'intégrer à la lutte émancipatrice
des classes travailleuses.
Pour reprendre l'expression de Lénine, la politique est de " l'économie
concentrée ". Chaque classe ou catégorie sociale défend
ses intérêts économiques, matériels, la part des
richesses produites qui lui revient.
Au travers de la politique se réfractent les rapports de force entre
les classes.
Et, en dernière analyse, ces rapports sont eux-mêmes étroitement
dépendants des évolutions technologiques qui conditionnent les
rapports entre les classes.
Vingt ans d'offensive
politique et sociale contre les travailleurs et les peuples
Ce recul du politique en faveur de l'économique, c'est le rapport de
classe, l'exploitation capitaliste qui s'exprime plus crûment. Il ne s'agit
pas du recul du politique mais de la politique qui s'avoue pour ce qu'elle est,
sans masque.
Les travailleurs ont eux-mêmes à assimiler la leçon, pour
faire de la politique et défendre leurs propres intérêts
de classe. Faire de la politique, c'est penser globalement la dynamique de l'ensemble
des faits qui déterminent les rapports entre les classes afin de peser
sur le rapport de force.
L'économie quant à elle n'est pas une science à part mais
l'étude et l'analyse de ce qui est au cur de ces rapports de classes,
ou plus précisément du lieu même où ils se forgent,
la production et l'échange.
Les questions économiques sont en général obscurcies parce
que le côté technique des choses n'est pas éclairé
par son contenu social comme si les faits économiques avaient une existence
propre indépendante du rapport de classe.
Les crises qui rythment la marche chaotique du capitalisme sont elles-mêmes
l'expression des tensions aiguës entre les classes, le résultat
des intérêts contradictoires et irréconciliables qui s'organisent
dans la production capitaliste fondée sur l'exploitation. Les crises
sont l'expression aiguë des luttes entre les classes mais aussi de la concurrence
qui oppose les différentes bourgeoisies sur le champ de l'économie
mondiale.
Les différentes crises financières qui ont éclaté
dans la dernière décennie ne sont pas des accidents techniques
mais la conséquence de la lutte pour l'appropriation des richesses entre
les différentes bourgeoisies. Entre les mains des bourgeoisies dominantes,
surtout celle des USA, la finance est une arme pour se soumettre les Etats et
les bourgeoisies, leur imposer leur volonté.
Les crises asiatique et russe en sont l'illustration. Ce que Lénine appelait
la politique d'asphyxie financière a été utilisé
par les financiers occidentaux pour s'ouvrir des marchés et dicter leur
condition.
En Russie, l'Etat effondré a été démantelé,
rançonné par les banques occidentales avec l'aide du FMI, du trésor
US et de l'oligarchie nationale. Celle-ci aurait détourné, depuis
93, 130 milliards de dollars alors que la dette extérieure de la Russie
passait de 60 à 155 milliards de dollars entre 1990 et 1999. Le PIB ne
valait plus en 99 que 56 % de ce qu'il était en 89.
Pour se soumettre la Russie, les banques occidentales l'ont ruinée et,
aujourd'hui, se réjouissent de son redémarrage économique
!
L'important pour elles est que l'économie tourne en faveur de leur profit.
"La criminalité financière " n'est pas l'exception,
elle est la règle d'un système criminel dont la logique est destructrice.
La pression des travailleurs et des peuples reculant la logique capitaliste,
après vingt ans d'offensive, révèle sa véritable
nature.
L'économie de marché ruine la société.
L'Argentine,
le maillon faible ou l'exacerbation du parasitisme des classes dominantes
La crise argentine intervient comme le révélateur des contradictions
qui ravagent la planète et des solutions qui émergent du chaos
de la mondialisation. Elle est le point où se concentrent ces contradictions.
Maillon faible de la chaîne des relations entre les Etats, elle est la
première à céder sous les tensions aiguës entre le
passé et l'avenir. L'Argentine s'effondre, brisée par la contradiction
entre la bourgeoisie nationale spéculant et jouant les biens de la nation
sur les marchés financiers et boursiers mondiaux et les besoins de la
population, contradiction tendue à l'extrême sous la pression de
l'avidité des banquiers occidentaux et de leur usurier, le FMI.
Il est bien difficile de comprendre comment un pays comme l'Argentine a été
incapable de sortir de la récession chronique jusqu'à la faillite
si on ne se dégage pas des contes de fée d'une économie
neutre pour comprendre les rapports de classes. La faillite de l'Argentine est
celle d'une bourgeoisie ayant hérité au lendemain de la crise
des années trente et de la Deuxième guerre mondiale d'une position
financière sans rapport avec sa force économique réelle,
position qu'elle a tenté de défendre en vendant ses propres richesses
aux usuriers occidentaux qui l'ont ruinée.
Il y a là l'illustration de ce qu'il est convenu d'appeler l'aide du
FMI, une politique d'asphyxie financière, le FMI n'intervenant que pour
laisser un petit peu d'air au malheureux que l'on veut soumettre à la
volonté des financiers jusqu'au moment où est fait le choix de
le laisser se débattre seul pour ensuite ramasser ce qu'il reste.
Un autre pays d'une plus grande importance dans l'économie mondiale est
soumis à des contradictions de la même nature que celles qui ont
ruiné l'Argentine, le Japon. La bourgeoisie japonaise représente
le plus important prêteur de capitaux dans le monde alors que son économie
est en récession, que son système bancaire est miné par
les dettes et les créances douteuses. Les plans de relance se succèdent
sans autre effet que de maintenir la puissance financière d'une bourgeoisie
dont la puissance économique réelle s'affaiblit.
" Il faut des réformes " ne cesse de répéter
le FMI, des réformes, c'est-à-dire remettre en cause les acquis
sociaux, déclarer la guerre aux salariés, des réformes
pour permettre à la bourgeoisie de défendre ses positions financières
mondiales.
La bourgeoise japonaise et son Etat ont encore des réserves pour éviter
la faillite, mais ces réserves, ils les tirent d'une exploitation accrue.
Le caractère
spécifique de l'actuelle récession
Le retournement de conjoncture actuel a ceci de spécifique qu'il est
l'aboutissement des vingt années passées d'offensive libérale,
de globalisation, de déréglementation et de mondialisation, c'est-à-dire
qu'il atteint l'ensemble des secteurs de l'économie mondiale au décours
d'une évolution qui a mis les Etats en position de dépendance
et de faiblesse à l'égard de la finance.
" Vers une crise économique planétaire " écrivait
Daniel Cohen dans le Monde, nous y sommes. " La mondialisation répand
la déprime dans l'industrie " écrivait la Tribune, c'est
en route.
Il ne s'agit pas simplement du krach des nouvelles technologies, ou d'une récession
américaine qui aurait inévitablement ses répercussions
sur l'Europe, mais bien de l'essoufflement à l'échelle mondiale
de la machine à faire des profits.
" La fin de la bulle spéculative dans les nouvelles technologies
et la contraction des investissements ont fait boule de neige " écrivait
la Tribune. La masse sans cesse croissante des capitaux ne trouve où
s'investir à un taux jugé raisonnable. Les profits baissent, il
faut redonner confiance aux actionnaires, les plans sociaux s'ajoutent au plan
sociaux, une logique destructrice se met en route inexorablement.
Les mécanismes ne sont pas nouveaux, ils sont ceux de la crise capitaliste,
ce qui est nouveau c'est l'échelle à laquelle ils se déroulent,
l'échelle de la planète. La chaudière capitaliste marche
en circuit fermé, elle est en surchauffe, le mode de production rentre
dans une phase où il atteint ses limites historiques.
Ce fait s'exprime dans l'endettement généralisé, caractéristique
essentielle de l'économie mondiale aujourd'hui.
L'endettement
généralisé ou les profits à crédit
Ce qui est nouveau aujourd'hui, c'est la généralisation de la
dette, c'est-à-dire la soumission de l'ensemble de l'économie
à la spéculation.
Les entreprises comme les Etats sont endettés sur les places financières
où ils commercialisent leurs dettes comme autant de droit à exiger
des dividendes sur les profits à venir.
" L'économie politique du rentier ", selon l'expression de
Boukharine, triomphe. L'endettement généralisé signifie
que toute l'activité sociale est source de rente pour la classe parasitaire
qui possède actions et bons du trésor, qu'elle a pour fonction
d'alimenter ces rentes aux exigences infinies !
Il n'y a pas dans ce système de " prêteur en dernier ressort
" si ce n'est les classes populaires dont l'aristocratie financière
espère les possibilités d'exploitation tout autant infinies que
ses propres appétits.
Aujourd'hui, ce que Marx appelait le capital fictif, c'est-à-dire la
masse de titres de propriété sur une part du profit global produit,
étouffe l'ensemble de l'activité. Il constitue une bulle spéculative
globale à la surface de laquelle des bulles éclatent de temps
en temps comme la bulle des nouvelles technologies, protubérance financière
Au regard de ce capital fictif, c'est l'ensemble de l'économie mondiale
qui est dans la situation de l'Argentine, menacé de banqueroute.
La caractère parasitaire du capitalisme atteint un degré qui fait
du libéralisme impérialiste le stade ultime du capitalisme.
La croissance capitaliste est non seulement condamnable moralement au sens où
elle est d'abord et avant tout croissance du rapport d'exploitation, elle est
non seulement injuste en aggravant les inégalités, mais elle est
socialement et historiquement condamnée, parce qu'elle est destructrice.
Le mythe du
retour à Keynes
En cette période de crise, de bouleversement, il suffit que l'Etat américain
vole au secours des compagnies aériennes pour éponger les déficits
pour qu'aussitôt certains rêvent d'un retour au keynésianisme.
Keynes devient pour les réformistes comme Lénine pour des révolutionnaires,
un mythe. Le passé continue de dominer les esprits à travers les
mythes qui servent à transformer des événements en instruments
de domination des consciences : mythe du bolchevisme et de la révolution
russe pour les uns, mythe de Keynes pour d'autres
Au lieu de saisir le
contenu pratique de la politique des révolutionnaires ou de celle de
la bourgeoisie dans le passé pour en tirer leçon afin d'appréhender
la situation inédite à laquelle les différentes classes
sont confrontées, les esprits ressassent un passé idéalisé.
Keynes faisait la théorie de l'intervention de l'Etat pour relancer l'activité
économique dans la période dont nous parlions plus haut, les suites
de la crise de 29 puis de la Deuxième guerre mondiale. Cette intervention
était entièrement au service de la bourgeoisie.
Le contenu de ce que Alternatives économiques appelle " le nouvel
interventionnisme libéral " est adapté et s'adaptera à
la nouvelle période dans laquelle nous entrons, il aura pour fonction
de soutenir directement le capital financier, de combler les pertes pour subventionner
les rentiers dont lui-même dépend.
Ce serait se bercer d'illusion de croire que la mondialisation libérale
et impérialiste va entendre raison sous la pression de ses propres méfaits.
L'Etat n'interviendra pas pour réguler la marche de l'économie,
ou du moins pas fondamentalement, mais pour tenter d'éviter que le capital
fictif source de rente ne s'effondre. Il interviendra pour réguler la
concurrence au service des monopoles, des multinationales, pour organiser l'anarchie
capitaliste au profit des rentiers de la bourse et des marchés financiers.
Il ne peut y avoir " une mondialisation régulée, capable
de profiter aussi aux pays pauvres " contrairement aux prétentions
du sommet de Doha.
Ce sont des boniments réformistes que de laisser croire qu'il pourrait
en être autrement. Le parasitisme étatique est directement proportionnel
au parasitisme de la classe qu'il sert. L'Argentine comme la Russie en sont
une criante démonstration.
Il n'y a pas de solutions possibles qui viendraient d'en haut, des ententes
entre gouvernements. Il n'y a d'issue que révolutionnaire.
La
tâche du jour, regrouper les forces révolutionnaires autour d'un
plan de défense des droits des travailleurs, des exclus, des jeunes et
des femmes
Les bombes alliées à la politique d'asphyxie financière
et à l'intégration accrue au marché mondiale de la Chine
suffiront-elles à ouvrir de nouveaux marchés permettant un redécollage
de l'économie américaine et européenne, c'est peu probable.
Ce redécollage exige de retrouver un taux de profit suffisant pour que
les grands groupes multinationaux et les États puissent se lancer dans
de vastes investissements permettant l'utilisation en grand, dans la production,
des nouvelles technologies.
C'est cette perspective qu'imaginent les différents pronostics des organismes
officiels qui prévoient une reprise de la croissance. C'est aussi ce
que veulent croire les détenteurs de capitaux qui placent à nouveau
leur argent sur la nouvelle économie. Cette reprise a pour condition
le maintien du blocage des salaires, de la pression du chômage comme du
bas prix de l'énergie et des matières premières, c'est-à-dire
un pillage accru des pays pauvres.
Mais les gains de productivité sont tels que le marché qu'ils
exigent pour devenir rentables devrait être en constant élargissement
alors que la lutte pour le maintien du taux de profit ne cesse de le limiter.
Voilà pourquoi s'il y a reprise, ce sera la reprise de la croissance
aux USA et en Europe
des profits au détriment des salariés
et pour l'essentiel du reste du monde. Cette reprise préparera une nouvelle
crise plus sévère, chaque rémission couve un nouvel épisode
aigu.
La croissance des profits pour une infime minorité a pour corollaire
un appauvrissement de fractions croissantes de la population mondiale. Le parasitisme
de la grande bourgeoisie financière s'exprime dans ce pillage des richesses.
Le capitalisme est de moins en moins capable de créer des richesses nouvelles
malgré les prodigieux progrès technologiques et, en retour, il
tend à une concentration des richesses existantes en un nombre de mains
toujours plus restreint.
La contradiction fondamentale du capitalisme entre socialisation croissante
de la production et appropriation privée atteint son paroxysme. Elle
prend la forme du pillage, de l'expropriation brutale et cynique.
Le
libéralisme impérialiste est entré dans une crise chronique
faite de cycles courts, de mini-reprises, de récessions. Cette crise
lente et douloureuse qui n'a rien à voir avec la crise aiguë de
1929 génère violence et concurrence dans un monde de plus en plus
éclaté alors que les progrès concourent à l'unifier.
C'est de ce chaos capitaliste, de la contradiction entre socialisation et appropriation
privée, que commencent à émerger les forces de contestation,
la classe des salariés libérés du joug réformiste
et les peuples opprimés ayant conquis l'arène nationale de leur
lutte émancipatrice, partie intégrante de la lutte internationale
de l'ensemble des travailleurs.
Nous faisons nôtres les tâches que s'assignent les révolutionnaires
d'Argentine, unir et regrouper leurs forces autour d'un plan d'urgence face
à la catastrophe sociale qui frappe leur pays. L'urgence n'est pas en
contradiction avec la perspective générale. Contribuer à
ce processus, c'est uvrer, ici, au regroupement de nos forces autour d'un
plan de défense des droits des travailleurs, des exclus, des jeunes et
des femmes, mais aussi des droits des peuples.
Le libéralisme impérialiste ne se perpétue qu'en niant
les droits sociaux et politiques. Leur donner vie, c'est regrouper les forces
des révolutionnaires et au delà, de l'ensemble du mouvement ouvrier,
pour se préparer à reprendre l'offensive.
" La nouvelle période historique " est celle de la maturation
des forces pour une nouvelle révolution dont la crise argentine indique
le caractère impérieux.
Yvan Lemaitre
Notre campagne, ses objectifs et ses axes politiques
Si les grands axes
de notre campagne des Présidentielles et des Législatives ont
été définis par la conférence nationale de juin,
la façon dont ces axes vont être développés, illustrés
et argumentés, dépend de l'évolution de la situation politique
et sociale. Une campagne électorale est une bataille politique qui se
mène en fonction de l'évolution de la situation sociale et politique,
des positions des autres partis, des adversaires et du niveau de conscience
des travailleurs.
Donc, il nous faut intégrer à notre campagne les évolutions
qui ont été révélées et accélérées
par les attentats et la guerre, par les effets de la récession qui touche
l'économie mondiale, et, aujourd'hui, la faillite de l'Etat argentin,
le soulèvement populaire qu'elle provoque.
Ces évolutions convergent pour faire des échéances 2002
l'occasion de faire le bilan de vingt ans d'offensive libérale mise en
uvre par le patronat avec le soutien actif des différents gouvernements
et partis de la cohabitation. Tirer les bilans, solder les comptes sont nécessaires
pour dégager le terrain politique permettant l'affirmation électorale
d'un courant d'opposition défendant les droits des travailleurs, des
exclus, des jeunes et des femmes.
Nous voulons permettre que s'affirme dans ces élections un courant d'opposition
au patronat, à la droite et à l'extrême droite qui rêvent
de le servir comme à la gauche qui se soumet à ses intérêts.
Notre volonté de ne pas apparaître comme des gens qui " critiquent
tout et n'ont rien à proposer " nous conduit à souligner,
au lieu de l'atténuer, le côté dénonciation, contestation,
de notre campagne. Les revendications que nous avançons sont autant d'éléments
de critique des choix politiques et sociaux des différents gouvernements
de cohabitation qui se sont succédé.
Nos revendications sont le lien entre la critique et la proposition, c'est-à-dire
la mobilisation, l'organisation, la lutte des travailleurs.
Gagner en crédibilité, c'est être un parti d'opposition
radicale en assumant ce fait incontournable que la droite et la gauche sont
soumises à la défense des intérêts de la grande bourgeoisie
financière, même si les uns et les autres, en fonction de leur
clientèle électorale respective tiennent des discours qui se voudraient
différents. Et encore, même sur ce plan-là, leurs discours
tendent à se ressembler de plus en plus. C'est de cette convergence des
discours de la droite et de la gauche que rêve d'émerger le petit
Bonaparte ressuscité, Chevènement, éphémère
synthèse de tous les contraires
En fait, notre crédibilité résulte de la cohérence,
de la continuité, de la fidélité à notre camp social
et à nos idées, de notre capacité à dire la vérité.
C'est pourquoi pour gagner en crédibilité, pour conquérir
son espace politique, notre campagne doit rompre toute ambiguïté
en intégrant cette évolution des différents partis gouvernementaux
de cohabitation dont ont d'ailleurs conscience les salariés et les classes
populaires. Et en conséquence, affirmer clairement que la droite et la
gauche mènent, au gouvernement, la même politique.
Dire que cela reviendrait à reprendre à notre compte le "
tous pourris " n'a pas de sens. Nous ne situons pas le problème
sur le plan de la morale, mais des rapports politiques et sociaux. La discussion
pour savoir lequel est moralement le moins digne d'estime de Jospin ou de Chirac,
est une question que nous ne saurions trancher !
Notre campagne peut-elle se présenter comme la campagne anti Medef ?
Non, sinon à risquer de faire du Robert Hue, voire du Hollande.
Le Medef aujourd'hui se positionne en toute indépendance des hommes politiques
qui le servent au gouvernement, il renvoie dos à dos la droite et la
gauche qu'il juge trop soucieuses de leurs intérêts électoraux.
Il se lance dans sa propre campagne politique dans le but de mettre les uns
et les autres au pied du mur, de faire savoir à tout le monde les intérêts
qu'il entend faire prévaloir et auxquels devront se soumettre Président,
Premier ministre, gouvernement, quelle que soit leur couleur politique.
Aux intérêts sociaux uniques correspond la pensée politique
unique.
A la différence de Robert Hue ou de François Hollande, nous ne
sommes pas seulement les candidats anti-Medef. Nous sommes les candidats d'une
force nouvelle, représentants politiques des intérêts des
salariés et des classes populaires, une force démocratique et
révolutionnaire en rupture avec les partis de la gauche de cohabitation
soumise, comme la droite, aux intérêts du patronat et des classes
privilégiées.
Ce n'est que ce positionnement politique qui nous donne toute la liberté
nécessaire pour aborder l'ensemble des questions qui seront au cur
de la campagne et en particulier la question dite de la sécurité.
C'est cette rupture radicale, cette volonté d'être les porte-parole
d'une force nouvelle, qui donne son sens à la rupture de génération
que nous avons voulue. C'est parce qu'une nouvelle génération
retrouve les chemins de la contestation, affirme son besoin de justice, de solidarité,
de démocratie et de paix, qu'il fallait un jeune pour défendre
et porter ces aspirations.
Olivier n'est pas un politicien professionnel, mais un jeune travailleur impliqué
dans les résistances quotidiennes des salariés, dans leurs luttes,
convaincu que c'est par l'action collective politique mais aussi syndicale et
associative que la population pourra faire prévaloir ses intérêts.
Il inscrit son action dans la solidarité internationale en partageant
la rébellion de ceux qui résistent aux injustices créées
par la mondialisation impérialiste. Il est le candidat du refus et de
la lutte, de la solidarité et de la justice.
Il est aussi le candidat contre la guerre, défendant les droits des peuples
contre la domination des grandes puissances dont la France. Il est le candidat
du refus de l'union sacrée qui prend prétexte de la lutte contre
le terrorisme pour renforcer la domination des puissances qui dominent le monde,
les travailleurs et les peuples.
Il est candidat pour une autre politique, 100% à gauche, qui serve les
intérêts du monde du travail au lieu d'être soumise à
la volonté du patronat, des actionnaires et des riches.
Si nous ne voulons pas que le " 100% à gauche " sème
la confusion et nous fasse perdre toute crédibilité en nous incluant
dans la gauche gouvernementale, il faut nous affirmer comme une candidature
de rupture.
Rupture avec les grands partis parlementaires, mais aussi avec les institutions
dont la fonction est de garantir l'ordre et la propriété bourgeois.
Contrairement à ce que nous écrivons dans le " 4 pages ",
la question n'est pas d'en finir avec la 5ème République, qui
aurait " fait son temps ". Son temps est dépassé depuis
longtemps ! La question est de comment en finir avec ces institutions et cet
Etat, c'est-à-dire de formuler des revendications démocratiques
qui vont dans le sens de permettre aux travailleurs et aux classes populaires
d'exercer leur pouvoir.
Nous dénonçons la monarchie présidentielle et la République
des affaires, nous nous prononçons pour une république démocratique
et sociale, pour une assemblée élue au suffrage universel à
la proportionnelle avec le droit de vote pour tous ceux qui vivent et travaillent
dans ce pays, pour que la population puisse contrôler et décider
dans les quartiers comme sur les lieux de travail.
Nous dénonçons aussi la collusion Chirac-Jospin, rivaux pour les
mêmes pouvoirs présidentiels, défenseurs l'un et l'autre
du quinquennat, afin de garantir plus de stabilité aux institutions bourgeoises
en liquidant la cohabitation.
Là encore, nos revendications sont des actes d'accusation et non des
propositions démocratiques formelles dans le cadre de la société
bourgeoise. Nous mettons en exergue le fait que rien ne pourra se faire sans
l'irruption des populations elles-mêmes.
De la même façon, nous ne pouvons nous contenter d'une position
abstraite et générale sur l'Europe sans affirmer clairement notre
camp social. Face à l'entente des groupes financiers et industriels à
l'échelle européenne, nous entendons uvrer à l'entente
des travailleurs par-delà les frontières.
Une plus grande ouverture des frontières est indiscutablement une évolution
que personne ne peut regretter contrairement à ce que disent tous les
réactionnaires souverainistes anti-maastrichien, mais cette évolution
au lieu d'être un réel progrès se fait contre les travailleurs
et les peuples.
Nous sommes favorables à la monnaie unique parce qu'elle accélère
la crise des vieux Etats et contribue à créer une conscience européenne
comme le terrain de la construction des Etats-Unis socialistes d'Europe.
Ainsi, aujourd'hui, la défense des droits des travailleurs, des chômeurs,
des jeunes et des femmes, se pose à l'échelle de tout le continent
européen, sinon tous les acquis seront remis en cause pour une égalisation
vers le bas.
C'est une égalisation vers le haut qu'il faut imposer. Face à
l'Europe des pays riches et des trusts, il s'agit de donner les moyens aux peuples
de décider. Non à l'Europe de la Banque centrale et de la Bourse,
oui aux Etats-Unis démocratiques et socialistes d'Europe, oui à
une Europe de la paix uvrant à la coopération des peuples.
Nous affirmer comme une force de regroupement, c'est combattre toute forme d'illusion
électoraliste et dire qui sont nos alliés prioritaires. Notre
programme n'est pas un programme électoral comme celui de tous les faiseurs
de boniment, votez pour moi et
je ferai l'inverse de ce que j'ai dit !
Non, notre programme, c'est celui des droits fondamentaux des travailleurs,
des exclus, des jeunes et des femmes, des droits de tous ceux qui ne peuvent
vivre que de leur travail, c'est-à-dire la majorité de la population.
Il n'est pas tout fait, il se veut l'expression des intérêts de
la collectivité, il n'a de sens que pour aider la population à
formuler elle-même ses propres besoins, ses propres aspirations.
C'est cela pour nous faire de la politique, tous ensemble faire entendre nos
exigences, peser sur l'évolution de la société, faire pression
sur l'Etat et les gouvernements, agir dans nos organisations pour que le point
de vue des anonymes soit pris en compte.
Notre campagne vise à aider tous ceux qui refusent, tous ceux qui résistent
et luttent, à se faire entendre.
Nous voulons aider à ce que se regroupent les forces qui rompent avec
le social-libéralisme. L'heure est à l'unité de tous ceux
qui veulent faire vivre une réelle démocratie, de tous ceux que
le ralliement du Parti socialiste ou du Parti communiste au dogme de l'économie
de marché n'a pas fait abdiquer des idéaux du socialisme et du
communisme, ou de ceux que le même ralliement des Verts n'a pas fait abdiquer
du combat écologique. Oui, c'est tous ensemble que nous construirons
le nouveau parti qui manque aujourd'hui, en rupture avec la gauche gouvernementale
et libérale.
Notre campagne électorale s'inscrit dans l'activité quotidienne,
sur les lieux de travail comme dans les quartiers, de tous les acteurs du mouvement
social. C'est avec eux comme avec toute la population que nous entendons discuter,
débattre, agir pour aider à l'émergence d'une nouvelle
force politique qui soit vraiment la leur.
Et dans cette perspective, il serait mal venu de craindre de donner des voix
à Arlette en nous affirmant clairement pour l'unité des révolutionnaires
comme d'être gêné de la vérité. Nous ne craignons
pas de dire que nous sommes présents parce que le sectarisme de Lutte
ouvrière a écarté toute possibilité d'entente, mais
nous demeurons des militants de cette unité fraternelle entre travailleurs,
entre révolutionnaires.
Olivier Besancenot comme nos candidats aux élections législatives
sont les candidats de l'unité du monde du travail comme du regroupement
des révolutionnaires.
Les objectifs et les axes politiques de notre campagne se combinent. Nous voulons
créer la surprise en imposant un " anonyme ", ce qui veut dire,
sur le plan électoral, franchir le seuil de crédibilité
minimum autour des 2 %.
Nous avons réussi la première étape, bien qu'encore incomplètement,
celle des signatures. Nous entamons la deuxième, convaincre de l'utilité
de notre présence dans cette campagne, démontrer que nous y apportons
la flamme de la jeunesse, l'esprit de classe et de contestation des travailleurs,
face au sectarisme et à la division, la démocratie et l'unité
indispensables pour préparer l'avenir, mettre en uvre un projet
politique révolutionnaire.
Ensuite viendra la dernière étape, convaincre de l'utilité
de voter pour nous afin de bousculer les routines, pour que l'extrême-gauche
ait plusieurs visages complémentaires, reflets de sa diversité
et de sa richesse, loin des monolithismes, du dogmatisme passéiste, du
sectarisme.
Oui, faire campagne, soutenir Olivier Besancenot, c'est une façon de
contribuer à la réalisation de la véritable échéance
de 2002, jeter les bases d'un parti des travailleurs démocratique et
révolutionnaire.
Voter pour Olivier Besancenot, ce sera affirmer qu'au sein du monde du travail
de plus en plus nombreux sont ceux qui n'acceptent plus une politique au service
de la Bourse et des actionnaires, une politique de chômage, de bas salaires
et de privatisation, qui ne veulent pas subir mais entendent se mobiliser pour
une société démocratique où l'Etat et l'économie
soient mis au service de l'ensemble de la population.
Ce sera une sanction et un désaveu des partis de la gauche et de la droite
qui depuis vingt ans ont servi les intérêts du patronat et des
actionnaires.
Ce sera un avertissement pour ceux qui, à l'issue des élections,
géreront les affaires de la bourgeoisie, un avertissement d'autant plus
entendu que seront nombreuses les voix qui se porteront sur l'extrême-gauche
et Olivier Besancenot.
Ce sera un encouragement pour tous ceux qui résistent et se battent pour
les droits du monde du travail.
Le 5/ 01 /02
Galia, Yvan
Retour sur la mobilisation des gendarmes
Début décembre,
encouragés par le mouvement des policiers devant lequel le ministre de
l'Intérieur, Vaillant, avait dû lâcher, les gendarmes -qui
n'ont ni droit de grève, ni droit syndical, ni celui de manifester puisqu'ils
font partie de l'armée-, ont organisé d'imposants cortèges
dans de nombreuses villes, sirènes hurlantes, des sit-in en tenue dans
des enceintes militaires, une grève du zèle, une manifestation
à Paris qui a regroupé 12 000 d'entre eux
Une mobilisation
sans précédent pour revendiquer des augmentations, des embauches,
l'amélioration de leurs conditions de travail.
Au bout de quatre jours d'un mouvement qui était parti pour s'étendre,
le gouvernement a cédé aux gendarmes sur 1829 euro d'augmentation
sur un an, 6000 embauches d'ici 2005, 50 000 gilets pare-balles et un ordinateur
pour deux.
Ce mouvement sans précédent parmi cette catégorie de militaires
pose le problème de son appréciation politique : un mouvement
par nature réactionnaire puisque venant d'un corps répressif de
l'Etat, ou le reflet d'une crise au sein même de l'appareil d'Etat dont
il nous faut débattre de sa signification.
Pour les responsables politiques, de droite comme de gauche, tenants de l'ordre
social, à l'exception de ceux du PC, la condamnation a été
sans appel.
Dès le 4 décembre, Richard, le ministre des Armées, dénonçait
à l'Assemblée nationale : " des initiatives locales incompatibles
avec le sens du service dont les gendarmes sont fiers ". La contestation
s'élargissant, le 7, Peillon, porte-parole du Parti socialiste, déclarait
que des manifestations pour " siffler leur hiérarchie " n'est
pas " un bon exemple ". Chirac, lors des vux aux armées,
le 4 janvier, a tenu à rappeler " les principes fondamentaux qui
régissent la fonction militaire,
l'observation des lois, la discipline
et une disponibilité sans limites " en déclarant qu'il fallait
" tirer les leçons de cet épisode à tous égards
douloureux ". Le ton malgré tout prudent, par souci de ne pas jeter
de l'huile sur le feu, de ceux qui assument directement le pouvoir politique
n'était pas de mise chez ceux qui n'y sont pas actuellement ; pour Pasqua,
" c'est la chienlit ", pour Seguin, c'est " une crise sans précédent
", pour Chevènement, " il y a une limite à ne pas dépasser
".
Par contre, la mobilisation des gendarmes a bénéficié d'une
large sympathie parmi la population. Elle a été perçue
par nombre de salariés comme un encouragement à la lutte puisque
le gouvernement, au bout de quatre jours, a cédé, sans pour autant
qu'il y ait des illusions sur le fait que celui-ci cédait bien plus vite
aux gendarmes qu'aux salariés. Ceux qui appartiennent à la "
Grande Muette " ont vraisemblablement été encouragés
par la popularité de leur mouvement, même si malheureusement l'inexistence
de liens avec cette catégorie sociale ne permet pas de l'affirmer. Dire
cela, ce n'est pas oublier que, dans les casernes où ils sont sous son
emprise, ils obéissent à leur hiérarchie ; mais quand ils
se mobilisent pour l'obtention des droits démocratiques qui leur sont
déniés, ils ne peuvent qu'être plus perméables à
l'opinion démocratique de la société.
Pour les marxistes,
la question de l'attitude vis-à-vis de l'armée, une question vitale
:
Le rôle de l'armée, comme de la police et de la justice, est d'être
la gardienne des intérêts de la bourgeoisie, classe minoritaire
qui ne peut imposer sa domination sociale qu'en ayant à son service des
hommes prêts à défendre la propriété privée
capitaliste, si nécessaire par le recours à la force. " L'armée
permanente et la police sont les principaux instruments de la force du pouvoir
d'Etat " comme disait Lénine. Cela est vrai pour tous les régimes
y compris les régimes parlementaires où le suffrage universel
est là pour tenter de créer l'illusion que remplacer un parti
par un autre peut changer la vie.
C'est pour cette raison que les révolutionnaires se doivent d'avoir une
politique vis-à-vis des corps répressifs de la bourgeoisie, sinon
comment la classe ouvrière pourrait-elle " briser la machine étatique
et militaire ", selon les termes de Marx ? Pour exercer elle-même
directement le pouvoir et construire un nouvel Etat authentiquement démocratique
parce qu'il sera l'expression des besoins des opprimés, l'immense majorité
de la population aura la tâche de désorganiser l'armée.
Celle-ci est loin d'être homogène et la solidarité entre
la base et la hiérarchie peut éclater dans des situations d'intenses
luttes sociales.
Dans le passé, le mouvement ouvrier a eu, à maintes occasions,
à se poser pratiquement ce problème. Cela a été
le cas, par exemple, au Chili où le coup d'Etat du général
Pinochet, en septembre 1973, avait été précédé,
en août, d'une révolte durement réprimée des marins
de Valparaiso contre la préparation d'un putsch par leurs officiers.
Le gouvernement d'Allende s'était désolidarisé des marins
et en conséquence, lors du renversement de son gouvernement, les soldats
sont restés solidaires des officiers. Le mouvement ouvrier a payé
un prix très cher pour avoir été désarmé
politiquement par les partis de gauche, avant d'être écrasé
physiquement par l'armée.
Les illusions dans la politique des partis de gauche respectueux de l'Etat peuvent
engendrer des illusions sur le rôle de l'armée. A l'inverse, un
faux radicalisme condamnant en bloc tout mouvement dans l'armée, par
préjugé gauchiste, peut se révéler inadéquat
à poser concrètement le problème du rapport de forces entre
les salariés et l'armée de Etat bourgeois. Le fait que la bourgeoisie,
classe de plus en plus minoritaire à l'époque de la mondialisation,
recrute pour son service des hommes -et maintenant des femmes- qui viennent
des milieux populaires, n'est sûrement pas une garantie, mais la classe
ouvrière peut se trouver des alliés en son sein en ayant une politique
vis-à-vis des différents mouvements qui s'y manifestent. Se poser
la question d'une politique vis-à-vis de l'armée est pour les
révolutionnaires indispensable, sinon il n'y a que la confiance dans
la " démocratie " et les institutions pour espérer une
transformation sociale.
Pour significatif qu'il soit, le mouvement des gendarmes reste dans le cadre
de la société bourgeoise mais il est un révélateur
d'une crise au sein de l'appareil d'Etat. Son caractère inédit
pose le problème de l'analyser du point de vue du rapport des forces
en général pour se positionner.
Fallait-il dénoncer
le mouvement des gendarmes comme réactionnaire ?
Toutes les revendications mises en avant étaient l'amélioration
des conditions de travail, -dans le cadre, bien sûr de ce qu'est leur
travail- comme le notait l'éditorial de l'Humanité du 10/12 :
" salaires, effectifs, conditions de travail
, l'inventaire du catalogue
revendicatif des hommes en bleu ressemble à s'y méprendre à
celui des enseignants, ou des hospitaliers ". Et si le mouvement des "
hommes en bleu " s'apparentait à un mouvement de salariés,
c'est que les conditions de travail de la base ne sont pas celles de privilégiés.
La bourgeoisie n'est pas très généreuse envers ses serviteurs,
ce qui est la preuve que la gendarmerie ne vit pas coupée de toute l'évolution
de la société puisqu'elle aussi a des salaires qui ne permettent
pas de vivre. Ainsi, un gendarme débutant perçoit 1165,78 euro
(le SMIC ouvrier est à 1126,40 euro), au bout de dix ans d'ancienneté,
1606,34 euro. A quoi s'ajoute le logement gratuit en caserne mais qui a comme
contrepartie des mutations régulières.
Revendiquer plus de moyens pour faire leur travail, est-ce revendiquer plus
de moyens pour réprimer ? En partie, mais pas seulement. Aujourd'hui,
95 % des missions des gendarmes sont des missions civiles et 1/3 de leur activité
est consacré aux affaires judiciaires, comme celles du sang contaminé
ou des faux électeurs de la Mairie de Paris.
"Naturellement
de droite ", étaient-ils manipulés par la droite et l'extrême-droite,
et par leur hiérarchie ?
Le malaise qui a éclaté au grand jour avait couvé, dans
le cadre de la cohabitation, sous des ministres alternativement de droite et
de gauche qui ont tous eu la même politique. L'interdiction qui leur est
faite de se syndiquer, de manifester, de faire grève, n'a été
remise en cause par aucun gouvernement. Et lors du mouvement, Jospin, en bon
représentant de la bourgeoisie, prenant position pour le maintien du
statut militaire, affirmait qu'il n'était pas question de donner aux
gendarmes des droits démocratiques.
Les droits démocratiques, les gendarmes les ont exercé directement
en bravant les interdits et en prenant le risque de sanctions. Cette attitude
a plus de signification que les étiquettes de droite et de gauche galvaudées
par des politiciens représentants du libéralisme économique.
Quant à l'influence de l'extrême-droite parmi eux, il est difficile
d'en juger. Nous discutons de leur mouvement tel qu'il est apparu publiquement,
de sa signification qui était progressiste.
La contestation des gendarmes était avant tout celle de la base. Ils
n'ont pas obéi aux ordres de leur hiérarchie en décidant
de sortir de la légalité pour faire éclater publiquement
leur mécontentement. Comme l'a noté Peillon, nombreux sont les
officiers qui ont été sifflés et désavoués
quand ils ont essayé de s'opposer aux manifestations. Un partie des officiers
semble avoir été partie prenante du mouvement mais il est difficile
de dire s'ils ont choisi d'être là pour limiter les dégâts
ou s'ils se sont ralliés devant un rapport de force. Si une fraction
de la hiérarchie avait le projet d'instrumentaliser le mouvement pour
obtenir une rallonge budgétaire devant la baisse du budget militaire
due à la professionnalisation de l'armée, elle n'aurait certainement
pas eu recours à ces méthodes qui sont plus celles de salariés
que de hauts responsables de l'armée et donc de l'Etat.
Si les conséquences de ce mouvement étaient essentiellement positive,
il peut y avoir des évolutions dans un sens réactionnaire si le
mouvement ouvrier n'est pas en capacité d'apparaître comme une
direction politique et si, désarmé par les confédérations
syndicales, il ne peut qu'exprimer sa sympathie sans avoir la politique pour
se placer résolument en tête de toutes les mobilisations. Faute
de perspectives plus larges, le mécontentement des gendarmes, pourrait
être dévoyé vers de prétendus " sauveurs "
d'extrême-droite dont la démagogie pourrait alors trouver un terrain
favorable. Mais aujourd'hui, cela n'est pas le cas.
C'est pour cela qu'il est d'autant plus nécessaire de nous positionner
favorablement à ces manifestations de mécontentement dirigées
contre la politique d'un gouvernement qui assume la direction des affaires de
la bourgeoisie et qui est celui-là même qui attaque le niveau de
vie du monde du travail.
Sont-ils partisans
de la " tolérance zéro " ?
Parmi les arguments pour refuser toute solidarité à ce mouvement,
est avancé le point de vue que les gendarmes sont partie prenante du
" tout-répressif " et que s'ils revendiquent des moyens, c'est
pour faire plus de répression. L'embauche de 6000 nouveaux gendarmes
d'ici 2005 -alors que la France est le pays d'Europe le plus policier- s'inscrirait
dans ce sens.
Il ne s'agit pas de revenir sur le rôle de l'armée mais de discuter
de ce qui s'est exprimée dans la contestation des gendarmes. Qu'ils soient
partisans de la " tolérance zéro ", peut-être,
mais cela ne s'est en aucun moment dit ; de même, ils n'ont pris position,
ni pour, ni contre la loi sur la présomption d'innocence, à la
différence des policiers : "
la plupart des syndicats de
police dénoncent cette " loi de voyous ", responsable selon
eux de la montée de la délinquance ", (Rouge du 13/12, article
" Défendre les libertés " sur le congrès du syndicat
de la magistrature).
Si le gouvernement qui défend publiquement une politique sécuritaire,
a cédé rapidement, c'est par crainte d'une possible contagion
à d'autres catégories de l'armée. Devant la profondeur
de la mobilisation, il a préféré satisfaire une partie
de leurs revendications pour ne pas approfondir la crise au sein de l'appareil
d'Etat. Et rien ne dit qu'il y sera parvenu
.
On peut penser que parmi les gendarmes, certains ont pris le goût de l'exercice
des libertés démocratiques qui leur sont toujours refusées.
Un mouvement de cette ampleur ne peut que laisser des traces dans les consciences,
des liens se sont tissés qui ne sont plus ceux de la subordination, mais
ceux de la solidarité. Et pour l'avenir, cela pourrait compter !
Valérie Héas
A
propos de la guerre impérialiste en Afghanistan :
notes de lecture sur les articles de Lutte Ouvrière dans les Lutte
de Classe d'octobre, novembre et décembre 2001
L'axe essentiel
de ces articles est de répondre à tous ceux qui parlent d'une
" nouvelle guerre ", la " première guerre du XXIè
siècle ", ou d'une " croisade contre le terrorisme ",
en démontrant qu'il s'agit d'une guerre impérialiste, produit
de la politique menée depuis un siècle par les grandes puissances
pour imposer leur domination sur les peuples.
De ce point de vue, ces articles sont intéressants et utiles, bien que
ce souci d'affirmer une continuité d'analyse s'accompagne d'une volonté
répétitive de démontrer qu'il n'y aurait rien de nouveau
sous le soleil.
La dénonciation
de la domination impérialiste qui mène inévitablement à
la guerre
Avec les attentats du 11 septembre, indique LO, " l'impérialisme
américain est en quelque sorte rattrapé par sa propre politique
". " Le cliquetis d'armes et les bruits de bottes, pas plus que les
pressions diplomatiques, ne répondent aux problèmes politiques
posés par les attentats de New York ". En effet, ces attentats sont
le produit de la politique impérialiste qui soutient, voire met en place
des régimes qui acceptent de faire la police contre leurs peuples, afin
que les trusts des grandes puissances puissent piller les richesses et s'approprier
au plus bas prix le travail. Avec cette contradiction : " dans les pays
sous-développés, les régimes les plus serviles à
l'égard de groupes impérialistes, et, par là, les alliés
les plus fidèles des Etats-Unis sont précisément ceux qui,
faute de soutien dans leur propre population, ont absolument besoin de leur
appui ", par contre " les dirigeants des grandes puissances ont maintes
fois fait l'expérience de régimes qui, en acquérant une
certaine base populaire, prennent leurs distances ". C'est le cas du régime
taliban, soutien d'Oussama Ben Laden, après celui de Saddam Hussein.
C'est ainsi, ajoute LO, que le " combat contre l'intégrisme "
de Bush, Blair, Chirac et Jospin n'est que le combat contre un des avatars de
leur politique. " On ne manie pas les forces réactionnaires sans
qu'il y ait de choc en retour ". " Au temps de l'Union soviétique
", les puissances occidentales se sont appuyées sur des forces politiques
réactionnaires au nom de " la préoccupation de contenir l'influence
soviétique ". Elles ont, dans ce contexte, financé des organisations
intégristes pour s'opposer aux régimes issus des révolutions
coloniales et ont ainsi favorisé " un cours réactionnaire
des choses depuis plus d'un quart de siècle qui a joué un tour
à la politique de l'impérialisme américain. Ce cours réactionnaire
s'est concrétisé par un recul général des forces
qui se revendiquaient -bien plus à tort qu'à raison, mais c'est
une autre question- du socialisme ou du communisme, et même des forces
qui se voulaient " nationalistes ", " progressistes " ou
" tiers-mondiste ". Toutes ces forces s'alimentaient en dernier ressort
des mécontentements, des colères, des frustrations des peuples
opprimés par l'impérialisme. ". De ce fait " faute que
d'autres perspectives soient offertes aux masses déshéritées,
l'intégrisme religieux, jusqu'à ses variantes terroristes est
devenu le seul vecteur par lequel s'exprime leur désespoir et leur haine
".
Un bref historique de la politique coloniale de l'empire britannique en Inde,
montre comment les divisions et les haines semées et attisées
par les puissances impérialistes depuis 50 ans dans cette région
rendent, dans le cadre actuel " tout règlement politique impossible
". Et ce qui se vérifie aujourd'hui, " après avoir mis
le feu à la poudrière afghane, l'impérialisme menace de
l'étendre à toute la région ".
Des contradictions
soulevées qui restent sans réponse politique
" Les attentats de New York et Washington, les manuvres diplomatiques
et les opérations militaires qui s'en sont suivies ne constituent pas
un tournant dans les relations internationales, mais un révélateur
", affirme LO. En effet, argumente-t-elle, " l'existence de groupes
ou de mouvements terroristes ne constitue certainement pas une nouveauté
", car les multiples formes de l'oppression impérialiste ont "
toujours suscité des réactions et provoqué des résistances
", dont le terrorisme. Enfin les camarades rappellent que qualifier les
50 dernières années de " période de paix ", "
sonne comme une sinistre plaisanterie car les guerres locales et les conflits
armés qui n'ont pas cessé de se succéder ont fait plus
de victimes que la première guerre mondiale. L'impérialisme porte
la guerre en lui-même ". Certes, mais les camarades conviendront
que la guerre de 1870 n'est pas celle de 14, qui elle-même n'est pas celle
de 40
même si le cadre général reste celui du capitalisme,
il y a à chaque étape de l'histoire des éléments
de nouveauté nécessaires à décrire du point de vue
des luttes d'émancipation.
Sinon, comment expliquer que " durant les années de guerre froide,
l'opposition des blocs occultait certains des conflits, d'autres paraissaient
découler de la coupure du monde en deux. Ce n'est plus le cas depuis
l'écroulement de l'Union Soviétique " ? Comment se contenter
de dire que " si les attentats de New York et Washington ont eu de quoi
marquer l'opinion publique américaine, en raison de leur caractère
spectaculaire mais aussi parce que c'est la première fois que l'impérialisme
américain est affecté sur son propre sol, ils ne représentent
en rien une phase nouvelle des relations internationales " ? Quelles conséquences
tirer de ce constat " aucune puissance impérialiste, fut-elle les
Etats-Unis, unique super-puissance du monde depuis la dislocation de l'Union
Soviétique, ne peut assurer l'ordre mondial avec ses propres forces "
? On ne peut d'ailleurs que regretter que nos camarades de la minorité,
dont l'existence en tant que tendance dans Lutte Ouvrière vient de leur
volonté de discuter des conséquences à tirer de l'effondrement
de l'URSS, n'apportent aujourd'hui aucune réponse à cette question
dans ses répercussions sur la situation internationale.
Enfin quelle forme vivante donner à cette conclusion que " la seule
alternative est la renaissance du mouvement ouvrier révolutionnaire ouvrant
une autre perspective devant l'humanité que l'expression sans cesse renouvelée
et élargie de la barbarie. Les perspectives fondamentales dépendent
de la capacité de la classe ouvrière à jouer de nouveau
sur la scène internationale le rôle qu'elle a joué au moment
de la montée internationale du socialisme dans la deuxième moitié
du 19ème siècle ou après la révolution russe de
1917" ? Quelles sont les conditions nouvelles qui vont permettre ce renouveau
de la conscience de classe ? Comment les révolutionnaires peuvent-ils
les exprimer afin de jeter les bases du parti mondial de la révolution
du XXIème siècle ?
Les analyses des camarades de LO sont marquées par la volonté
de réaffirmer les idées marxistes mais en fait, ce sont surtout
les conclusions des analyses de Lénine et de Trotsky qui sont reprises
sans intégrer ce qu'il y a de nouveau dans les conditions de la lutte
des classes. La renaissance du mouvement ouvrier ne peut résulter du
seul volontarisme militant. Il est nécessaire d'analyser ce qu'il y a
de nouveau dans la situation internationale sociale et politique. Cela suppose
d'intégrer dans son raisonnement et la restauration de la propriété
privée dans l'ex-URSS et les transformations opérées par
ce qu'il est convenu d'appeler la mondialisation.
Or, pour la direction de LO le temps semble avoir suspendu son vol
La mondialisation,
une nouvelle étape de l'impérialisme
Ainsi le terme " mondialisation " n'est jamais cité. Est-ce
parce qu'il est utilisé par des gens qui combattent le marxisme et ses
conclusions révolutionnaires ? Les marxistes n'ont jamais inventé
aucune terminologie propre : la plus-value ou l'impérialisme sont des
notions que Marx et Lénine ont reprises chez des économistes bourgeois
qui en faisaient une justification du capitalisme et de son caractère
indépassable.
LO date d'il y a 25 ans un " cours réactionnaire des choses "
marqué par le recul des idées " progressistes ". Il
y a 25 ans, c'était la fin des révolutions coloniales, le soulèvement
révolutionnaire des peuples opprimés aboutissait à la mise
en place de nouveaux Etats dans le cadre d'un monde divisé en deux :
le bloc soviétique et le bloc capitaliste. C'était également
la fin de la période de forte croissance de l'économie capitaliste
avec le problème pour les trusts d'éviter la baisse du taux de
profit, en trouvant de nouveaux marchés, mais surtout en faisant baisser
le " coût du travail ". S'ouvre alors une offensive contre le
monde du travail, licenciements, délocalisations, remises en cause des
droits sociaux au nom de la concurrence de la main d'uvre surexploitée
dans les " pays en voie de développement ". Cette pression
du capitalisme a pesé sur les travailleurs, mais aussi sur les Etats,
entre autres ceux du bloc soviétique, aboutissant à l'éclatement
de l'URSS et à la disparition de son bloc. Cette nouvelle donne a ouvert
de nouveaux champs d'investissements aux capitaux, soumis à l'exploitation
capitaliste des fractions nouvelles de la population mondiale, mais cela a également
provoqué de nouveaux problèmes pour l'impérialisme.
La direction de LO se refuse à intégrer une donnée contradictoire
: que la montée d'idées réactionnaires, le recul du mouvement
ouvrier et démocratique, le triomphe du libéralisme impérialiste,
la fin de l'URSS et du stalinisme puissent à l'opposé entraîner
sur la base des transformations économiques de la mondialisation une
renaissance du mouvement ouvrier.
La pensée de la direction de LO est figée refusant d'accepter
la fin de l'URSS et du stalinisme qui constituaient les éléments
déterminants de son cadre de raisonnement.
Là est son drame, tout est continuation du passé, sa reproduction.
Depuis plusieurs mois, l'économie est entrée dans une phase de
récession aux rythmes différents mais qui se traduit partout par
de nouvelles attaques contre les travailleurs. La violence et la barbarie des
rapports de domination éclatent dans la guerre menée par les superpuissances
contre un des peuples les plus pauvres de la planète. La concurrence
entre les puissances impérialistes crée le besoin de nouveaux
cadres en élaboration comme l'Europe, source d'instabilité politique
mais aussi dépassement des cadres nationaux. Le rôle des révolutionnaires
est de montrer en quoi le développement de ces contradictions peut renforcer
la classe ouvrière alors que de nouvelles générations de
jeunes et de travailleurs s'ouvrent à la politique complètement
émancipés du stalinisme.
Oui, il y a des transformations nouvelles qui imposent aux révolutionnaires
des réponses nouvelles.
Isabelle Cazeaux