Débat militant
Lettre publiée par des militants de la LCR
n°29
21 mai 2003

Sommaire :

1995-2003 : l'émergence d'une nouvelle conscience politique

Les sociaux-libéraux ne battent pas en retraite : le congrès socialiste plébiscite le " réformisme de gauche "

A propos du premier numéro des Cahiers de critique communiste


1995-2003 : l'émergence d'une nouvelle conscience politique

Le 13 mai dernier, les grèves et manifestations contre la réforme des retraites ont dépassé en ampleur le point le plus haut atteint par le mouvement de novembre-décembre 1995. La contestation de la politique du gouvernement s'est trouvée d'un coup projetée sur le devant de la scène.
C'est un retournement complet de la situation.
Il y a encore un mois, Raffarin pouvait espérer faire passer ses projets sans affrontement avec le monde du travail, grâce à la complaisance des directions syndicales et l'absence d'opposition parlementaire. Depuis la victoire du " non " au référendum à l'EDF, la mobilisation croissante des salariés a fait la vérité sur les mensonges d'une propagande gouvernementale d'autant plus efficace qu'elle s'appuyait sur la politique du gouvernement Jospin et ne se heurtait à aucune opposition. Elle a obligé tous les syndicats et les partis politiques de gauche à prendre position par rapport au mouvement lui-même.
Le pacte républicain, cet état de grâce dont Chirac avait bénéficié grâce à l'appel au vote des partis de gauche en sa faveur le 5 mai, est définitivement rompu. En s'affranchissant de ce marché de dupes issu de la cohabitation, les travailleurs se libèrent également du consensus que les directions syndicales avaient accepté de la part du gouvernement. Ils sont en train de découvrir les moyens qu'ils ont d'agir par eux-mêmes, collectivement, d'exercer leur pression sur tous les acteurs de la vie politique et sociale.
Alors que la grève dans l'Education nationale continue à s'approfondir et à s'organiser, qu'elle touche d'autres secteurs de la Fonction publique comme celui des hôpitaux, et à la veille de la grande manifestation du 25 mai, personne ne peut dire encore jusqu'où le mouvement est capable d'aller, s'il pourra entraîner de façon significative d'autres secteurs dans la lutte, malgré les obstacles, en particulier le verrou de l'appareil de la CGT. Mais d'ores et déjà, quelle que soit son issue, c'est un premier succès, un pas en avant dont les effets bousculent l'ensemble des rapports de force.

Une profonde maturation des consciences
En 1995, salariés et militants syndicalistes avaient su utiliser les journées d'action lancées par les directions de la CGT et de FO et leur surenchère réciproque pour entraîner toute la Fonction publique dans la grève. En imposant un contrôle démocratique des responsables syndicaux dans et par leurs assemblées générales, les travailleurs de la Fonction publique avaient réalisé jusqu'à un certain point leur unité, brisé les corporatismes et bien des clivages. Il est même arrivé, dans certaines villes petites ou moyennes, que les grévistes de tous les secteurs se réunissent dans une assemblée unique.
En 2003, c'est bien malgré elles que les directions syndicales ont été contraintes, par la pression des salariés, d'appeler à une série de journées d'action. Aujourd'hui, le mouvement est surtout développé dans l'Education nationale, et il s'organise, constitue ses équipes et ses réseaux militants, avec toutes les difficultés inhérentes à un mouvement réel. Mais son existence même, du fait qu'elle s'est imposée aux appareils syndicaux, est l'expression d'une grande maturité politique.
S'il n'a pu jusqu'à présent s'étendre à d'autres secteurs de façon significative, c'est avant tout à cause de l'inertie, ou plutôt même du verrouillage des appareils bureaucratiques. On l'a vu à la SNCF et à la RATP : la reconduction de la grève au lendemain de la journée du 13 mai y a été violemment contrecarrée par l'appareil de la CGT. Mais la pression des salariés est telle que les journées d'action du 19 mai dans la Fonction publique, puis celle du 25, initialement programmées par les directions syndicales pour lanterner les travailleurs et servir de contre-feu à la volonté d'une lutte générale, ont permis au mouvement d'occuper le devant de la scène politique. La manifestation nationale du 25 mai donne à la contestation une nouvelle occasion de s'enraciner dans la population, de regrouper ses forces. En programmant la grève pour une date encore éloignée, le 2 juin, les fédérations de cheminots avaient à n'en pas douter le souci d'éviter une coordination enseignants-cheminots. En fait, leur initiative pourrait permettre au mouvement de rebondir et de s'étendre en entraînant les hôpitaux et une partie du privé.
Le rôle politique des enseignants
C'est actuellement le secteur enseignant qui joue un rôle moteur dans le mouvement. Non par sa capacité, comme avaient pu le faire les cheminots en 1995, à paralyser une partie importante des infrastructures du pays, mais par son rôle politique. Particulièrement remarquable à cet égard est la multiplicité des initiatives locales qu'il a prises ces derniers jours. Réunions d'information des parents d'élèves, diffusions de tracts sur les marchés, réunions publiques sur la question des retraites et de leur financement, visites à d'autres salariés en luttes, propositions de réunions ou d'actions interprofessionnelles… Le mouvement a trouvé d'innombrables militants, syndiqués ou non, organisés politiquement ou non, qui déploient une énergie considérable pour expliquer en quoi la décentralisation prépare le démantèlement du service public et la réforme sur les retraites, celui de la protection sociale, pour convaincre et gagner l'opinion. Ce qu'il a d'ores et déjà réussi à faire de façon visible, à l'échelle nationale.
Moins visible, mais néanmoins tout aussi importante, sinon plus, est son action en profondeur, à l'échelle locale. A travers ces initiatives, les réunions, les discussions, ce sont autant de barrières qui tombent, de liens qui se tissent, de réseaux qui se constituent, et pour tous ceux qui y sont impliqués, la découverte de nouvelles relations humaines, comme l'apprentissage, parfois difficile, du débat démocratique, le besoin pressant de réponses claires pour contrecarrer la propagande gouvernementale, et nombre d'interrogations sur toutes les questions sociales.
Se réalise dans le mouvement la jonction entre deux générations : celle qui a rompu avec la politique des partis de la gauche plurielle et les appareils syndicaux, et une jeune génération, libre du poids du passé et des désillusions, confiante dans l'avenir qu'elle sait devoir se construire. Une génération qui se politise à grande allure parce qu'elle découvre à quel point la question sociale est une affaire éminemment politique, mais aussi à quel point les intérêts d'appareil sont présents dans le paysage politique.

La recherche d'un débouché politique
Ce mouvement vient en conclusion d'une première phase de maturation des esprits et c'est tout à fait logiquement que les militants révolutionnaires et les syndicalistes radicaux en sont au premier rang, " l'extrême gauche politique et syndicale ", comme le disait récemment un journaliste sur France 2.
En 1995, la radicalisation d'une fraction de la population qu'avait traduite le score d'Arlette Laguiller (plus de 5% des voix à la présidentielle), s'était exprimée peu après dans les grèves et manifestations de l'hiver. Aujourd'hui, ce sont aussi les 10 % des candidats de l'extrême gauche à la présidentielle qui trouvent leur expression sur le terrain des luttes sociales, comme auparavant dans la mobilisation de la jeunesse contre Le Pen dans l'entre deux tours, puis dans la lutte contre la guerre.
Dans l'intervalle, les 5 années de gouvernement Jospin pendant lesquelles les partis de la gauche plurielle ont mis en œuvre l'offensive libérale, interdisent à ces partis de prétendre incarner une alternative de contestation. Si tous les grévistes se sont réjouis de ce que le PS a condamné les plans gouvernementaux, tout en remarquant que tous les courants du PS sont pour le passage à 40 annuités de cotisations, c'est parce que c'est l'expression du rapport de forces qu'ils ont pu imposer. Personne n'est dupe : ce revirement n'est qu'une nouvelle preuve d'un opportunisme dont il y a tout lieu de se méfier
Pour nombre de jeunes salariés entrés dans la lutte, comme pour les plus anciens, se pose le problème d'un débouché politique, non pas sous la forme d'un gouvernement d'alternative, mais sous la forme d'une force qui pose les problèmes dans leur globalité et qui soit capable de peser sur la scène politique. Les illusions électoralistes, dans la démocratie parlementaire, n'ont pas disparu, elles ne peuvent le faire spontanément. Mais il est naturel de chercher une solution qui permette aux salariés et à tous ceux qui luttent d'exercer leur pression de façon durable, dans les luttes sociales comme dans les luttes politiques, dont les élections sont un moment. Le dynamisme du mouvement repose sur la compréhension nouvelle que l'organisation, la mobilisation dans la rue sont déterminantes pour la défense des intérêts du monde du travail.

La mue nécessaire de l'extrême gauche est en train de s'opérer
Ce parti est en gestation, il est le fait de tous ces militants du mouvement, dans quelque secteur qu'il soit installé ou qu'il cherche à démarrer. Les révolutionnaires peuvent l'aider à prendre conscience de lui-même, à se cristalliser, à s'organiser.
Fondamentalement, dans le mouvement, les militants révolutionnaires ont la même orientation politique, par-delà les clivages. Les militants de la Ligue, de LO mais aussi ceux du PT, se retrouvent, pour la première fois largement, sur le même terrain de luttes et tout le monde peut vérifier à quel point leurs divergences sont en fait des divergences de tactiques. Elles posent des questions légitimes qui se posent au mouvement lui-même. Comment concilier auto-organisation démocratique et unité syndicale ? Comment animer les structures de mobilisation et la nécessaire organisation démocratique du mouvement ?… Autant de questions qui méritent un vrai débat au sein même du mouvement, au sein même de ce qui devrait être ce parti d'extrême gauche. Est-il nécessaire de dire qu'au sein même de ce parti, s'il existait, différentes orientations pourraient se confronter, se discuter et ce seraient les militants, les travailleurs qui trancheraient dans un débat public, ouvert et démocratique et dans l'action elle-même.
A l'opposé, aujourd'hui, chacun tend à faire de questions tactiques des justifications des divisions. La caricature en est le PT qui accuse LO et nous-mêmes de diviser l'unité syndicale alors qu'il ne fait que théoriser les choix tactiques que lui dictent ses positions syndicales.
Face à l'ampleur du mouvement et à sa signification politique, sa portée, les divisions apparaissent absurdes au regard de l'intérêt général du mouvement. Le mouvement agit comme un miroir et révèle à chacun ce que l'isolement et l'absence de confrontation démocratique ne permettaient pas de voir.
Une mue générale de l'extrême gauche est en train de s'opérer à travers la lutte pour faire prévaloir les intérêts généraux du mouvement.
L'unité s'impose à tous, par-delà les organisations, dans la réalité quotidienne, comme c'est le cas dans le mouvement, à travers le large débat public qu'il permet. Non sans difficultés, tiraillements, crises, mais c'est d'ores et déjà un mouvement irréversible.
Il a devant lui une nouvelle étape. Nul doute que ce que le gouvernement n'a pu imposer par la mascarade du dialogue social auquel la CGT était tout aussi disponible que la CFDT si les travailleurs et leurs propres militants n'avaient mis les pieds dans le plat, il va chercher à l'imposer par la force.
L'épreuve de force se prépare et exige l'unité.
Galia Trèpére


Les sociaux-libéraux ne battent pas en retraite :
Le congrès socialiste plébiscite le " réformisme de gauche "

" Personne n'est dupe " a déclaré Bernard Thibault qui s'est pourtant prêté au jeu d'une entrée triomphale au congrès du PS à Dijon. Pour gagner sa place, il a traversé la salle du Parc des Expositions aux côtés de François Hollande devant des militants socialistes lui réservant cinq minutes de standing ovation. À peine assis, Bernard Thibault s'est employé à lever l'ambiguïté. Le secrétaire général de la CGT a accepté le statut d'invité d'honneur du XVIIe Congrès du PS. Il ne veut pas, en revanche, donner l'impression d'avoir été bluffé par l'accueil des congressistes scandant " Retrait du projet Fillon " à son passage. Et d'autant moins que, lors du précédent congrès, à Grenoble, il y a trois ans, sa présence était passée totalement inaperçue. En novembre 2000, le gouvernement Jospin était, certes, encore aux affaires…
Bernard Thibault prétend ne pas être " dupe ". Mais qui peut l'être ? Certainement pas les centaines de milliers de manifestants qui avaient déjà sanctionné en avril 2002 la politique conduite par le PS, le PCF et les Verts depuis juin 1997.
La gauche plurielle a bénéficié de cinq années pour abroger la réforme Balladur et le plan Juppé, sans le faire. Pire, Jospin a ouvert le chantier de la réforme, négociant, main dans la main avec Chirac, en 2002, le " compromis de Barcelone " invitant les états membres " d'ici à 2010 à augmenter progressivement d'environ cinq ans l'âge moyen effectif auquel cesse, dans l'Union européenne, l'activité professionnelle ". " Il y aura des sacrifices à opérer ", expliquait alors Laurent Fabius, ministre des Finances, à l'adresse des salariés du public et du privé. " Chaque année, notre espérance de vie augmente de trois mois, donc les actifs doivent financer chaque année des retraités qui vivront trois mois de plus. Comment voulez-vous qu'il n'y ait pas un ajustement ? ", faisait valoir le locataire de Bercy.
À l'applaudimètre, tous les observateurs en conviennent : Thibault et Fabius ont fait jeu égal à Dijon. Sans complexe, Fabius a dénoncé devant les militants le " projet scandaleux " du gouvernement sur les retraites. " On n'est pas ministre des Finances toute sa vie ", a lâché cyniquement ce chantre du social-libéralisme. " Nous soutenons les organisations syndicales, celles qui jusqu'au bout ont été fidèles au mandat unitaire qu'elles avaient pris ensemble ! ", a-t-il lancé sous une pluie d'applaudissements. L'ancien Premier ministre lorgne l'Élysée depuis la retraite de Jospin. Il adapte son discours, pas plus.
" C'est sympa, la salle applaudit tout et son contraire ", s'amuse Ségolène Royal. " C'est un bon public ! ", renchérit Daniel Vaillant. " C'est le grand paradoxe de ce congrès, note plus sérieusement Christophe Cambadélis. C'est au moment où nous prenons le tournant réformiste que la CGT est acclamée. " Dit autrement : au moment où la majorité du parti se rallie au social-libéralisme. Bras droit de Dominique Strauss-Kahn, Cambadélis préconise, inlassablement, depuis des mois, " la fin du réformisme honteux ". Hollande et les courants qui l'ont rallié à Dijon défendent entièrement ce projet, résumé d'une formule par le Premier secrétaire : " être à gauche autant qu'il est souhaitable, être réformiste autant qu'il est possible ".
Le congrès a, sans surprise, entériné cette politique. Et c'est le sens de l'absence de la traditionnelle synthèse qui veut que la majorité s'élargisse en intégrant des éléments de l'orientation des courants minoritaires. Rasséréné par les 61 % réalisés sur sa motion, Hollande a jugé plus utile de faire cavalier seul que d'édulcorer les thèses social-libérales de la majorité. D'aucuns parlent d'un recentrage " réformiste " sans s'attarder sur le sens nouveau que recouvre ce terme dans le discours socialiste après vingt années de politique anti-sociale. Les mêmes souvent sont obnubilés par les scores des motions minoritaires du Nouveau Parti socialiste (NPS) et de Nouveau Monde (NM) - respectivement 16,88 % et 16,33 % - comme si celles-ci incarnaient une rupture avec l'orientation des Hollande, DSK et Fabius.
La résolution sur les retraites adoptée à une quasi unanimité - une voix contre et une abstention - au terme des trois jours de congrès souligne, qu'au-delà des effets de tribune, c'est bel et bien l'esprit et la lettre du social-libéralisme qui dominent. " Nous exigeons, est-il dit, le retrait du projet Raffarin-Fillon qui entraînerait une baisse inacceptable du montant des retraites, la fin de la retraite à 60 ans, la mise en péril de la retraite par répartition et le recours inéluctable à la capitalisation. " La réforme Balladur, le plan Juppé ne sont évidemment pas mentionnés. De la même façon, et dans la lignée des mesures régressives défendues par le PS jusqu'ici, on laisse ainsi entendre qu'une baisse " acceptable " du montant des retraites comme le recours " libre " à la capitalisation serait possible. Et la résolution n'évoque pas la question des 37,5 annuités pour tous, ni celle d'une retraite à taux plein à 60 ans.
On cherche vainement le " tournant à gauche " évoqué ici et là. On note en revanche l'acceptation - au mieux implicite - de la politique conduite par Jospin pendant cinq ans. À l'issue du congrès, le prédécesseur de Fabius à Bercy, Dominique Strauss-Kahn, a affirmé sans détour qu'un allongement de la durée de cotisation " peut être une solution " dès lors que l' " on tient compte de la pénibilité " du travail. Un signe !
Le congrès socialiste aurait été en phase avec le mouvement social ? Il souligne plutôt le décalage entre les préoccupations des socialistes et celles des milliers de grévistes. La résolution adoptée en témoigne. La solidarité affichée à l'égard de Bernard Thibault, présentée comme la surprise de Dijon par tous les médias, révèle à elle seule ce fossé qui s'est creusé avec le mouvement social. Qui peut oublier que trois anciens ministres du gouvernement Jospin, Elisabeth Guigou, Ségolène Royal et Daniel Vaillant, ont été chassés en novembre dernier de la manifestation parisienne pour la défense du service public ? Il convient aussi de ne pas se méprendre sur le sens profond du rapprochement avec le PS d'une CGT évoluant, elle-même, vers la droite. " La CGT est devenue un syndicat de négociation et donc un partenaire possible pour le PS ", analysait logiquement Marisol Touraine, chargée des affaires sociales au Parti socialiste.
" Je suis celui, répétait François Hollande depuis des mois, qui a vocation à tourner la page, mais aussi à écrire la suivante. " Toute sa stratégie s'organisait autour de cet objectif : continuer sans Jospin. Le " réformisme de gauche " avancé par les " hollandais " - les anciens jospinistes - visait précisément à assimiler les réformistes aux réformateurs… libéraux. La différence avec DSK et Fabius se limite donc à la précision " de gauche " aux conceptions " réformistes " développées notamment par Cambadélis, une broutille si l'on garde en tête l'essentiel : la référence en la matière est l'expérience du gouvernement Jospin.
La percée social-libérale n'est nullement surprenante dès lors que le PS revendique l'exercice du pouvoir. " Nous sommes un grand parti de réforme, un parti de gouvernement ", claironnait Hollande dans sa conclusion aux travaux de Dijon, moquant les révolutionnaires : " c'est toujours la gauche, à notre initiative, qui fait avancer le progrès et les réformes sociales. Elle est honorable. Car c'est la confrontation à la responsabilité, à la réalité, à l'épreuve du pouvoir, quand d'autres choisissent - par posture ou par dogme, ou en attendant je ne sais quel soir ou quelle nuit qu'ils, finalement, n'attendent plus depuis longtemps - de se calfeutrer dans la facilité de l'exhortation ou de la mauvaise conscience. " À l'heure de la mondialisation les marges de manœuvre du réformisme s'épuisent entièrement, obligeant les prétendants au pouvoir dans le cadre bourgeois à s'adapter. Le ralliement au réformisme sans réforme puis du réformisme sans réforme à l'acceptation passive du social-libéralisme s'explique par le rétrécissement d'abord, la disparition ensuite, des bases matérielles d'une politique refusant d'en finir avec le capitalisme. Ce " réalisme " n'est d'ailleurs pas propre au parti réformiste ; il s'étend au champ syndical, à l'instar d'une CGT passée maîtresse dans le discours gestionnaire.
Hollande a incontestablement réussi son double pari. NPS et NM sont confinés dans un rôle d'opposant, sans perspective sinon celle d'intégrer la majorité - ce que traduit le vote sur la résolution sur les retraites. Plus royaliste que le roi, l'inénarrable Mélenchon, ministre sous Jospin, s'est évertué à la tribune du congrès à rappeler ses solidarités partisanes. " Je m'amuse de vous avoir entendus ici ou là me dire que je vous proposais de vous mettre à la remorque de l'extrême gauche. Pauvres petits ! À la remorque, moi ? Allons ! Est-ce que c'est mon orientation politique qui a permis l'émergence de l'extrême gauche ? " Oui, en réalité… Mélenchon s'affranchit un peu rapidement de ses responsabilités, comme ministre, comme sénateur et comme dirigeant socialiste.
Le Premier secrétaire a surtout réussi à se démarquer de Jospin tout en reprenant sa politique : Jospin, " c'est une belle référence. En tout cas, je vous le dis, chers camarades, c'est la mienne ". En bref : Jospin n'est plus qu'une " référence ", renvoyant à un passé qu'il s'agit… de faire oublier ! Nécessité fait loi… Et l'attitude des anciens jospinistes entourant Hollande s'inscrit dans une longue lignée. Lionel Jospin n'a-t-il pas relancé le Parti socialiste après les deux septennats de François Mitterrand en réclamant un droit d'inventaire pour mieux s'affranchir du bilan de la politique menée et s'exonérer de sa propre responsabilité. Les DSK, Fabius, Aubry et autres Mélenchon, ministres de Jospin, critiquent son bilan depuis le désastre du 21 avril seulement ; ils entendent rééditer l'exploit qui a conduit un des leurs à Matignon en 1997, moins de cinq ans après la déroute du PS en 1993. D'une certaine façon, la nouvelle page est déjà écrite. Une victoire socialiste aboutirait au résultat qu'a connu Jospin.
Miser sur le simple jeu de l'alternance serait pourtant hasardeux. Premièrement, l'alternance présuppose que le projet du PS se distingue de la droite ! Deuxièmement, et plus fondamentalement, c'est ignorer les leçons du 21 avril. L'extrême droite peut se présenter comme la force en compétition avec l'UMP. L'extrême gauche peut offrir une perspective de lutte et y compris à tous ceux qui ont perdu leurs illusions dans les formations réformistes, le PS et le PCF, gagnées au social-libéralisme. La énième mouture d'union de la gauche, que défende l'ensemble des courants de la gauche plurielle, et en leur sein toutes les sensibilités organisées, n'offre aucune autre solution que celles qui ont échoué. Les " forums de la gauche dans tous les départements de France " ouverts à " tous ceux qui le voudront, les citoyens, les réseaux et les partis " que le PS préconise en sont la preuve la plus flagrante. Ils reprennent une " méthode " éculée. Ils marqueront un peu plus l'incapacité de la gauche unie à apporter des réponses aux problèmes concrets auxquels le mouvement ouvrier se heurte. Et d'ici là, les mobilisations contre les projets de la droite auront largement déblayé le terrain.
Le virage à gauche, ce n'est pas au congrès socialiste qu'il s'est manifesté la semaine dernière même si le PS a fait semblant de comprendre. C'est dans les rues. Contre la politique du PS et de ses alliés communiste et Verts. Personne n'est dupe.
Serge Godard


A propos du premier numéro des Cahiers de critique communiste

Ce premier numéro a pour thème " Mondialisation et impérialisme " autant dire qu'il vient à point nommé alimenter la discussion sur le contenu de la nouvelle période qui s'ouvre, sa place dans l'histoire du capitalisme, les perspectives nouvelles qui s'en dégagent, les possibilités et la nécessité du développement du mouvement ouvrier, de sa renaissance.
En quoi les transformations opérées peuvent-elles être le point de départ d'un renouveau du mouvement ouvrier, en quoi créent-elles les conditions objectives d'un nouveau développement révolutionnaire et d'un nouvel internationalisme ? Certes, ce n'est pas à strictement parler le thème de ce numéro mais, pour les militants du mouvement ouvrier, les analyses du capitalisme aujourd'hui doivent éclairer l'avenir et les perspectives. Et on ne peut que regretter que ce lien ne soit pas assez souligné, le cadre général se limite trop à une dénonciation qui ne dépasse pas l'anticapitalisme.
Dommage, d'autant que l'ensemble des contributions apporte des éléments dont on aimerait pouvoir dégager une cohérence.
Il me semble que cette faiblesse des Cahiers résulte de ce que l'idée qui saisit la mondialisation comme la transformation du capitalisme obéissant à une dégradation du rapport de force entre les classes n'est pas assez prise en compte. Jean-Marie Harribey écrit dans sa contribution " Mondialisation et écologie : de l'impasse à l'ouverture " : "Les politiques néolibérales ont été engagées pour tenter de sortir de la crise de rentabilité qui avait éclaté à la fin des années 60. Désigné par le vocable de mondialisation, ce processus de financiarisation donnant un nouvel élan à la concentration du capital a été facilité par un rapport de force favorable aux classes bourgeoises qui ont réussi à imposer partout aux salariés une précarisation de leurs conditions de travail. "
Cette caractéristique essentielle de la mondialisation mérite d'être soulignée. Cette dernière n'est pas l'application d'un modèle libéral, mais bien la logique d'une offensive des classes dominantes contre les limites que les peuples et les travailleurs avaient mises à l'exploitation.
Mesurer les transformations accomplies, leurs incidences sur la lutte des classes, leurs implications sur le programme que nous pouvons avancer dans ces luttes de classes nécessite d'intégrer dans nos raisonnements cette donnée essentielle pour caractériser et décrire la mondialisation comme la résultante d'une offensive de la bourgeoise contre les peuples et les travailleurs.
Ce qui veut dire situer la mondialisation financière dans " la courbe du développement capitaliste " : quelles différences, quelles caractéristiques nouvelles par rapport aux analyses des marxistes dont celle de Lénine, quelle continuité ?
Cette discussion n'est pas neutre. Elle est au cœur du débat dans le mouvement altermondialiste, puisque les réponses qu'on y apporte définissent une conception ou réformiste, aujourd'hui le plus souvent désigné par l'anticapitalisme, ou révolutionnaire même si la délimitation entre les deux n'est pas toujours aussi nette.
Au moment où les vieux partis réformistes sociaux-démocrates ou staliniens s'enferment dans le social-libéralisme, la renaissance du mouvement ouvrier connaîtra bien des pièges ou des erreurs qui pourraient l'embourber dans les ornières du passé. La façon d'éviter ces pièges ou ces erreurs ne se trouve dans aucun livre de politique révolutionnaire mais bien dans un travail méthodique d'analyse du capitalisme en continuité avec sa critique marxiste révolutionnaire pour, en corollaire, formuler un programme et une politique pour le mouvement ouvrier. Il s'agit de formuler et de mettre en oeuvre une politique de classe pour peser dans le rapport de force et à terme préparer la classe salariée à sa tâche historique : renverser le capitalisme.
Nous ne voyons pas d'autres " alternatives au règne global de la marchandise ".
Il me semble que cette perspective globale devrait, dans sa complexité, sous-tendre nos démonstrations pour donner une compréhension globale, historique de nos tâches, des arguments de critiques du capitalisme comme des échecs des tentatives de le réformer, de réguler l'économie de marché.
Il y a un vaste travail de reformulation des conceptions marxistes, de leur popularisation.
A la base de l'analyse de la marchandise, il y a une notion qui est née avec la marchandise elle-même puisqu'elle date de l'antiquité, plus précisément d'Aristote, c'est la différenciation entre valeur d'usage et valeur d'échange. Marx l'a développée avec la théorie de la valeur qui définit la valeur d'échange d'une marchandise comme le temps de travail socialement nécessaire à sa production.
La théorie de la valeur de Marx est le fil à plomb de toute analyse de l'économie de marché parce que, par delà les mystifications, les illusions de la monnaie et du crédit, des spéculations, elle renvoie à la réalité concrète de la production et des rapports de classes qui s'y organisent, les rapports d'exploitation.

Mettre en exergue les contradictions
L'ensemble de nos analyses se situe du point de vue des exploités, des opprimés. C'est ce point de vue qui fonde notre objectivité, c'est-à-dire considérer les questions sociales et politiques en fonction des intérêts de l'humanité toute entière.
Nous voulons mettre en œuvre une politique qui serve les intérêts de la grande majorité de la population. La question est : comment ? Elle se précise dans deux autres questions : quelles leçons nous tirons de la faillite social-libérale des partis ex-réformistes ? En quoi la mondialisation financière et impérialiste vide de tout contenu le réformisme ?
La première question n'est pas l'objet de ce premier numéro des Cahiers, la deuxième en est, de fait, pour nous, le contenu.
De ce point de vue, les choses mériteraient plus de clarté.
Ainsi Michel Husson écrit : " L'une des tâches prioritaires du mouvement ouvrier est d'intégrer cette dimension internationale nouvelle. Il n'est pas hors de sa portée d'engager une lutte résolue pour contrer l'offensive d'un Etat bourgeois donné et lui imposer d'autres " critères ", et en particulier une nouvelle " régulation " du marché du travail garantissant les intérêts des travailleurs. Mais cette lutte sera d'autant plus puissante qu'elle pourra être étendue à un cadre plus large que l'Etat-nation, au moins européen, voire mondiale. "
Certes, il n'y a aucune fatalité, nous sommes bien d'accord, tout se joue au niveau des rapports de forces entre les classes. Et ce rapport de force ne peut pas se construire qu'à l'échelle nationale. S'il s'agit de dire que les salariés peuvent modifier ce rapport de force en leur faveur, oui, si cela veut dire que, par exemple, les luttes en Autriche ou en Allemagne sur les retraites renforcent notre propre combat ici, bien évidemment. Mais s'il s'agit de dire qu'il serait possible d'inverser le rapport de force en faveur des salariés à long terme sans transformation politique de fond remettant en cause cet " Etat bourgeois ", il y a là plus qu'une ambiguïté.
Il est de plus en plus clair, écrit Michel Husson un peu plus loin, que ce sont les exigences irrationnelles du système capitaliste qui font obstacle aux aspirations de l'humanité ; c'est dans cette contradiction, de plus en plus flagrante, que réside la possibilité de fonder un anticapitalisme contemporain. C'est pour cette raison aussi que tout anti-impérialisme conséquent doit aujourd'hui être un anticapitalisme mettant en œuvre une double rupture articulée : avec le marché mondial, évidemment, mais aussi, à l'intérieur, avec la loi du profit et des inégalités. "
Pour les marxistes, l'anticapitalisme ne saurait constituer un programme. Nous savons que l'on ne peut rompre avec la loi du profit qu'en rompant avec la domination politique et sociale de la bourgeoisie, c'est pourquoi notre programme est celui du socialisme et du communisme, d'une transformation révolutionnaire de la société. L'anti-impérialisme ne saurait se réduire à une rupture avec le marché mondial, rupture au demeurant impossible. La mondialisation dans ce qu'elle a de phénomène objectif lié au développement des nouvelles technologies, des échanges, entraînant une nouvelle division internationale du travail rend impossible cette rupture avec le marché mondial qui, si elle devenait une réalité, serait réactionnaire.
Notre internationalisme, ce n'est pas la rupture avec le marché mondial, mais la prise de conscience que le développement de la production et des échanges créent les conditions objectives d'une lutte commune par delà les frontières. Notre internationalisme est d'œuvrer à l'émergence d'une conscience de classe internationale en rupture avec toutes les politiques laissant croire qu'il pourrait y avoir satisfaction des besoins des populations sans s'en prendre directement à la propriété bourgeoise, c'est-à-dire à la finance, sans expropriation. Toute révolution aura aujourd'hui pour cadre le marché mondial.
Michel Husson poursuit " On connaît les principaux éléments d'un programme de développement : il faut donner la priorité à la satisfaction des besoins du plus grand nombre, dénoncer la dette, organiser la réforme agraire, réorienter les ressources vers le marché intérieur et contrôler le commerce extérieur, répartir les revenus de manière plus égalitaire, mettre en œuvre une réforme fiscale. Sur chacun de ces points, on voit qu'un tel programme s'oppose aux intérêts des bourgeoisies locales. "
Qui peut mettre en œuvre ces mesures ? Sont-elles applicables sans un programmes visant à exproprier les expropriateurs ? Comment contrôler le système financier et les banques ? Est-ce l'Etat bourgeois qui pourrait le faire ? Un autre Etat ? …
Nos réponses à ces questions n'ont pas à craindre d'aller au-delà de l'anticapitalisme pour formuler une perspective révolutionnaire, c'est-à-dire dont l'issue dépend de la capacité des opprimés à s'ériger en classe dominante.

Surmonter l'éclectisme en traçant une perspective démocratique et révolutionnaire
Dans leur contribution, Gérard Duménil et Dominique Lévy écrivent : " Le cours du néolibéralisme suscite nécessairement des résistances de la part de ceux qui en ont le plus souffert. Les luttes et manifestations électorales d'humeurs antinéolibérales dans la périphérie rejoignent les mouvements luttant pour une autre mondialisation ou luttant contre la guerre. Ces luttes créent un nouvel espoir mais auront beaucoup de mal à surmonter leur éclectisme. "
Pourquoi ? N'ont-elles pas un commun dénominateur ? Pourquoi ne pourraient-elles pas s'unir à travers une nouvelle conscience de classe, une nouvelle solidarité ? Notre tâche collective n'est-elle pas de formuler les réponses politiques par la critique de l'impérialisme libéral permettant d'unifier la conscience des plus larges masses dans une volonté de contestation sociale radicale ? Nous ne sommes pas condamnés à décrire la force de nuisance de l'adversaire sans imaginer par quelle faille, à travers quelle contradiction les masses pourraient s'engouffrer.
Le mouvement antiguerre, comme les luttes pour le retrait du projet Fillon indiquent à travers quelles expériences, à travers quelles luttes se forge cette nouvelle conscience démocratique et révolutionnaire.
Claude Serfati nous indique avec beaucoup de clarté une des contradictions du capitalisme qui apparaît à nu et qu'il résume ainsi : " Plus le capital financier réussit à conforter et à étendre sa logique, et plus le besoin de la force armée grandit. " Là est la faiblesse du libéralisme impérialiste qui a besoin d'un renforcement de l'Etat et du militarisme.
Le capitalisme de la rente financière a atteint un tel degré de parasitisme au détriment des peuples et des travailleurs qu'il exige un renforcement de l'Etat alors que son internationalisation même conteste les Etats nationaux.
De cette contradiction résultent mille facteurs de crise en particulier en Europe. Plus la concurrence internationale pousse à l'unification politique de l'Europe, plus les intérêts de chaque Etat sous les effets de cette même concurrence s'y opposent. Le dénouement de cette contradiction appartient aux classes populaires et à elles seules.
Dans sa contribution intitulée " L'impérialisme français, maillon faible ou supplétif ? " Gustave Massiah décrit, en en faisant l'historique, les faiblesses et contradictions de l'impérialisme français qui n'a plus les moyens de ses prétentions comme viennent de le démontrer les contorsions de Chirac sur la scène diplomatique pour négocier la place de la France dans le dépeçage de l'Irak. Il apparaît qu'entre la soumission aux intérêts de l'impérialisme dominant et l'intégration dans un nouvel impérialisme européen, la seule voie que l'impérialisme français a devant lui est celle de la crise.
Le mouvement ouvrier, loin de redouter cette crise, devrait l'anticiper, s'y préparer pour apporter ses propres réponses.
Une autre Europe de la démocratie et de la paix ne pourra naître que de bouleversements révolutionnaires qui sont en gestation au cœur même du maillon le plus faible.

Des mutations qui préparent une nouvelle révolution
Les contradictions de l'impérialisme libéral que nous décrivent les différentes contributions sont la conséquence du développement des contradictions du capitalisme à un niveau jamais atteint jusqu'alors. Le terme de la mondialisation voudrait évacuer le fait que, comme l'écrivent Duménil et Lévy, " le moteur de cette politique de domination est la lutte de classe ". Le terme se veut neutre mais il souligne un des changements fondamentaux qu'entraîne la dernière phase de développement du capitalisme. L'idée de révolution mondiale qui apparaissait comme une vue de l'esprit d'une minorité trotskyste prend un contenu objectif très concret. C'est le développement même du capitalisme et en particulier le désastre écologique qu'il provoque qui pose la question d'une " gouvernance mondiale ". Il pose la question mais est bien incapable d'y apporter une réponse autre que la domination de l'hyperpuissance américaine rejetée par les peuples.
La mutation décisive apportée par le capitalisme est d'avoir aboli les frontières " écrit Jean-Marie Harribey. Il souligne une des tendances essentielles du développement capitaliste, saper les bases mêmes de sa domination quoiqu'il anticipe sur les conséquences de cette tendance. Là encore, le capitalisme reste enfermé dans ses contradictions. Incapable de les dépasser, il menace le monde de déchaînements nationalistes qui prendraient un masque à prétention universelle en se revendiquant d'un messianisme religieux. Ce nationalisme à prétention mondialiste de l'hyperpuissance trouve tout naturellement dans le messianisme religieux son idéologie. Les propos de Bush en sont les premières manifestations.
Michel Husson dénonce " cette manière de présenter la mondialisation comme un mécanisme inexorable " qui entraînerait " un sentiment d'impuissance ". Il écrit " L'enjeu de cette discussion est évident. En effet, si l'on pense que les forces du marché s'imposent désormais à des Etats à peu prés impuissants, alors il est vain de s'adresser à eux et, dans ces conditions, mieux vaut se résigner à l'impossibilité d'une autre politique ". N'y aurait-il pas d'autre voie que celle des illusions ou de la résignation ? La lucidité ne signifie pas la résignation. Du point de vue des intérêts des classes dominantes, la politique des Etats est inexorable. Une autre politique ne peut être que le résultat de la pression de la classe salariée, pression dont les résultats ne peuvent être qu'éphémères sauf de contester cet Etat et le droit de la bourgeoisie à diriger la société.
Une des conséquences du parasitisme financier est que les exigences des classes dominantes limitent de plus en plus les droits tant sociaux que démocratiques pour les classes opprimées. La mondialisation financière est organiquement liée, comme le démontre Claude Serfati, à la mondialisation militaire, elle se conjugue dans une même politique sécuritaire contre le monde du travail.
La lutte pour les droits sociaux comme la lutte contre la guerre est une même lutte contre le capitalisme qui débouche sur la lutte pour les droits démocratiques, le droit de la population à contrôler la marche de la société.
C'est cette réalité des nouveaux rapports de classe qui façonne la conscience des travailleurs et des peuples, leurs propres intérêts sont incompatibles avec ceux des classes dominantes.
Il n'y a plus de place pour les illusions réformistes.
C'est là sans aucun doute la conséquence la plus profonde et la plus radicale de la mutation capitaliste, la plus porteuse d'espoir.
Le premier numéro des Cahiers de critique communiste le démontre abondamment sans, malheureusement, pousser les raisonnements jusqu'à leur conclusion logique : assumer la continuité des idées du socialisme et du communisme pour formuler un nouveau programme révolutionnaire sans s'arrêter au milieu du gué, à l'anticapitalisme.
Yvan Lemaitre