Débatmilitant | ||||||||||
Lettre publiée par des militants de la LCR |
n°69
|
1er
juillet 2005
|
||||||||
|
||||||||||
Sommaire : | ||||||||||
Contre les ordonnances, cent jours pour préparer la riposte | ||||||||||
La victoire du Non, point d'appui pour défendre une politique de classe au sein de la CGT | ||||||||||
|
||||||||||
Contre les ordonnances, cent jours pour préparer la riposte
Il
y aurait donc urgence, dit sans rire Villepin, pour justifier les six ordonnances
que le Parlement consentant et résigné devrait l'autoriser à
prendre. Toujours sans rire, Villepin, lors de sa première conférence
de presse, a qualifié son gouvernement de " gouvernement de service
public ". La duplicité est décidément devenue un réflexe
chez les hommes de gouvernement. Service public de la privatisation, de la défense
des intérêts des patrons et des gros actionnaires, service public
contre les travailleurs et les fonctionnaires, service public de l'ouverture
au capital privé d'EDF-GDF
Urgence pour aggraver une situation
qui, pour la grande majorité de la population, se dégrade depuis
des années
Au service du public, l'ordonnance qui prétend instaurer un contrat à
durée indéterminée de
deux ans, deux ans d'essai
pendant lesquels les travailleurs devront tout accepter dans l'espoir que, peut-être,
ils seront embauchés !
Au service du public, le " chèque emploi " destiné aux patrons pour qu'ils embauchent ! Au service du public, les nouvelles exonérations de cotisations dont bénéficieront les patrons. Villepin donne une cynique et brutale leçon de chose à tous ceux qui croyaient ou qui voulaient faire croire que le succès du Non le 29 mai pouvait en lui-même mettre en échec la politique de l'Etat ou qu'il signifierait une défaite pour le patronat.
Une
des leçons des suites immédiates du 29 mai est bien que le rapport
de force entre les classes se construit sur un autre terrain que celui des urnes.
La campagne pour le Non était l'occasion de défendre largement
les idées de la contestation du capitalisme et de l'Europe des multinationales
au nom des intérêts de l'ensemble des travailleurs par delà
les frontières sans se laisser enfermer dans le réformisme de
l'anti-libéralisme. Le vote Non était l'occasion de donner un
camouflet à la droite comme à ses alliés du social-libéralisme,
un geste d'encouragement pour les luttes, un geste pour affaiblir politiquement
nos adversaires, mais un geste impuissant s'il reste sur le simple terrain électoral.
Les
mobilisations sociales et celle de la jeunesse ont porté le Non, le Non
est maintenant un point d'appui pour préparer la contre-offensive sur
le terrain des mobilisations et des luttes.
L'heure n'est pas à pétitionner pour le départ de Chirac.
Laisser croire qu'une pétition pourrait changer quoi que ce soit face
à un pouvoir qui ignore les sanctions électorales successives
comme celles de la rue, relève soit d'un aveuglement légaliste,
d'un conformisme institutionnel inquiétants soit d'une lucide volonté
de tromper les travailleurs, de les détourner des vrais problèmes.
Bien
au contraire, nous devons aider les travailleurs à tirer en toute lucidité
cette leçon des dernières semaines, l'affrontement est inévitable,
il aura lieu sur le terrain de classes, dans les entreprises, sur les lieux
de travail, dans les quartiers et dans la rue. Et il faut le préparer.
Contrairement à ce que pensent nos camarades de Lutte ouvrière,
cet affrontement n'est pas pour un jour, peut-être
mais bien une
échéance inscrite à l'ordre du jour de l'évolution
de la crise politique et sociale qui mûrit bel et bien.
Les
cent jours de Villepin, c'est le rendez-vous que bien involontairement le clone
de Chirac-Raffarin a fixé aux travailleurs et à leurs organisations.
Cent jours qui vont voir la crise à la tête de l'exécutif
s'aggraver au point de devenir une inévitable rupture. Le creux et faux-semblant
de panache de Villepin ne réussit même pas à masquer le
lent et inexorable naufrage du navire Chirac. Sarkozy s'envole, ivre de lui-même,
dans un populisme débridé. Les minables petits députés
de l'UMP se prennent à croire à leur avenir, ils ont trouvé
un chef, un vrai, un homme et puis la gauche est tellement stupide
Tout
ce petit monde de la politique people et des paillettes médiatiques oublie
le monde du travail, les classes populaires. Une révolte sourde et profonde
s'accumule, elle est proportionnelle à la progression du chômage,
de la précarité, de la pauvreté. Le nombre de smicards
n'a jamais été aussi élevé, il a progressé
de 16 % en un an. C'est la révolte des travailleurs de Nestlé,
notre révolte à tous.
Cette révolte s'affirme, prend conscience d'elle-même, mesure à
quel point elle est étrangère aux vieux partis de gouvernement
de la gauche, qui ne se sont toujours pas relevés du KO de la gauche
plurielle.
Il
y en a assez de ces fausses batailles où s'affrontent les ambitions politiciennes,
les intérêts d'appareils politiques petits et grands qui tous disent
vouloir notre bonheur.
Notre bonheur, nous le construirons ensemble dans la lutte et la solidarité,
l'action collective syndicale, associative, politique.
Nous nous sommes servis du référendum pour dire Non et nous avons
pu vérifier à quel point le pouvoir était isolé,
illégitime, ses méthodes de voyous rejetées par la population.
Maintenant,
le prolongement du Non, l'avenir des collectifs, passent par l'émergence
d'un front uni pour les revendications d'urgence sociale et démocratique.
Yvan
Lemaitre
Rencontre
nationale unitaire des comités pour le non :
Entre antilibéralisme, ambitions électorales et préparation
des luttes
La rencontre nationale unitaire des comités pour le Non à Nanterre, samedi 25 juin, représente un succès non négligeable puisque près de 700 militants venant de toute la France s'y sont retrouvés.
Les
débats dans les commissions ont reflété toute la diversité
d'une campagne unitaire dynamique, y compris dans de petites villes. Comités
de villes, de quartiers, de départements voire d'entreprises, collectifs
d'organisations ou d'individus, certains se sont inscrits dans la continuité
d'un travail unitaire créé lors de la guerre en Irak, dans les
collectifs de défense des services publics, des collectifs interpros
de 2003, d'autres ont fait leur première expérience dans cette
campagne. Le bilan témoigne d'une campagne dynamique et large. Diffusions
de tracts, affichage, réunions publiques ont regroupé un public
inhabituel et nombreux.
La mobilisation et l'élan unitaire n'ont pas reflué après
le 29 mai puisque beaucoup relataient des réunions d'après référendum
tout aussi nombreuses voire plus nombreuses et des débats sur les moyens
de continuer ensemble.
Au-delà
de la réalité militante assez diverse, dominait le flou du contenu
politique et des perspectives. Presque tous les collectifs présents étaient
des collectifs constitués sur la base de l'Appel des 200 dont chacun
connaît les limites. Peu de débats politiques semblent les avoir
animés à la fois du fait des craintes de récupération
de nombreux " inorganisés " ou des conceptions de l'unité
qui, au nom du consensus, écartent le débat politique par manque
de pratique démocratique et crainte de l'éclatement.
Difficulté
à penser une seule lutte de classe
Le
débat s'ouvre maintenant sur les perspectives, sur quelle base continuer.
Les préoccupations sont multiples.
Dans les commissions, plusieurs militants sont intervenus de façon très
militante, avec notamment sur la Gironde le soutien aux postiers de Bègles,
ou sur les Bouches-du-Rhône le soutien aux Lustucru, évoquant la
lutte nécessaire contre les licenciements, les privatisations, en particulier
celle d'EDF-GDF, et la politique sécuritaire de Sarkozy. Comment agir,
avec les collectifs, sur le temps partiel contraint, les recalculés,
les interdits bancaires, les minima sociaux. Certains discutaient anticapitalisme
plutôt qu'antilibéralisme.
La préoccupation de construction d'une alternative à la gauche
libérale à l'échelle européenne dominait et plus
largement, à cette société ultra-libérale, voire
d'une alternative anticapitaliste. Les collectifs peuvent-ils eux-mêmes
élaborer une Constitution alternative et faut-il appeler à une
assemblée constituante ? Certains voudraient que les collectifs deviennent
des cadres d'élaboration de cahiers de doléances sur le plan local,
national ou européen, dans le cadre d'une Constituante. Des comités
posaient la question de la dissolution de l'assemblée nationale vers
de nouvelles élections. Ils veulent mettre en avant l'illégitimité
du gouvernement. 2007 est un débat, dans lequel beaucoup de méfiance
s'est exprimée vis-à-vis des appareils politiques.
La grande majorité des collectifs ne se situent pas dans la perspective des luttes, de la construction d'un rapport de force sur le terrain de la lutte de classe pour les revendications du monde du travail. Si des comités ont exprimé leur souhait de mettre fin à la rupture entre le mouvement social et politique en organisant des assises qui réuniraient toutes les associations, syndicats et partis comme cela a pu se faire dans certains Forums sociaux locaux, ils ont des difficultés à unir concrètement dans un même raisonnement la question sociale et la question politique.
Tous les présents mettaient en avant la nécessité de saisir cette occasion inédite de regroupement national des collectifs, de leur fixer une perspective qui n'était pas pour la majorité celle des échéances électorales, " cul de sac électoral " pour certains. La volonté s'est exprimée fortement de préserver les cadres qui ont permis l'unité de tous les militants et inorganisés, pour débattre et agir. Beaucoup affirmaient la nécessité de se coordonner de manière souple à tous les niveaux pour prendre des initiatives communes et le besoin d'un nouveau rendez-vous national pour discuter. Des assises départementales puis nationales ont été évoquées. Tous ces débats ont été marqués par une forte volonté démocratique et une méfiance exprimée vis-à-vis de la coordination nationale et appareils de tous ordres. A émergé des commissions le souhait d'un autre fonctionnement national avec notamment des délégués élus émanant des comités.
Une
déclaration qui reste dans le cadre institutionnel
L'objectif de cette première rencontre était avant tout de débattre, d'échanger sur les perspectives, et de s'entendre sur de prochaines échéances. Un texte a été proposé par la coordination nationale pour une " déclaration issue de la rencontre nationale des collectifs unitaires pour le non ". Proposé le matin même, aucun des représentants des comités n'avait donc de mandat pour le voter. Des amendements ont été proposés dans les commissions dont certains ont été repris dans la déclaration finale. Mais lorsque la rencontre s'est terminée par l'adoption sans vote du texte, beaucoup se sont sentis frustrés qu'il n'ait pas pu être vraiment discuté de façon démocratique.
Dans
son contenu, ce texte ne dépasse pas le cadre d'un antilibéralisme
respectueux des institutions, point neutre qui, s'il n'était pas dépassé,
paralyserait l'évolution possible des comités pour qu'ils puissent
devenir des cadres d'organisation de la lutte afin de construire un rapport
de force pour les droits et les revendications du monde du travail.
En ne fixant aucune perspective de lutte, de rupture avec les politiques et
les partis institutionnels qui ont donné son contenu au Non, le texte
laisse le terrain aux manuvres politiciennes des appareils qui n'ont d'autres
objectifs qu'électoraux dans le cadre d'une recomposition à la
gauche de la gauche, sur le terrain institutionnel, ainsi qu'en témoignait
la présence de leaders nationaux comme Marie-Georges Buffet ou José
Bové qui, poussés par leurs ambitions électorales, sont
venus faire une brève apparition en fin de journée, apparition
à visée médiatique.
Pour
que les collectifs deviennent un front pour préparer la riposte
La présence de notre camarade Olivier Besancenot affirmait de fait une autre politique, une politique de rupture et la perspective du regroupement, de l'unité de toutes les forces autour d'un plan d'urgence sociale et démocratique.
Les débats ont avant tout reflété la préoccupation de faire face à la nouvelle offensive du patronat et aux attaques du gouvernement Villepin-Sarkozy, au démantèlement des services publics et des protections sociales partout en Europe, à la nécessité de construire une autre Europe sur la base du rejet de toutes les politiques libérales en cours. C'est tout un mouvement qui se cherche, qui cherche une politique, et qui ne veut pas se laisser enfermer dans les tactiques électorales pour 2007 même si, bien évidemment, chacun y pense. En défendant une politique de rupture, de lutte, nous pouvons contribuer à orienter les comités vers des cadres d'organisation de cette lutte, cadres unitaires qui répondent aux besoins et aux préoccupations des militants et de tous ceux qui en ont fait durant toute la campagne la richesse et le dynamisme.
C'est cette politique que nous devons défendre largement dans les comités pour aider à ce qu'ils deviennent des cadres unitaires d'organisation des luttes. Les militants de l'organisation qui ont été à l'origine et ont animé de nombreux comités - la Ligue était de loin l'organisation la plus présente à cette rencontre nationale - en ont largement les moyens.
Pour
répondre aux besoins du mouvement social, il nous faut regrouper autour
d'un plan de revendications qui mette en avant le rejet des mesures Villepin-Sarkozy,
l'interdiction des licenciements, 300 euros d'augmentation des salaires pour
tous, un Smic et un revenu minimum à 1500 euros, le partage du travail
entre tous.
De nombreux militants ont contribué à construire les collectifs
pour le Non après avoir été des militants des collectifs
interpros en 2003 ou de ceux contre la guerre en Irak, faisant tomber les barrières
des organisations syndicales ou politiques, à la recherche de l'unité
des salariés et de la démocratie. Répondre aux besoins
de ces militants, comme à tous ceux, en particulier du PC qui sont en
rupture avec les partis institutionnels et leurs politiques, c'est défendre
un plan de lutte qui réalise l'unité du monde du travail, en rupture
avec les partis gouvernementaux et tous ceux qui cherchent à ramener
le mouvement social et les comités dans l'impasse institutionnelle.
Il
n'y a pas d'autre voie pour que les acquis de la campagne ne soient pas dévoyés
à des fins contraires aux intérêts des travailleurs.
Catherine Aulnay
La victoire du Non, point d'appui pour défendre une politique de classe au sein de la CGT
La dernière mobilisation du 21 juin à l'appel principalement de la CGT, mais aussi de la FSU et des Solidaires, peut apparaître comme faible, voire un échec. Journée organisée sans conviction par l'appareil, elle a rassemblé essentiellement des militants syndicaux et des proches. Pourtant, le mécontentement est profond, il s'est exprimé le 29 mai, il s'exprime aussi tous les jours sur les lieux de travail. Mais pour les salariés, ces journées d'action n'ont aucune crédibilité. Pourquoi faire grève, sortir manifester, alors que la CGT n'a pris aucune initiative depuis le 10 mars ?
Ce décalage entre le mécontentement, la nécessité de répondre aux attaques patronales, aux provocations du gouvernement illégitime et affaibli, et la politique des directions syndicales notamment celle de la CGT apparaît en toute clarté aux yeux de beaucoup de militants comme de travailleurs du rang.
Comment surmonter cet obstacle de la passivité des directions syndicales, unifier les luttes qui ne manquent pas, préparer un mouvement d'ensemble qui, seul, leur permettrait de changer le rapport des forces ? Ces questions sont celles que se posent bien des militants, conscients de cette carence et qui vivent et partagent le mécontentement des travailleurs.
Les militants révolutionnaires
ne sont pas, par leur seule force, en mesure de répondre à ces
questions mais ils ont devant eux de nouvelles possibilités pour peser
sur les événements. Là aussi la victoire du Non est un
point d'appui. Elle déstabilise l'appareil de la CGT et contribue à
l'ouverture d'un large débat sur les perspectives tant sociales que politiques.
Les doutes des militants et l'impossibilité pour l'appareil de faire
taire la contestation permettent cette large discussion.
Et c'est bien l'ensemble de la politique de la direction de la CGT qu'il s'agit
de contester pour repenser une politique de classe à tous les niveaux
de l'activité. Nous avons à formuler des réponses à
la hauteur des interrogations et des enjeux.
Une politique
syndicale qui tourne le dos aux intérêts des travailleurs
Depuis 1995, la
combativité s'est approfondi en même temps que ce décalage
entre les revendications des travailleurs et les perspectives proposées
par les directions syndicales.
Cela s'est vu lors des luttes nombreuses pour les retraites en 2003 et la Sécu
en 2004 où les salariés ont su imposer dans les manifestations
leurs propres revendications, comme les 37 ans et demi pour tous ; de même
lorsque Cohen, dirigeant CGT d'EDF, prêt à signer l'accord de privatisation,
a été désavoué par un vote majoritaire des salariés.
Les événements de 2005 ont prolongé et confirmé
cette situation. Le niveau de conscience et de combativité des travailleurs
s'est approfondi. Nous étions près d'un million dans la rue le
10 mars, salariés du public, mais aussi, ce qui était nouveau,
nombreux du privé.
Les directions syndicales, inquiètes, ont tardé à donner une suite au 10 mars, ou se sont dérobées.
Le lundi de Pentecôte
s'est inscrit dans cette logique : colère de tous ceux qui voulaient
marquer le coup, même dans beaucoup de petites boites
et direction
traînant les pieds, ou ne sortant de tract d'appel que sous les protestations
venues des boites ou des Unions locales.
Cette combativité exprime le besoin d'en découdre face à
toutes les mesures contre nos conditions de vie, et est en même temps
un désaveu de l'attentisme des syndicats qui privilégient la discussion
avec les patrons
plutôt que l'organisation d'une contre-attaque
conséquente. La politique du " diagnostic partagé ",
entre " partenaires sociaux " cherchant des solutions ménageant
les intérêts des patrons et des salariés, est désavouée
dans les faits.
La bataille autour
du référendum a confirmé, sur le plan politique, ce renouveau
de combativité contre le libéralisme, et son appendice de gauche,
le social libéralisme.
Le rejet du traité par le CCN de la CGT, bien obligé de s'incliner
devant les votes des syndicats de base, est le reflet des riches débats
qui ont eu lieu entre les militants et une bonne partie des dirigeants. Débats
dans lesquels les militants d'extrême gauche et du PC ont joué
un rôle important, étendant les discussions parmi les salariés
au-delà des rangs syndicaux. Mais ce rejet est aussi l'expression de
la rupture entre une partie de la direction de la CGT et la base.
Et la victoire
du non, dans ce qu'elle exprimait clairement le refus des attaques anti-sociales
et la volonté d'une autre Europe au service des travailleurs et des peuples,
a fait chanceler la direction, prise à contre-pied, a libéré
la parole des militants, fiers et heureux d'avoir marqué un point contre
tous les politiciens
et leur direction.
et qui
privilégie un " syndicalisme de proposition " dans le cadre
du système
Malgré les
contestations, Thibault louvoie, mais n'abandonne rien de son orientation du
syndicalisme d'adaptation. Se retrouvant sur le même terrain que le patronat,
il lui distribue généreusement ses conseils ainsi qu'à
l'Etat et prône des solutions pour mieux " gérer " les
usines, les crédits, l'investissement, l'emploi
Pour lui, pas de
solution en dehors de l'Etat qui a pourtant prouvé mille fois qu'il fait
toujours la politique du patronat, qu'il soit gouverné à droite
ou à gauche.
Comme il l'a dit à la manifestation du 9 juin : " L'Etat n'est pas
condamné à être un spectateur, il peut agir au plan local,
au plan national jusqu'au niveau européen
", comme s'il était
spectateur !
Plusieurs tracts
CGT reviennent à la charge : " L'industrie doit s'appuyer sur de
nouveaux projets répondant aux besoins économiques et sociaux
(santé, énergie, préservation de l'environnement, information,
communication...)
Cela passe par une responsabilisation des entreprises
: les ressources financières doivent être mobilisées : les
crédits des banques, les trésoreries des entreprises et les aides
de l'Etat et des collectivités territoriales doivent servir à
améliorer et renforcer leur efficacité
. "
Voilà donc nos seules perspectives contre le chômage massif ? Obtenir
pour les patrons de nouvelles subventions, dont on sait qu'elles seront empochées
sans retour, sans empêcher un seul licenciement ?
Le " statut du salarié ", avancé comme la solution miracle, peu pris au sérieux par les militants, s'inscrit dans cette logique de " trouver des solutions ". Sous le prétexte de ne pas laisser les chômeurs sans moyens de vivre, on s'incline tout bonnement devant la logique capitaliste - univers indépassable - qui ne peut se passer de millions de chômeurs en permanence.
C'est cette orientation
" force de proposition " qui est ouvertement contestée. Pas
seulement par les révolutionnaires, mais aussi par des militants, en
particulier proches du PC, par de nombreux travailleurs syndiqués ou
non, tous ceux qui ont perdu leurs illusions dans le social libéralisme.
Un
programme d'urgence à défendre partout
Les révolutionnaires
s'appuient sur cette contestation de la direction et utilisent la liberté
de débat qui a fait suite à la victoire du non au référendum.
L'appareil a du mal à faire taire la contestation, comme cela s'est vu
lors de congrès récents, Santé, Commerce. Le prochain congrès
confédéral - congrès de recentrage, voire de revanche sur
le 29 mai - risque bien d'être un exercice périlleux et offrir
par la même occasion des possibilités aux militants contestataires
qui ne manqueront pas de faire entendre leur voix. Le problème qui est
posé est de savoir donner une cohérence, une unité à
cette voix autour des revendications fondamentales du monde du travail.
Il faut refaire
avec les anciens du PC qui retrouvent goût à l'action comme avec
les nouveaux venus l'apprentissage de la démocratie dans le syndicat,
comme au dehors.
Les révolutionnaires ont largement participé aux collectifs pour
le non au référendum, et là où ils ont su garder
leur liberté de parole, ils ont clairement donné un contenu de
classe, internationaliste à ce non. Cela les place en bonne position
aujourd'hui pour continuer à y combattre le libéralisme, en leur
donnant comme perspective de soutenir les luttes ouvrières et sociales,
de défendre la démocratie ouvrière,
les droits syndicaux contre les attaques du pouvoir. Alternative de classe,
face à tous ceux qui voudraient en faire des organes de regroupement
en vue de leurs ambitions électorales pour 2007.
Ce débat, que les révolutionnaires mènent dans les collectifs, comme à la CGT et dans tout le mouvement social, est indispensable pour les luttes futures, car une conscience commune, une détermination à se battre, ne peuvent se forger que s'il y a un débat permanent entre tous les travailleurs, les militants, permettant de créer des liens solides, basés sur la confiance réciproque dans les objectifs.
Là où cela se pratique, dans les syndicats d'entreprises, les UL, des militants retrouvent le goût pour les idées, l'activité, la lutte. C'est notre capacité à faire vivre la démocratie ouvrière qui permettra à chacun de retrouver, dans la lutte, dignité et fierté face aux patrons et à l'Etat.
Les révolutionnaires
n'ont pas à hésiter à avancer les revendications du plan
d'urgence sociale et démocratique : interdiction des licenciements, embauches
massives dans toutes les Fonctions publiques et dans le privé, partage
du temps de travail et augmentation des salaires, SMIC pour les chômeurs,
défense des services publics, et retour de la retraite à 37,5
ans. Elles peuvent sembler à certains irréalistes, mais il n'y
a pas d'autre réponse aux drames qui vivent les travailleurs. Le reste
est une affaire de rapport de force.
Un programme de
lutte syndicale de classe ne peut se cantonner à la seule CGT. Il faut
proposer un front unique de lutte capable d'entraîner l'ensemble des travailleurs
et de leurs organisations, syndicats, associations, partis. Les salariés
ont soif de cette unité, mais elle nécessite qu'ils sachent exercer
leur contrôle pour qu'elle ne se fasse pas au rabais, c'est-à-dire
à leur dépend.
Un large débat
est ouvert parmi les militants et une fraction du monde du travail sur les moyens
de faire face à la nouvelle offensive qu'engagent patronat et gouvernement.
Les militants qui entendent se réapproprier et faire vivre les idées
de la lutte de classe, de la nécessaire rupture avec le capitalisme qui,
seules, peuvent permettre de mener les revendications jusqu'au bout, n'ont pas
à s'auto-limiter.
La renaissance
du mouvement passe par la mise en uvre pratique par les travailleurs eux-mêmes
des idées de leur propre combat, sur le terrain des luttes, à
grande échelle et en toute démocratie loin des petites combinaisons
d'appareils.
Michel
Valmy et Gérard Villa