Débatmilitant | ||||||||||
Lettre publiée par des militants de la LCR |
n°136
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18 janvier 2007
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Sommaire : | ||||||||||
2007 ou la rupture dans la continuité | ||||||||||
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2007 ou la rupture dans la continuité
Sarkozy vient donc
d'être sacré candidat par le congrès UMP, sans surprise
ni concurrent vu les ralliements de ces derniers jours de la plupart des proches
de Chirac. Et les médias se répandent en commentaires, analyses,
flagorneries
En quelques jours, on a vu Juppé, Borloo, Alliot-Marie
venir apporter
leur soutien. Il n'y a eu guère que Villepin pour maintenir sa " diversité "
en déclarant qu'il ne voterait pas pour lui
Mal lui en a pris puisqu'il
s'est fait huer par des " Va te faire élire ! ",
proférés par des députés de sa propre majorité.
Mais ce faisant, il apparaît au grand jour que celui qui posait à
la rupture puis à la " rupture tranquille " pour tenter
de se démarquer du gouvernement et de Chirac et jouer, sans rire, à
l'homme nouveau, se coule dans le moule pour s'assurer le soutien de toute la
droite dans la continuité des attaques de tous les gouvernements contre
le monde du travail depuis 20 ans.
Quand
Sarkozy fait du Chirac-Raffarin
" J'ai changé "
Ce qui se voulait un
élan de sincérité n'était qu'un nouveau simulacre
d'un opportuniste dévoré par l'ambition du pouvoir et tout dévoué
au patronat. Son discours populiste visait à ratisser le plus large possible
dans la quête des voix de tous bords. " Je veux être
le président d'une France qui remettra le travailleur au coeur de la
société ". Le voilà donc qui prend la pose
au-dessus des partis, déclarant même " tendre la main
à la France des travailleurs qui ont cru à la gauche de Jaurès
et de Blum ".
Et s'il se fait discret sur son bilan comme celui du gouvernement, les intentions
affichées sont sans ambiguïtés. C'est la continuité !
Le fond de sa politique, c'est la poursuite de l'offensive contre le monde du
travail. Et son populisme ne fait que prolonger celui de Raffarin pour mener
son offensive sur les retraites ou la Sécu. Sarkozy se dit très
préoccupé par la " valeur travail " et les
travailleurs, comme Chirac se penchait sur la " fracture sociale "
ou Raffarin sur " la France d'en bas " !
Les phrases creuses ne sont là que pour faire passer les nouveaux cadeaux
fiscaux aux plus riches (impôts sur les sociétés, bouclier
fiscal à 50 % au lieu de 60 %) ou lorsqu'il reprend à
son compte la campagne actuelle du gouvernement contre les régimes spéciaux
au nom de " l'équité ".
Dans la droite ligne des attaques du gouvernement contre le code du travail,
il défend le contrat unique qui ferait disparaître la notion même
de licenciement en contrepartie d'une soi-disant " sécurité
des parcours professionnels ".
Très préoccupé par le travail, " pas assez
récompensé, valorisé, respecté ",
il avance même une solution pour augmenter les salaires
Augmenter
la durée du travail avec des heures supplémentaires exonérées
de charges sociales et d'impôt sur le revenu !
Il dénonce " l'assistanat généralisé "
contre les chômeurs et les plus pauvres en lançant qu' " aucun
minimum social ne soit accordé sans la contrepartie d'une activité
d'intérêt général ". Par contre pour
les plus riches, très largement assistés par l'argent public,
il déclare qu'on " n'a pas à s'excuser d'avoir un
patrimoine en contrepartie de son travail "... et surtout du travail
de beaucoup d'autres qui, eux, n'ont rien. Lui qui se vante de vouloir " moraliser
le capitalisme " prêche surtout la morale des capitalistes
et de l'aristocratie financière qui parasitent le travail humain.
Enfin, il s'en prend au droit de grève, cet état de fait insupportable
pour les patrons pendant lequel la " valeur travail "
ne rapporte rien. Dans les services publics, il annonce une loi " dès
le mois de juin 2007 " pour garantir le service minimum en cas
de grève. Mais ce n'est pas tout, il veut même " qu'une
loi impose le vote à bulletins secrets dans les 8 jours du déclenchement
d'une grève dans une entreprise, une université, une administration ".
Face à cette démagogie arrogante, Ségolène Royal
ne réussit guère à donner crédit à sa propre
rupture avec la politique passée du PS. Ses tentatives de se démarquer
de la politique menée par la gauche sociale-libérale depuis 20
ans ne font que souligner les convergences passées et à venir
entre la droite et la gauche. La page de la cohabitation est certes tournée,
mais le fond politique tend de plus en plus à se réduire à
un populisme agitant les mêmes prétendues valeurs, la " valeur
du travail et de l'effort ".
Les effets médiatiques, les poses pour jouer à la candidate " proche
des gens ", les fausses simplicités destinées à
s'imposer face à la suffisance des anciens ministres des Finances Fabius
et Strauss Kahn, laissent maintenant la place au vide du programme, à
la réalité des politiques passées et à venir, la
continuité d'une politique toute entière soumise aux intérêts
de ceux qui payent l'impôt sur la fortune
Un club auquel Sarkozy
comme Ségolène Royal appartiennent.
Le
PS en crise d'identité ou comment se différencier de la droite
Le Monde titrait " Inquiétude au PS sur le trou d'air de
la campagne Royal ", relatant les états d'âme de
députés inquiets de cette stratégie de débats " participatifs "
où le but est d'en dire le moins possible : " Nous
n'avons que des petites phrases, bravitude et autres... ".
Par contre, dès que le PS tente d'annoncer une mesure pour tenter de
se différencier un tant soit peu de la droite, elle est vite relativisée
voire désavouée par la candidate Royal.
Hollande vient d'en faire l'expérience, en avançant, sans la chiffrer
bien entendu, l'idée d'une augmentation des impôts pour les personnes
qui gagnent plus de 4 000 euros mensuels net. Ségolène Royal
a aussitôt déclaré : " la priorité
qui est la mienne, c'est la lutte contre les gaspillages. Il n'y aura pas de
fiscalité nouvelle qui serait interprétée comme un élément
qui décourage le travail et l'effort ". Elle a même
confié à Strauss-Kahn, ancien ministre des Finances qui a mené
la politique de baisse d'impôts pour les plus riches, le soin de réaliser
un diagnostic " sur les réformes du système de prélèvements
favorables à l'emploi, au pouvoir d'achat, à la justice sociale,
à l'efficacité économique et à l'innovation "
Les baisses d'impôts au nom de la lutte contre le chômage, cela
n'a rien de bien nouveau, tant pour la droite que pour la gauche.
Interviewée sur les déclarations d'Hollande, elle a d'ailleurs
déclaré : " Je suis comme François Mitterrand,
je suis respectueuse de la liberté d'opinion... " rappelant
au passage toute la continuité de la gauche sociale-libérale,
qui dès Mitterrand, bloquait les salaires, faisait le " sale
boulot ", selon l'expression de Mauroy, des licenciements dans
la sidérurgie ou la métallurgie pendant que Bérégovoy
relançait l'activité de la Bourse en vantant les profits qui sont
les emplois de demain.
La
seule rupture, c'est celle de la lutte de classe
La droite est toute heureuse d'avoir un chef, elle croit pouvoir se réjouir
de son unité apparemment retrouvée. La gauche espère pouvoir
donner le change grâce à la candidature d'une femme qui, en elle-même,
représente un changement misant sur la volonté d'une large fraction
de la population de virer la droite. Mais les deux pourraient bien s'user avant
même d'être au pouvoir, tellement leur discours est lui-même
usé et leurs convergences apparaissent au grand jour. Les classes populaires
sont lasses de ce spectacle qui les prend à témoin pour mieux
les gruger, y compris parmi ceux qui veulent voter Royal pour battre Sarkozy,
et dont nous sommes solidaires.
Et le show de la campagne présidentielle ne manquera pas de convaincre
bon nombre de travailleurs que ce n'est pas sur ce terrain électoral
et institutionnel qu'ils pourront faire valoir leurs intérêts.
Face à l'offensive des classes possédantes, ce sont bien d'autres
ruptures qui sont en train de s'opérer au sein du monde du travail. C'est
ce dont témoigne la révolte des 233 salariés de Sublistatic,
jetés à la rue par les financiers et qui menacent de renverser
les cuves d'encre " si on nous mène en bateau " !
Comme le montre également le mouvement actuel des SDF qui réclament
la réquisition des logements vides et qui occupent un immeuble la rue
de la Banque où ils ont installé un ministère de la crise
du logement.
Face au parasitisme de ce système, il faut imposer des mesures d'urgence
comme les réquisitions d'entreprises qui licencient ou de logements vides.
Le monde du travail doit intervenir pour ses propres intérêts avec
ses propres méthodes, celles de la lutte et du contrôle démocratique
sur la marche de la société.
C'est ce que nous dirons avec Olivier Besancenot. Pour les anticapitalistes,
les élections seront une tribune pour faire entendre une autre voix,
celle d'une autre France que celle de Sarkozy et du club de l'ISF, la France
d'en bas, des travailleurs, de toutes nationalités, des luttes.
Denis Seillat