Débatmilitant
Lettre publiée par des militants de la LCR
n°163
26 juillet 2007

Sommaire :

Sarkozy, images d'Epinal et lutte de classes...

Nouveau parti et nécessité d'une Internationale



Sarkozy, images d'Epinal et lutte de classes…

Sarkozy n'en finit pas de courir : discours à Épinal sur les institutions, conférence sur le Darfour où il courra peut-être en compagnie de Gordon Brown, en passant par la Libye... Etrange personnage qui a besoin d'occuper le terrain à tout prix, subjuguant une cour qui chante sur tous les tons le " New Look Bonaparte " comme l'écrit Bernard-Henri Lévy, sans craindre le ridicule. Ce dernier discerne en lui, malgré tout, " un pirate de l'identité ", court-circuitant les uns, usurpant la politique des autres, véritable caméléon prenant un malin plaisir à se glisser dans leurs habits pour mieux les déposséder de toute existence politique.

Ainsi, la libération des infirmières bulgares, achetée au prix de commandes de l'Etat libyen, aura été mise en scène pour en attribuer tout le mérite à Sarkozy, avec le secours obligé de Cécilia. A propos du Darfour, il rivalise de zèle avec le " french doctor " Kouchner, lui volant son rôle habituel, pour déclarer aux côtés de Gordon Brown que " la situation ne peut plus durer, il y a urgence, des gens meurent et des gens souffrent, il faut que ça cesse… Nous sommes même prêts, si la résolution était votée, à nous rendre au Darfour, au Tchad et au Soudan ensemble ". Les deux anciennes puissances coloniales étalent leur imbécillité, cherchant à se donner l'image de nouveaux missionnaires de l'humanitaire. Surtout, elles ont bien du mal à cacher leur arrogance de puissances impérialistes, voulant renforcer leur présence dans cette zone riche, en concurrence avec la Chine pour le contrôle du pétrole, en gérant les tensions avec les USA dans le cadre de la " guerre contre le terrorisme ". Le résultat ? Qu'importe. Pour l'instant, c'est l'image qui compte.

Comme à Epinal, où Sarkozy a engagé sa réforme des institutions, cherchant une fois de plus à se glisser dans le costume d'un autre, un peu grand, celui de De Gaulle. Il le cite cent fois : " il faut que le chef d'Etat en soit un, il faut que le gouvernement en soit un, il faut que le parlement en soit un, ainsi parlait le Général ". Il prétend à son image s'élever au-dessus du " régime des partis ", du " régime d'assemblée ", " ces convictions ne sont pas d'un parti. Elles ne sont ni de gauche ni de droite. Elle n'ont qu'un seul objet qui est d'être utile au pays ". Grandiloquence qui ne cache pas le vide du propos : la réforme ne sera qu'un bricolage de convenance, dans la continuité du prétendu chantier institutionnel dont Chirac et Jospin avaient fait l'essentiel, c'est-à-dire instaurer le quinquennat et modifier le calendrier électoral pour éviter les cohabitations. Mais là encore, l'important est d'offrir une nouvelle mise en scène du spectacle présidentiel.

Sur ce sujet, comme sur la plupart des autres, Hollande et le PS n'ont rien à dire, ou si peu. Ils s'indignent de la " dérive présidentialiste ", voire de la " présidence impériale " (Badinter), et annoncent que le PS " a des propositions à faire et les fera dans le cadre d'un dialogue clair, transparent ". Sarkozy n'a plus qu'à souligner les convergences : " il a fallu deux septennats de François Mitterrand pour que les institutions de la Ve République cessent d'être regardées par une partie de la gauche comme un "coup d'Etat permanent" ". Ce que confirme Jack Lang, déclarant que " la Constitution n'appartient ni à un clan ni à un autre ". Après s'être parfaitement adaptée au système qu'elle dénonçait, la gauche ne sait plus que resservir le plat réchauffé du prétendu bonapartisme, contribuant à grandir son adversaire, presque mieux que ceux qui le flagornent.

Sarkozy, c'est bien plutôt la dissolution du gaullisme et des gaullistes dans le libéralisme, l'économie de marché sans faux-semblant appliquée à la politique. Si De Gaulle prétendait que " la politique ne se faisait pas à la corbeille " (la Bourse, à une époque où son rôle dans l'économie était très secondaire), pour Sarkozy, c'est le CAC 40 qui fait la politique, celle des gros actionnaires, des riches, dont il fait la promotion auprès de l'opinion.

Le fond du problème pour le pouvoir, c'est que la démocratie parlementaire est ruinée par la dictature du consensus libéral. Et la réforme du quinquennat n'a rien résolu de la crise parlementaire et institutionnelle. Au contraire, les gouvernements qui se succèdent font la démonstration que les institutions sont au service de la bourgeoisie. Cela se voit de plus en plus, aggravant le mécontentement contre l'Etat, la justice, le pouvoir.

Sarkozy en a une certaine perception quand il évoque le " développement de l'impuissance publique, le discrédit de l'action politique, la déresponsabilisation d'une partie des élites ", critique qui lui a servi pour se faire élire, avivant les contradictions sans autre projet que de servir sa propre ambition. Aujourd'hui, ses réponses montrent sa faiblesse : des phrases creuses sur " une démocratie apaisée dans une république irréprochable ", appelant au secours Clémenceau et De Gaulle, présentés comme les hommes providentiels seuls capables de surmonter les crises. Il rassure en disant que " bien sûr, et fort heureusement, notre pays n'est pas aujourd'hui au bord d'un gouffre institutionnel ", mais en jouant de la crise institutionnelle, il en est aussi prisonnier, il en devient un rouage.

Alors, il improvise une réforme, comme durant toute sa campagne, au gré des rapports de forces et des effondrements des adversaires, s'étonnant lui-même de ses succès. Son seul projet est de gagner encore, de ne pas perdre de temps pour engager la bataille des municipales. Il continue ainsi de jouer au simulacre de rupture pour conserver les voix de l'extrême droite, tout en s'inscrivant dans la continuité de la cohabitation et de la grande coalition du vote Chirac en 2002 où le PS s'était enferré. Il pousse un peu plus l'ouverture, avec son talent évident à user des charmes corrupteurs du pouvoir de l'argent, et de l'argent du pouvoir. Mais cette agitation désordonnée contribue à mettre à nu la vérité des rapports politiques, révélant à quel point l'univers parlementaire est celui d'une corruption tous azimuts, ruinant un peu plus le peu d'illusions qui reste dans l'alternance. Prétendant conjurer la nouvelle étape imminente de la crise, il ne fait probablement que l'accélérer.

Il contribue à mettre à nu aussi la vérité des rapports de classes. L'argent de la bourgeoisie, les profits du patronat s'étalent. Le " paquet fiscal " a contribué à mettre sur le devant de la scène l'enrichissement des privilégiés. Les flagorneries incessantes dans les médias, la nullité de l'opposition parlementaire, ne suffisent pas pour empêcher le mécontentement de grandir, de s'affirmer, de converger peu à peu contre celui qui prétend incarner tous les pouvoirs.

Face à l'œuvre dévastatrice du libéralisme qui soumet par la force corruptrice de l'argent et du pouvoir une droite et une gauche tout aussi déstabilisées l'une que l'autre, une conscience populaire se construit, en rupture avec le capitalisme et ses institutions. Nous sommes au cœur de ce mouvement politique des travailleurs qui rompent avec l'ordre établi, pour contribuer à ce qu'y naisse une conscience révolutionnaire, la compréhension qu'il s'agit de la lutte entre la propriété privée capitaliste et le monde du travail, les producteurs, c'est-à-dire la propriété collective, socialiste des moyens de production. Cette conscience est démocratique aussi, au sens où ce conflit prend la forme de la lutte entre la dictature d'une minorité parasitaire et de l'Etat à son service, et la majorité de la population.

Deux camps se dessinent, le monde du travail contre celui du capital… et aucun Bonaparte ne peut aujourd'hui appuyer son pouvoir sur un équilibre entre les deux, parce que, sous le fouet de la concurrence capitaliste et de la rapacité des actionnaires, il n'y a pas de compromis social possible. Le fossé s'élargit, le pouvoir s'inquiète de voir le spectre de 68 se profiler, et derrière lui, celui du communisme, la lutte des travailleurs pour leurs intérêts et leur émancipation.

Franck Coleman


Nouveau parti et nécessité d'une Internationale

La France n'est pas un isolat. Un coup d'œil chez nos voisins le confirme amplement. Partout se multiplient les mêmes attaques contre le monde du travail et les classes populaires : privatisations, démantèlement des services publics, diminution du salaire direct et indirect (systèmes de sécurité sociale ou équivalent, retraites), licenciements et précarisation croissante… Chaque mesure qu'un gouvernement réussit à mettre en place encourage ses voisins à aller plus loin, quand ce n'est pas de manière plus concertée dans le cadre des institutions européennes.

Fait notable également, la responsabilité de la social-démocratie dans la mise en œuvre de ces politiques ne se dément pas : parfois seule aux commandes comme en Grande-Bretagne, parfois en collaboration avec la droite comme en Allemagne, parfois même en collaboration avec la " gauche de la gauche " comme en Italie avec le Parti de la refondation communiste. Ces variations locales font la particularité de chaque pays, mais au bout du compte la variété des configurations ne change pas grand-chose sur le fond de la politique qui est menée.
La mondialisation libérale et impérialiste a ainsi contribué au rapprochement des pays d'Europe, et même jusqu'à un certain point des classes ouvrières entre elles. C'est un fait objectif que la bourgeoisie tente évidemment de circonvenir, en divisant pour mieux régner, en distillant le poison du nationalisme, parfois avec l'aide des organisations du mouvement ouvrier.

Un tel processus ne s'est pas arrêté aux portes de l'Europe. Il a contribué à unifier bien plus largement la planète toute entière, même si c'est de façon très contradictoire.

La mondialisation a certes creusé un peu plus encore les inégalités de développement entre les pays et les inégalités sociales à l'échelle du monde. Mais elle a simplifié à sa façon non seulement les rapports de classe, mais également les coordonnées de la situation dans laquelle interviennent la plupart des organisations du mouvement ouvrier.

Bien des problèmes auxquels le mouvement révolutionnaire était confronté dans la période d'après guerre ne se posent plus dans les mêmes termes. Ainsi la question coloniale, et même dans une certaine mesure la question agraire, n'ont plus un caractère aussi décisif qu'il y a seulement quelques dizaines d'années. Par contre le prolétariat urbain s'est considérablement renforcé, singulièrement dans les grandes métropoles des pays du Tiers Monde. Il est devenu majoritaire dans la plupart des pays, tout en étant confronté à un processus de mise en en concurrence systématique de la force du travail, non seulement entre pays impérialistes et pays dominés, mais à toutes les échelles, y compris dans les pays pauvres.

La mondialisation a également réduit partout les marges de manœuvre dont disposaient les gouvernements pour essayer de trouver, dans la mesure du possible, des possibilités de compromis social. Le populisme comme les formes multiples de clientélisme qui pouvaient se développer dans bien des pays pauvres n'ont pas disparu et conservent inévitablement une certaine attractivité. Mais les possibilités objectives pour ces gouvernements de tromper les masses ne sont plus les mêmes. La conversion de la social-démocratie au social-libéralisme se vérifie partout, de même que la disparition des partis staliniens depuis celle de l'URSS. L'adaptation du Parti des travailleurs de Lula au Brésil -dont l'histoire est pourtant un peu particulière- aux exigences du FMI et de sa propre bourgeoisie illustre mieux que n'importe quel autre exemple un processus qui plonge ses racines dans les besoins du Capital, quelles que soient les spécificités de chaque pays.

Le choix d'une politique résolument internationaliste va donc bien au-delà d'un geste de solidarité envers les luttes des exploité-e-s et des opprimé-e-s des autres pays. Il découle fondamentalement de la situation objective, du système capitaliste lui-même et de son caractère toujours plus mondialisé, ainsi que de la nécessité de remporter des victoires décisives à cette échelle. Il intègre les leçons et les bilans politiques de ces dernières années pour redéfinir les contours d'une nouvelle Internationale, anticapitaliste et révolutionnaire.

Prendre la mesure de la nouvelle période et nous tourner résolument vers la jeunesse et le monde du travail

Les années 1990 ont été marquées de manière contradictoire par l'accélération d'un processus de décomposition des vieux partis issus de l'histoire du mouvement ouvrier en même temps que par l'apparition de nouveaux acteurs de la lutte de classe.

Les tentatives de reconstruire un mouvement ouvrier révolutionnaire en essayant de détacher des pans entiers des partis réformistes ou staliniens ont fait long feu et perdent désormais de leur pertinence au fur et à mesure que ces partis s'adaptent toujours plus étroitement aux impératifs de la mondialisation libérale et perdent leur caractère de classe.

Quant à celles qui consistaient à expérimenter la construction de partis dont l'orientation resterait durablement indéterminée entre réforme et révolution, notamment au Brésil avec le Parti des travailleurs et en Italie avec le Parti de la refondation communiste, elles n'ont guère résisté aux pressions qui vont dans le sens de l'intégration dans le cadre des institutions de la bourgeoisie. La construction d'un parti comme celui de La Gauche (" Die Linke ") en Allemagne ne devrait rien apporter de nouveau, si ce n'est être d'emblée plusieurs crans en dessous : pas même un parti qui aurait la prétention de refonder un projet communiste comme en Italie ni même un parti issu d'un puissant mouvement de lutte des travailleurs comme celui de Lula. Mais un parti qui a déjà eu le temps d'expérimenter toutes les formes de trahison gouvernementale avant même d'être porté sur les fonds baptismaux !

Les révolutionnaires, en tout premier lieu les trotskystes qui se réclament de l'héritage politique de la IV° Internationale, sont donc confrontés un peu partout aux mêmes questions stratégiques, et finalement à la même alternative : recomposition d'une " gauche de gauche", certes antilibérale mais réformiste, arrimée au bout du compte, et c'est inévitable, aux combinaisons parlementaires des partis de gauche de la bourgeoisie, ou affirmation d'un parti des luttes, pour le pouvoir des travailleurs, en toute indépendance de classe.

En même temps s'affirment de nouvelles possibilités à partir des luttes et des expériences politiques de ces dernières années.

C'est le cas notamment avec le mouvement altermondialiste dont le principal acquis n'est pas seulement de réaffirmer qu'un " autre monde est possible " mais de permettre de nouer concrètement des liens entre militants d'horizons très différents, de pays différents, et d'affirmer ainsi l'existence d'aspirations internationalistes, après une longue période d'ignorance mutuelle ou de solidarité abstraite contre l'impérialisme, en soutien aux luttes nationales des pays dominés.

Cette expérience a bien sûr bien des limites. Le mouvement altermondialiste est un creuset duquel pourraient surgir des éléments de recomposition. Il ne peut pas être par lui-même le cadre de refondation d'une nouvelle internationale. Il est pour cela beaucoup trop hétérogène, et surtout trop lié dans son ensemble aux cadres institutionnels de la bourgeoisie ce qui est pour une large part à l'origine de la crise qu'il connaît. Le dernier Forum social mondial à Nairobi en a été une illustration, certes un peu caricaturale mais néanmoins significative.
Parallèlement, de forces nouvelles qui ne s'intègrent pas forcément dans des courants déjà constitués apparaissent, se tournent vers les révolutionnaires ou sont sensibles à leurs idées. Ce sont en particulier des jeunes, issus du monde étudiant ou déjà insérés dans le monde du travail, qui se sont soulevés récemment contre les attaques de leur gouvernement en France ou en Grèce, ou contre la guerre en Grande-Bretagne ou en Italie, qui n'ont pas subi le poids des défaites du passé, pas plus qu'ils ne sont démoralisés par les trahisons des partis de gauche qui n'ont la plupart du temps trahi que les illusions de leurs aînés.

S'adresser à cette nouvelle génération militante est une gageure, bien différente de celle d'essayer d'influencer des courants déjà organisés. Elle pose avec d'autant plus d'acuité la nécessité de construire un " parti large ", c'est-à-dire un parti radical, révolutionnaire car c'est bien le renversement du capitalisme que nous voulons, mais qui cherche systématiquement à se lier humainement et politiquement à des milieux larges de la jeunesse et du monde du travail, à leurs préoccupations, à leur vie même, et bien sûr à leurs luttes.

Construire une nouvelle Internationale : du passé prenons ce qui est utile !

La deuxième guerre mondiale et le stalinisme ont marqué une rupture décisive dans l'histoire du mouvement ouvrier avec la destruction presque complète de son courant révolutionnaire, ou sa dénaturation profonde.

La IV° Internationale a d'abord été un drapeau et sans doute un espoir, celui de transmettre au milieu d'un champ de ruines les ferments d'une révolte générale contre l'ordre impérialiste mondial à la fin de la guerre, puis lors de la grande vague de décolonisation. Malgré ses faiblesses et ses divisions, elle a joué un rôle capital jusqu'à nos jours en assurant la transmission d'un programme politique et théorique qui reste pour nous un acquis considérable.

C'est aujourd'hui une nouvelle étape qui nous attend, puisqu'il nous faut désormais envisager la reconstruction de partis de masse, en prenant acte de la disparition de l'URSS et des partis staliniens, ainsi que la conversion achevée de la social-démocratie au social-libéralisme. La construction de nouveaux partis réellement implantés dans la jeunesse et dans le monde du travail se mènera de pair avec celle d'une nouvelle Internationale.

Le décalage entre les acquis programmatiques qui sont les nôtres, issus de multiples expériences révolutionnaires, et les expériences accumulées par le prolétariat à l'heure actuelle reste pour nous un défi considérable. A l'évidence, il nous faudra refaire une série d'expériences pour que ces acquis le deviennent à l'échelle de masse. Mais cela ne passera pas non plus par la répétition de toutes les erreurs et toutes les tragédies du mouvement ouvrier. L'histoire heureusement n'est pas un éternel recommencement !

L'Internationale à construire sera forcément beaucoup plus délimitée que la première, celle à laquelle Marx avait participé, de 1864 jusqu'à la Commune de Paris, qui intégrait des syndicats, des mutuelles, des partis, des coopératives et toutes sortes d'organisations, avec bien sûr des réformistes et des révolutionnaires. Elle ne ressemblera pas non plus à la IIIème Internationale, parti mondial de la révolution prolétarienne, du moins dans un premier temps. Parce que la construction d'un outil centralisé, adapté à une période de guerre et de révolution contre la bourgeoisie, ne se décrète pas de manière artificielle, au nom des acquis du passé ou en prévision des échéances futures.

Ce sera une construction progressive qui passera sans doute par des étapes transitoires, des tentatives de regroupement plus ou moins structurées, peut-être sur une période assez longue même si nous ne pouvons guère anticiper les rythmes, avant de déboucher sur une construction réellement achevée.

Ce que l'on peut envisager avec une certaine confiance, c'est qu'une avancée réelle dans la construction d'un parti des travailleurs en France aura une signification bien plus large, tant il est vrai qu'une seule démonstration de politique pratique est en règle générale plus convaincante que les meilleurs argumentaires en faveur des meilleurs programmes !

Ce sera un point d'appui pour réintroduire la légitimité d'une politique révolutionnaire au sein du mouvement altermondialiste, et sortir de la fausse alternative dans laquelle il se situe la plupart du temps, dans l'opposition entre mouvement social et politique institutionnelle, tout en restant sur le terrain ambigu de l'antilibéralisme, source de bien des confusions. Ce sera également une possibilité supplémentaire pour avancer dans la construction d'un cadre international, démocratique et révolutionnaire, avec d'autres courants anticapitalistes ou d'extrême gauche en premier lieu ceux issus du mouvement trotskyste.

La reconstruction de liens internationaux sera d'autant plus solide qu'il y aura des avancées significatives dans la construction de partis ayant acquis une influence de masse dans quelques pays. Car sans cette expérience pratique, il est douteux qu'émergent un cadre, une direction, un programme, susceptibles de réunir des courants différents dans des pays différents. La construction d'une organisation à l'échelle internationale est certes une question de délimitation et de programme. Mais ce serait une illusion bien doctrinaire de croire qu'elle se fera avant tout d'en haut. Ce sont des expériences multiples, de construction et d'intervention réelle dans la lutte de classe, des échanges multiples entre courants et sections qui donneront une assise réelle à nos débats, et permettront à terme de construire solidement un programme et une direction pour une nouvelle Internationale.

Une tâche ambitieuse sans doute, qui peut paraître encore difficile à atteindre, mais qui est inscrite dans les possibilités de la période, comme dans le projet d'avancer vers la construction d'un nouveau parti anticapitaliste, un parti pour le pouvoir des travailleurs, résolument internationaliste.

Jean-François CABRAL