Débatmilitant
Lettre publiée par des militants de la LCR
n°182
27 décembre 2007

Sommaire :
Noël sur terre pour tous les opprimés


Noël sur terre pour tous les opprimés…

En cette période de fêtes de fin d'année, alors que les luttes des mal-logés témoignent de l'explosion de la précarité, jamais il n'y a eu autant de millionnaires et de milliardaires, signe que les riches sont de plus en plus riches et l'affichent avec de plus en plus d'arrogance. Leur luxe tapageur, présenté comme le signe extérieur de la réussite sociale et auquel ils voudraient faire rêver les plus pauvres, n'est que le reflet de l'étroitesse des aspirations sociales de cette classe de parasites et de ses valeurs réactionnaires, mélange d'individualisme, d'esprit de concurrence et d'indifférence aux autres… Sarkozy s'en fait le champion.

Cet étalage de richesses n'est qu'indignité et cynisme alors que la réalité pour le plus grand nombre ce sont les difficultés quotidiennes devant la hausse des prix, des salaires insuffisants, la précarité et le chômage, les difficultés pour se loger et tout simplement pour finir le mois.

L'inflation officielle en France tourne autour de 2,4 à 2,6% pour l'année 2007, mais les chiffres de l'INSEE minimisent la situation. La presse a publié un listing retraçant l'évolution des prix de 250 produits parmi les plus vendus en grandes surfaces qui révèle une hausse moyenne sur trois ans de 11,5% en moyenne. La hausse du prix du pétrole et des matières premières alimentaires a entraîné une forte augmentation du prix des produits courants que les statistiques masquent de moins en moins derrière la baisse des prix de certains produits de haute technologie. Certains économistes parlent même d'un véritable " choc des tarifs alimentaires " qui ne fait que commencer et qui frappe l'ensemble des économies, pays industrialisés en tête. Ainsi la hausse des prix aux Etats-Unis atteint pour l'année 4,3%, et pour l'ensemble des pays européens, elle est de 3,1% sur les 12 derniers mois, ce qui était inégalé depuis 2001.

Sous le fouet de la concurrence et de la course au profit, l'économie mondiale est en surchauffe.

Pour accumuler toujours plus de profits, une poignée de groupes financiers spéculent sur les marchés boursiers internationaux sur des biens aussi vitaux que le pétrole ou les matières premières alimentaires, entraînant la valse des prix dont sont victimes les populations.

C'est cette même folie spéculative qui a conduit à la crise des crédits immobiliers à risques qui, partie des Etats-Unis, est en train de se généraliser en paralysant l'ensemble du système financier mondial. L'inflation, la crise financière remettent en cause toutes les prévisions de croissance des économistes et fait même naître la crainte d'une récession généralisée. Cette crainte deviendra à plus ou moins long terme une réalité car l'avidité des groupes financiers ne connaît aucun ralentissement, bien au contraire la crise ne fait qu'accentuer la concurrence acharnée à laquelle ils se livrent.

C'est la contradiction même du capitalisme qui s'exprime à l'échelle mondiale, produire comme si le marché était illimité alors que, dans le même temps, la pression sur les salaires, la hausse des prix diminuent la consommation et la demande solvable.

Les gouvernements gèrent cette contradiction. Ils ne jurent que par la croissance économique qui devrait permettre d'améliorer le pouvoir d'achat de la population. Mais en réalité toute leur politique sape la possibilité même d'une réelle croissance économique, car elle ne vise qu'à aider les plus riches en multipliant pour eux les cadeaux, tout en diminuant la part du monde du travail, ce qui ne fait qu'aggraver les inégalités sociales et ruiner le pouvoir d'achat du plus grand nombre. Leur politique ne fait que poursuivre l'offensive que mènent les classes dirigeantes depuis plusieurs décennies pour réduire la part des salaires dans la répartition de la richesse produite.

C'est une situation sans issue, conséquence des contradictions d'un système dont le but n'est pas d'atteindre un développement économique profitant à tous, mais seulement de créer les meilleures conditions possibles pour la réalisation du profit à travers toutes sortes de spéculations et quel qu'en soit le prix à payer par l'ensemble de la population.

C'est cette logique de classe que défendent gouvernements et patronat, c'est une logique qui au nom des intérêts d'une minorité de parasites, conduit toute la société à la catastrophe. Cette catastrophe est même annoncée par les économistes les plus lucides de la bourgeoisie qui sont bien conscients que le système est bien trop dominé par l'avidité et la concurrence des rentiers pour être capable de résoudre ses propres contradictions.

C'est dans cette logique que s'inscrit, derrière l'esbroufe et la démagogie de Sarkozy, la politique du gouvernement. Ce n'est qu'une fuite en avant devant les contradictions du système. Sarkozy qui s'est présenté comme le candidat du " pouvoir d'achat ", n'a d'autre politique que de poursuivre en les intensifiant les attaques contre le monde du travail menées par les gouvernements qui l'ont précédé. Au nom de la défense du pouvoir d'achat, il cherche à faire passer de bien réelles attaques sur les salaires, les retraites, les minima sociaux, contre le code du travail et toutes formes de protections sociales.

Après sa réforme sur les heures supplémentaires, le gouvernement prévoit maintenant d'ajouter la possibilité de négocier, entreprise par entreprise, la durée du travail, et la possibilité de " monétiser " les RTT. Autrement dit, il veut en finir avec la loi sur les 35 heures, avec l'idée même d'une réduction du temps de travail, sans pour autant augmenter les salaires.
Ces mesures, si elles s'appliquent, ne feront qu'aggraver la situation en accentuant encore d'avantage les inégalités sociales, et finalement en accumulant encore plus les éléments qui conduisent à la catastrophe.

La seule issue face au danger de la crise qui se prépare, ce sera d'imposer le respect des intérêts de l'ensemble de la société par la lutte collective.

C'est ce qu'à leur niveau ont commencé à faire les salariés entrés en lutte en cette période de fin d'années. Malgré la passivité des directions des confédérations syndicales, les grèves se sont multipliées ces dernières semaines pour réclamer des augmentations de salaire dans le privé comme dans le public. Il y a les salariés des grands magasins comme Carrefour, Géant Casino, Conforama, particulièrement sollicités en ces périodes de fêtes qui se mettent en grève magasins après magasins sur les salaires, contre le travail du dimanche et les heures sup imposés.

Il y eu la grève des médecins urgentistes, des personnels au sol d'Air France-Orly, comme celle des transports urbains à Bordeaux, et bien d'autres qui restent pour le moment encore isolées les unes des autres mais qui posent la question concrète d'une convergence privé-public notamment pour obtenir de réelles augmentations de salaires.

Alors, face à la folie égoïste d'une classe qui mène le monde à la catastrophe, l'avenir est du côté de tous ceux qui, salariés, mal logés, sans-papiers entrent en lutte collectivement pour exiger leur dû. A travers ces luttes qui se développent, s'expriment de toutes autres aspirations, une tout autre ambition que celle de cette accumulation de profit dans les mains d'une minorité de plus en plus ouvertement parasite. Les luttes de la classe des salariés sont porteuses d'une autre perspective, celle d'une société solidaire reposant sur la répartition des richesses produites pour satisfaire les besoins réels de la société. Au luxe tapageur, parasite, dispendieux de cette classe de riches et de rentiers, le monde du travail a un tout autre luxe à opposer, celui de la solidarité qui naît de la lutte collective pour la défense de ses droits, pour la transformation de la société par delà les frontières.

Ce n'est pas un conte de Noël pour faire rêver d'un monde illusoire de fraternité mais bien l'anticipation d'un monde nouveau, la fête sur cette terre de tous les opprimés…

Charles Meno