Débatmilitant | ||||||||||
Lettre publiée par des militants de la LCR |
n°188
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7 février 2008
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Sommaire : | ||||||||||
Lutte ouvrière, les municipales et la question du parti | ||||||||||
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Lutte ouvrière, les municipales et la question du parti
" Dans
les circonstances politiques actuelles, alors que Sarkozy veut faire du résultat
qu'il espère de ces élections une approbation de la politique
de son gouvernement, Lutte Ouvrière souhaite qu'il y ait dès le
premier tour une union de toutes les forces de gauche et elle est prête
à y participer. Ses candidats se présenteront donc sur de telles
listes d'union sauf si le Parti socialiste, le Parti communiste ou les deux
refusent cette alliance et préfèrent la division. Dans ce dernier
cas de figure, Lutte Ouvrière présentera évidemment, partout
où elle le pourra, ses propres listes " écrit Lutte
ouvrière dans le numéro de février de sa revue Lutte de
classe (LDC) dans un article intitulé " Lutte ouvrière
et les municipales ". Une telle orientation étonne, surprend,
choque de la part d'une organisation qui avait fondé sa politique sur
l'indépendance par rapport à la gauche. Elle est l'aboutissement
d'une longue évolution entamée au lendemain de l'élection
présidentielle et du mouvement de novembre-décembre 1995. L'incapacité
de la direction de LO à répondre aux nécessités
de la nouvelle période qui s'ouvrait devant le mouvement ouvrier et révolutionnaire
après l'effondrement des scories du stalinisme a eu alors comme conséquence
un repli sectaire, une crispation sur elle-même étouffant toute
vie démocratique tant à l'intérieur qu'à l'extérieur.
Au moment où la nécessité de construire un " parti
des travailleurs " devient une question posée à tous les
militants du mouvement ouvrier qui n'entendent pas abdiquer devant l'offensive
du patronat et du gouvernement ni entériner l'adaptation au libéralisme
de la gauche gouvernementale et syndicale, ce virage à 180° souligne
l'échec d'une direction soumise à la férule d'un seul,
enfermée sur elle-même et son passé, dupe d'elle-même,
confondant ses propres reculs et échecs avec ceux de l'histoire
Une nouvelle époque commence qui laissera en arrière tous ceux
qui ne sauront pas intégrer l'idée que démocratie et révolution
ne font qu'un parce qu'elle donnera une nouvelle vie, une nouvelle force aux
idées du socialisme et du communisme, non pas à des dogmes desséchés
mais aux besoins même d'émancipation humaine.
Un
virage qui tourne le dos au passé de LO
Au retour de l'été, les positions affichées par bien des
camarades de LO laissaient entendre qu'ils étaient disponibles à
des listes communes avec nous. Ce n'est que ponctuellement qu'a pu transparaître
le fait que LO envisageait la possibilité d'être sur des listes
d'union de la gauche notamment à Saint-Brieuc, Lorient, Angers et Avrillé.
Deux semaines avant le congrès de LO, dans un article intitulé
" Lutte Ouvrière et les Municipales à venir ",
Roger Girardot s'en prenait à la presse pour mieux brouiller les pistes :
" Une fois de plus, on a pu vérifier à ce propos
les capacités d'affabulation d'une partie de la presse, du Figaro à
Libération en passant par le Parisien et France Inter.
Il a suffi d'une lettre envoyée par un de nos camarades de Saint-Brieuc
à la socialiste qui dirigera la liste de gauche aux Municipales de cette
ville, pour que la presse se laisse aller. Il a suffi ensuite qu'un journaliste
du Parisien transforme ce fait mineur et titre : " LO : Arlette offre ses
services... au PS " pour que, deux jours après, un autre journaliste,
de Libération cette fois, affirme que c'est Arlette Laguiller qui a écrit
à la tête de liste socialiste de Saint-Brieuc. Ce journaliste n'avait
sans doute lu que le titre de son confrère du Parisien.[...]
Pour 2008, nous préparons à nouveau des listes Lutte Ouvrière
qui seront au moins aussi nombreuses qu'en 2001. Le problème est que
nous ne voulons pas que, dans la situation politique actuelle, nos listes puissent
nuire aux listes de gauche.
C'est pourquoi nous avons engagé des discussions avec les listes de gauche
qui nous sollicitaient et, dans d'autres cas, nous avons pris l'initiative en
nous adressant aux candidats du PCF.
Nous ne faisons pas cela pour avoir des élus car, des élus, nous
pouvons en avoir en nous présentant indépendamment comme en 2001. "
Le texte soumis au vote au congrès début décembre, rendu
public dans la LDC de janvier, restait plein d'ambiguïtés :
" Nous aurons bien sûr le problème d'alliances éventuelles.
Nous ne sommes plus en 2001. La droite a peut-être encore le vent en poupe.
L'électorat peut être encore traumatisé par sa présence
à la tête de l'Etat et tenté de se porter sur ceux des partis
de gauche qui ont des chances de gagner et, en plus, être décidé
à ne pas disperser ses voix. Une situation qui peut être très
défavorable à la gauche de la gauche et à l'extrême
gauche. Nous avions prévu, depuis longtemps, deux ans au moins, que nous
risquions d'être laminés à la Présidentielle. Nous
n'avions pas anticipé le résultat mais nous avons dit et écrit
qu'il serait très probablement très inférieur à
celui que nous avions eu en 2002. Mais quelle que soit la situation, nous devons
quand même faire l'effort d'une campagne car obtenir des élus municipaux
est extrêmement important pour notre rayonnement politique. Ces élus
sont un point d'ancrage dans une ville et l'axe autour duquel peuvent graviter
nos activités locales [...] La conclusion est que nous devons essayer
de constituer des listes dans le maximum de localités. Cela ne nous empêchera
cependant pas d'étudier et d'être ouverts à toute proposition
d'alliance, que nous étudierons en fonction des situations, des rapports
de forces locaux et des possibilités d'élus que ces alliances
pourraient réellement nous ouvrir. Nous n'avons en effet aucun intérêt
à conclure des alliances sur un programme d'accords avec nos éventuels
alliés si cela ne nous permettait pas d'avoir des élus, voire
nous en empêchait, et d'autant plus que nous avons les moyens de nous
présenter indépendamment."
Le souci de conditionner un accord à la possibilité d'avoir des
élus était certes formulé mais il ne s'agissait pas encore
d'avoir des élus à n'importe quel prix ou plutôt au prix
de sacrifier son propre programme en participant à des listes d'union
de la gauche.
Touche après touche, la direction de LO a engagé ses militants
et ses sympathisants dans un tournant politique qu'il ne lui est plus possible
d'enrober dans des périphrases ou des allusions. " Dans
les circonstances politiques actuelles, Lutte Ouvrière souhaite qu'il
y ait dès le premier tour une union de toutes les forces de gauche et
elle est prête à y participer. Ses candidats se présenteront
donc sur de telles listes d'union, sauf si le Parti Socialiste, le Parti Communiste
ou les deux refusent cette alliance et préfèrent la division.
Ce n'est que dans ce cas que Lutte Ouvrière présentera ses propres
listes. " (numéro 2060 du 25 janvier de Lutte ouvrière).
Le
virage est pris.
La
"suspension" et l'exclusion de la discussion
Et, dans le même temps, la direction de LO veut clore une discussion qu'elle
n'a pas voulue. Dans le même numéro de LO, celui de la semaine
du congrès de la Ligue, on peut lire, dans l'espace de la "Tribune
de la minorité", un encart : " La tribune de la
fraction ne paraîtra pas cette semaine.
Nos lecteurs ne trouveront pas dans ce numéro la tribune hebdomadaire
de la minorité de Lutte Ouvrière qui existe en tant que fraction
organisée au sein de notre organisation depuis des années. En
effet l'accord conclu entre la minorité et la majorité de Lutte
Ouvrière a été remis en cause. La parution de cette tribune
est donc interrompue pour une période indéterminée ".
Le lecteur n'est pas en mesure de juger de la nature de la remise en cause ni
d'où elle vient, confusion volontairement entretenue
Mais il ne
peut faire de doute que la discussion autour de ce virage politique, est au
cur de "la remise en cause". C'est ce que devait préciser
un communiqué de LO "Il y a douze ans, des camarades en désaccord
avec certains choix politiques et organisationnels de la direction de Lutte
Ouvrière avaient demandé à s'organiser en fraction au sein
de notre organisation. Après une large discussion à laquelle avaient
pu prendre part tous les militants de Lutte Ouvrière, cette demande avait
été acceptée et un protocole d'accord fixant les relations
entre Lutte Ouvrière et sa minorité avait été adopté.
A l'occasion de la préparation des élections municipales, il est
apparu que la minorité faisait une lecture de ce protocole d'accord tout
à fait différente de celle de la majorité, ce qui le remet
évidemment en cause. En conséquence, son application est suspendue
jusqu'à ce que les militants de Lutte Ouvrière se soient prononcés,
dans les formes statutaires, sur les futures relations entre la majorité
et la fraction minoritaire." Le comité central de LO du week-end
dernier devait confirmer la "suspension" des camarades de la minorité
qui la considère comme une exclusion : "Le Comité central
de LO, écrivent-ils dans un communiqué en date du 4 février,
a décidé samedi 2 février la "suspension" de
la Fraction l'Etincelle jusqu'au prochain congrès de l'organisation qui
se tiendra en décembre. Cette exclusion de fait, qui s'applique à
tous les niveaux de l'organisation et toutes les instances et concerne toutes
les activités militantes, en particulier la participation, rédaction
et vente de la presse nationale comme d'entreprise, tombe au moment où
Lutte Ouvrière effectue un tournant politique à 180° et cherche
à s'intégrer dans l'union de la gauche à l'occasion des
prochaines élections municipales.
Le prétexte qui a servi de justification à la direction de LO
est d'ailleurs significatif. Cette mesure d'exclusion a été prise
parce que deux conseillers sortants élus en 2001 sur les listes LO de
Wattrelos (Nord), dont un membre de la Fraction, n'ont pas accepté d'être
écartés cette année, manuvre qui n'avait d'autre
objectif que de faciliter les négociations pour des places éligibles
sur la liste de gauche emmenée par le Parti Socialiste. On ne peut dire
plus clairement qu'il s'agit de se débarrasser de ceux qui n'acceptent
pas un alignement derrière le Parti Socialiste et refusent de prôner
une union de la gauche à laquelle LO s'était toujours opposée
jusque-là, que cette gauche soit dans l'opposition ou au gouvernement.
Cette intégration ne se fait certes pas sans mal puisque d'une part le
Parti Socialiste a repoussé jusqu'ici les offres de services de Lutte
ouvrière dans une majorité des villes où elle les a proposées
et qu'elle se heurte d'autre part aux réticences ou même à
l'hostilité d'une partie des militants et sympathisants d'extrême
gauche. Ces difficultés ne sont d'ailleurs pas étrangères
à la détermination de la direction de LO à exclure son
opposition interne.
Quoi qu'il en soit, la Fraction l'Etincelle continue évidemment ses activités
militantes comme son combat politique pour la construction d'un parti ouvrier
communiste révolutionnaire, entre autres pour un retour de Lutte Ouvrière
à une politique non entachée d'opportunisme électoral."
Le virage à 180° opéré en quelques mois sans réelle
discussion démocratique, c'est-à-dire publique et transparente,
ne peut supporter la lumière de la discussion, de la confrontation publiques.
La direction de LO engagée dans un virage dont elle n'a pas le contrôle
craint les bilans. La fuite en avant dans laquelle elle est engagée depuis
les lendemains de 1995 pour tenter d'échapper à son propre échec
l'enferme dans une impasse et ne fait qu'accentuer cet échec annoncé.
Ce virage n'a pas d'autres raisons que les intérêts d'une direction
sans perspective, dépassée intellectuellement par la nouvelle
situation. On ne peut imaginer qu'il ne soit que circonstanciel. Il a sa propre
logique et conduira probablement LO a maintenir son nouveau cap pour chercher,
si c'est possible, des alliances sur sa droite pour les élections européennes
et régionales à venir.
Le prochain congrès annoncé qui statuera sur la situation de la
minorité sera prisonnier de la logique du virage qui vient d'être
pris. Il ne pourra qu'entériner son exclusion dans le même temps
qu'il formalisera, d'une façon ou d'une autre, ce que Hardy n'a pas osé
imposer au dernier congrès, le repositionnement de LO et, encore une
fois si cela est possible, la volonté de LO de s'intégrer sinon
dans l'union de la gauche du moins, plus probablement, dans la recherche d'un
accord avec le PC ou ce qu'il sera lui-même devenu, pour tenter de perpétuer
une organisation sans politique indépendante, démoralisée,
sans perspective et prisonnière d'un règlement intérieur
absurde.
La page serait tournée, l'évolution engagée depuis 1995
aurait enfermé LO dans son propre piège.
Dogmatisme
et démoralisation
Fin novembre 2007, le BP de la Ligue avait adressé une lettre aux camarades
de Lutte ouvrière pour leur proposer d'envisager ensemble la campagne
des municipales. Cette lettre est restée sans réponse, une première
dans les relations de nos deux organisations. Cela parce que les raisonnements
qui sous-tendent son virage politique n'obéissent qu'à d'étroites
préoccupations d'une direction à la dérive et ne peuvent
se discuter publiquement. L'indigence de l'argumentation officielle et publique
saute aux yeux à la lecture de l'article de la LDC de février
consacré à cette question.
"Ce n'est évidemment pas en fonction de la politique prônée
sur le plan national par la gauche que nous déterminerons notre politique"
peut-on lire en préambule, politique par ailleurs fustigée. Pourquoi
alors que par ailleurs, l'article souligne le fait que Sarkozy fait des municipales
un test politique national ? Quelle est la meilleure façon de sanctionner
Sarkozy ? Voter pour ceux qui sont partisans de la réforme des régimes
spéciaux, du mini-traité européen, de l'économie
de marché, ou pour des anticapitaliste révolutionnaires ?
La question est ignorée par l'article dont le propos est bien plus de
justifier dans le flou ou de dire des évidences pour défendre
la nécessité d'avoir des élus que d'argumenter sérieusement.
Bien évidemment, il est nécessaire de "s'investir, dans
la mesure des possibilités pratiques, dans l'activité syndicale,
les luttes électorales, et les interventions sur le terrain communal".
Dire cela, c'est enfoncer une porte ouverte. Nous nous battons pour avoir des
élus, mais sur notre politique, nos idées, nos perspectives et
avec ceux qui en partagent les grandes lignes.
"Mais le fait est là : ce n'est généralement
pas la même chose pour les classes populaires de vivre dans une commune
gérée par la gauche que par la droite " peut-on
lire sans que soit poussé le raisonnement. Certes, c'est là encore
une évidence qui mériterait cependant quelques précisions,
et une évidence qui ne saurait suffire à justifier la participation
des révolutionnaires à des listes d'union, encore moins à
en faire une politique.
" Le rôle de conseillers municipaux révolutionnaires
[
] c'est en un mot de se servir de leur mandat comme d'un haut-parleur
(malheureusement d'une puissance limitée !) pour faire entendre le point
de vue des communistes révolutionnaires sur tous les problèmes
de notre société." On souscrit à cette nouvelle
évidence qui conduit cependant à s'interroger. La campagne elle-même
ne serait-elle pas l'occasion de défendre le point de vue des communistes
révolutionnaires plutôt que de taire son programme pour avoir des
élus en participant à des listes d'union de la gauche ?
Poser la question, c'est y répondre et elle suffit à montrer la
mauvaise fois de l'argumentation de LO.
La
logique de l'abdication et de l'échec d'après 1995
Ce virage n'est pas un coup d'éclair dans un ciel serein, il n'est pas
circonstanciel même si la direction, prisonnière de ses propres
raisonnements, ni n'en mesure ni n'en contrôle les effets. Il s'est imposé
tout autant qu'il a été imposé, étape par étape,
aux militants et voudrait, ce sera autre chose de réussir, préparer
de nouvelles alliances dans la gauche, avec le PC pour les prochaines échéances
électorales. Un tel virage à 180° ne peut se comprendre qu'en
redéroulant le fil de l'évolution de Lutte ouvrière depuis
1995.
En 1995, le mécontentement d'une large fraction du monde du travail,
d'électeurs du PC s'était exprimé dans le vote pour Arlette
Laguiller à l'élection présidentielle. LO récoltait
le fruit d'une politique fondée sur l'indépendance vis-à-vis
de la gauche et permettait ainsi au mouvement révolutionnaire de gagner
une audience de masse qui allait se confirmer dans la décennie à
venir. Au lendemain de la présidentielle Arlette lançait un appel
pour un parti des travailleurs mais la direction de LO accompagnait cet appel
d'une politique sectaire, autocentrée, en décalage avec l'écho
nouveau rencontré par nos idées. En corollaire de cette incapacité
à mettre en uvre une politique correspondant à la nouvelle
période qui s'ouvrait la direction de LO allait exclure, début
97, 10 % de son organisation, ceux qui voulaient donner à l'appel
d'Arlette "un contenu concret, dynamique, militant". Exclusion
qui, ne pouvant avouer son sens réel, se fit sur par un mauvais procès
fabriqué de toutes pièces.
Le mois qui suivit notre exclusion nous publiions,
en mars 1997, une brochure intitulée Fausses raisons d'une exclusion,
vraies raisons d'une rupture, nos perspectives (1).
Nous nous présentions ainsi :
"Les militants à l'origine de notre tendance ont été
exclus de LUTTE OUVRIERE en mars 1997 pour avoir formulé la critique
du cours sectaire de sa direction, son repli sur elle-même. La direction
théorise ce repli en invoquant le manque de résultat de l'organisation
à capitaliser un tant soit peu le succès minime certes mais néanmoins
réel que représentait le score recueilli par Arlette LAGUILLER
aux élections présidentielles. Ce cours sectaire se traduit par
un raidissement factice des règles de fonctionnement interne qui paralyse
toute l'organisation et a abouti à l'exclusion des militants à
l'origine de notre tendance. Il est l'expression d'un manque de confiance dans
les capacités de la classe ouvrière à renouer avec les
idées conformes à ses intérêts et à s'organiser
en conséquence.
Nous nous fixons comme objectif de contribuer dans la mesure de nos forces à
donner un contenu concret, vivant, dynamique à l'appel lancé par
Arlette LAGUILLER au lendemain des élections présidentielles de
1995 pour la construction d'un parti ouvrier fidèle aux seuls intérêts
des travailleurs, des chômeurs, des exclus, des jeunes.
Nous entendons collaborer avec tous ceux qui souhaitent agir dans ce sens sans
exclusive en combattant toutes les formes de sectarisme, masque de l'opportunisme
et de la capitulation.
Notre situation ne peut être que transitoire. La situation nouvelle créée
par l'évolution de la situation sociale et politique impose à
tous ceux qui se réclament des idées du trotskysme, et plus généralement
des idées de la lutte de classe, du socialisme et du communisme de faire
face à de nouvelles responsabilités. Nous voulons contribuer à
créer le cadre nécessaire à la collaboration de tous ceux
qui veulent participer à la construction du parti dont la classe ouvrière
a besoin.
Nous nous revendiquons des idées de l'internationalisme et entendons
contribuer dans la mesure de nos forces à la renaissance d'une organisation
internationale communiste."
De cette rupture naquit donc le groupe Voix des travailleurs qui devait fusionner,
en toute cohérence avec la démarche politique ainsi définie
dès le lendemain de notre exclusion, avec la Ligue au congrès
de juin 2000. Et c'est en toute cohérence et continuité que nous
participons aujourd'hui pleinement à la majorité de la Ligue qui
vient, lors de son dernier congrès, de décider d'engager la bataille
pour ce nouveau parti, de relever le défi que nous lance la nouvelle
période.
Ainsi, depuis le printemps 97, deux évolutions parallèles ont
lieu : LO s'enferme dans son échec, son incapacité à
relever le défi de la nouvelle période, sélectionne ses
membres sur la base d'une discipline formelle alors que la Ligue a su saisir
le contenu de la nouvelle période, formuler une politique qui lui a permis
de surmonter ses faiblesses passées, de gagner son indépendance
politique vis-à-vis des partis de la gauche institutionnelle et, ainsi,
de gagner une large influence de masse. Au point aujourd'hui, à notre
dernier congrès, de relever le défi en engageant la bataille pour
un nouveau parti des travailleurs.
Là où LO a échoué, nous relevons le gant. Dès
lors, la direction de LO avait deux choix : soit raisonner avec esprit
critique et agir en fonction des intérêt généraux
du mouvement ouvrier et révolutionnaire en s'engageant avec nous dans
cette bataille sans taire aucune divergence, dans des rapports démocratiques ;
soit s'enfermer dans sa politique accentuant encore son sectarisme en s'opposant,
de fait, à notre projet. C'est cette deuxième hypothèse
qui s'est réalisée. Dans un texte de son dernier congrès
consacré au " parti que veut la LCR " elle
écrit : " La LCR semble engagée dans un important
virage organisationnel dont nous ne pouvons prévoir s'il va aboutir ou
pas. Même si nous estimons que sa tentative, vu ce qu'elle est, serait
une bonne chose dans le paysage politique actuel si elle réussissait,
nous sommes, en ce qui nous concerne, en désaccord fondamental avec ce
qu'elle veut faire. En effet, ce n'est pas un tel type de parti que nous espérons
créer." Pour préciser ensuite : " Même
si le parti que nous devons construire n'a pas toujours besoin de porter dans
son appellation ni communiste, ni révolutionnaire, ou trotskyste -ce
qui d'ailleurs est notre cas pour le moment-, il est absolument nécessaire,
par contre, que tous ceux qui entrent dans un tel parti sachent ce qu'est un
révolutionnaire marxiste et le soient, sachent ce qu'est un trotskyste
et le soient. Sinon, on ne peut pas construire une organisation susceptible
d'intervenir dans une révolution sociale qui changerait le monde. "
L'affirmation de notions dont la LDC se garde bien de préciser et de
définir le contenu qu'elles prennent aujourd'hui sert à masquer
le manque de confiance, le doute, voire la démoralisation, le manque
de capacité démocratique. D'un côté on proclame des
principes vidés de tout contenu, de l'autre on s'adapte au rapport de
force guidé par un sectarisme qui ne vise que ceux qui vous sont proches,
les rivaux ! Une telle évolution n'est pas nouvelle même si
elle se fait à travers une histoire spécifique. Hardy, sur ce
terrain, rejoint les méthodes de Lambert.
L'époque, où dominait le stalinisme, qui a façonné
ce type de dirigeants politiques au sein du mouvement trotskyste, est finie.
Une nouvelle époque commence, la renaissance du mouvement ouvrier et
révolutionnaire passe par une renaissance de rapports démocratiques.
L'époque des chapelles et des sectes prétendant plier le mouvement
à leur recette pour finir dans l'opportunisme le plus vulgaire est révolue.
La nouvelle génération saura sélectionner en son sein des
dirigeants d'une vigoureuse trempe démocratique, ne craignant aucun combat,
aucune discussion d'idées
Regrouper
les révolutionnaires dans la perspective d'un parti des travailleurs
Que signifie aujourd'hui être "un révolutionnaire marxiste",
"un trotskyste" ? Répéter des formules vidées
de tout contenu pour finir par proposer une politique d'union avec la gauche
institutionnelle ? Certainement pas. La continuité du combat pour
l'émancipation, aujourd'hui, c'est concrètement, pratiquement,
uvrer à regrouper toutes celles et ceux qui n'ont pas abdiqué,
c'est construire avec elles un cadre commun, ouvert, démocratique, pour
permettre à chacun de prendre sa place dans la lutte, d'apporter son
expérience, de s'enrichir de celle des autres, un cadre pour l'action
et la discussion. C'est travailler à l'élaboration d'un programme
pour un nouveau parti du monde du travail prenant en compte les acquis et faiblesses
du passé, les évolutions du capitalisme et les nouvelles possibilités
de transformation révolutionnaire qu'elle crée, c'est écrire
l'actualité de la démarche transitoire, définir une politique
pour les luttes en utilisant le terrain politique, électoral, pour travailler
à la construction d'un mouvement d'ensemble, construire une conscience
de classe fondée sur l'indépendance par rapport au PS et aux institutions...
Les camarades de LO ont toute leur place à prendre dans ce combat en
continuité avec l'appel d'Arlette pour un parti des travailleurs au lendemain
de la présidentielle de 1995.
Cela suppose adopter le point de vue d'un révolutionnaire matérialiste,
marxiste, oui, c'est-à-dire capable d'une pensée critique, cela
suppose s'assimiler le combat de Trotsky pour la démocratie, cela suppose
une transparence à l'égard des militants, des autres organisations
comme des sympathisants et des travailleurs.
Nous espérons que les camarades de LO, sa direction, trouveront la force
de se dégager du piège dans lequel ils se sont enfermés
et qui porte un mauvais coup à l'ensemble du mouvement. Nous avons confiance,
on ne peut ni suspendre ni exclure le débat, la discussion, la lutte.
Une époque s'achève, une renaissance du mouvement ouvrier, démocratique,
révolutionnaire est en route...
Yvan Lemaitre
1- accéder à Fausse raisons d'une exclusion, vraies raisons d'une rupture, nos perspectives, édité par Voix des travailleurs en mars 1997 - retour au texte